La Grande-Duchesse Maria Teresa et l’auteur Stéphane Bern dédicaçaient l’ouvrage «Un Amour souverain», ce samedi 20 novembre, à Luxembourg-ville. (Photo: Guy Wolff/Maison Moderne)

La Grande-Duchesse Maria Teresa et l’auteur Stéphane Bern dédicaçaient l’ouvrage «Un Amour souverain», ce samedi 20 novembre, à Luxembourg-ville. (Photo: Guy Wolff/Maison Moderne)

S.A.R. la Grande-Duchesse Maria Teresa a publié, en compagnie de Stéphane Bern, un livre qu’elle a défendu dans de nombreux médias depuis sa sortie le 10 novembre dernier. Et qui se vend très bien. 

Cela n’a pas dû vous échapper. La  de Luxembourg a publié voici quelques jours un livre aux éditions Albin Michel. Baptisé «Un Amour souverain», ce dernier contient quelques textes co-écrits avec le journaliste/spécialiste des têtes couronnées, le Franco-Luxembourgeois Stéphane Bern, et surtout propose un grand nombre de photos. Des clichés parfois inédits, tirés de l’album personnel du couple royal qui a fêté ses 40 ans de mariage le 14 février dernier.

Le best-seller de novembre chez Ernster

Et cela marche! C’est bien simple, depuis sa sortie officielle, le 10 novembre dernier, ce livre (dont tous les droits seront reversés à l’association Stand Speak Rise Up!, lancée par la Grande-Duchesse) est considéré comme le best-seller de novembre chez Ernster! durant deux heures à la librairie Ernster du centre-ville de Luxembourg, a d’ailleurs rencontré un large succès. 

Si la famille royale est un sujet qui passionne toujours une partie de la population, on note aussi que la promotion qui entoure cet ouvrage impressionne. La Grande-Duchesse ne ménage pas sa peine, parfois accompagnée de Stéphane Bern, pour pousser ce livre. Dans certains médias luxembourgeois, mais aussi en France. C’est ainsi qu’on l’a vue, la semaine dernière, sur le plateau de «C à vous», le talk en access prime time de France 5, mais aussi dans les pages de Paris Match, Vanity Fair ou Point de vue.

Une campagne de promotion telle qu’elle fait un peu penser à celle des auteurs de best-sellers sur le territoire hexagonal. Oui, mais voilà, la Grande-Duchesse est-elle une personnalité publique lambda? Au regard de la loi, l’épouse du souverain a-t-elle le droit d’effectuer une «promo» comme madame Tout-le-Monde?

Un rôle dans l’État?

«La question de base à se poser est de savoir si la Grande-Duchesse a un rôle public dans l’État. Si la réponse est non, comme certaines personnes n’arrêtent pas de le prétendre, elle n’est qu’une personne privée et donc libre, comme tout un chacun, de faire ce qu’elle veut», explique Luc Heuschling, professeur de droit constitutionnel à l’Université du Luxembourg.

Mais ce dernier penche plutôt dans l’autre camp. Celui du oui. «Pour moi, la Grande-Duchesse existe dans la Constitution», confie le constitutionnaliste. «Déjà parce que le Luxembourg est une monarchie héréditaire. Il y a donc implicitement une famille régnante avec un chef de famille, qui est aussi le chef de l’État, et un conjoint dont le rôle est de participer à l’engendrement et l’éducation d’un héritier. Autre indication claire que ce conjoint existe: la régence. Et pour le moment, celle-ci incombe à l’époux ou l’épouse du chef de l’État. Donc à la Grande-Duchesse Maria Teresa.»

Le rapport Waringo et l’arrêté grand-ducal du 9 octobre 2020

Si la Constitution ne définit pas clairement la place de la Grande-Duchesse dans l’État, «le gouvernement a, lui, concrétisé sa manière de voir les choses au travers de l’arrêté grand-ducal du 9 octobre 2020 sur la ‘maison du Grand-Duc’», poursuit Luc Heuschling. La «maison du Grand-Duc» étant ici à comprendre dans le sens d’«administration du Grand-Duc». Et l’arrêté du 9 octobre 2020 est celui qui a suivi la publication du fameux .

«Je ne vous cache pas que cela reste un peu flou ici aussi. Néanmoins, l’article 6 de cet arrêté défend également implicitement la thèse que la Grande-Duchesse a des activités officielles. Ce texte va donc aussi dans la direction que celle-ci possède un rôle et n’est pas une personne 100% privée.»

Quelles limites?

Dès lors, la question revient plutôt à se demander quelles sont les limites qui peuvent découler de ce rôle public par rapport à la liberté d’expression de la Grande-Duchesse.

«L’article 7 de l’arrêté, qui définit le rôle du Maréchal de la Cour, explique notamment que ce dernier est en charge des activités publiques du Grand-Duc, du Grand-Duc héritier et des membres de la famille, mais aussi de la communication externe et interne de la ‘Maison du Grand-Duc’. Ainsi, la Grande-Duchesse est également concernée», reprend le constitutionnaliste. «Mais le texte ne dit pas jusqu’à quel point le Maréchal doit contrôler la communication de celle-ci. Ce n’est pas clair. Si, dans ce flou, on rapproche la situation de la Grande-Duchesse de celle des fonctionnaires, tenus par un devoir de réserve, il y aurait une limite implicite à sa liberté d’expression. Mais, pour moi, lorsque la Grande-Duchesse évoque un domaine 100% privé, elle est libre de dire ce qu’elle veut. Et, à mon sens, il ne devrait pas alors y avoir de contrôle.»

«Pas une publication officielle»

Un avis que partage, a priori, , la maréchale de la Cour. Cette dernière ayant signifié à Paperjam que, dans le cas présent, à savoir la sortie d’«Un Amour souverain» et la campagne promotionnelle qui l’entoure, la question d’une quelconque approbation ne se posait pas. «Il ne s’agit pas d’une publication officielle et la Maison du Grand-Duc n’est ni éditeur ni auteur des textes», nous a-t-elle indiqué.

«Un Amour souverain» se veut, en effet, un livre très personnel, où le couple royal revient longuement sur sa rencontre, son mariage et la vie familiale qui a suivi. Néanmoins, on y retrouve aussi  Celle-là même qui  en début d’année après sa publication dans Paris Match. Remontant même jusqu’au Premier ministre,