Le FMI craint une bulle immobilière, dont l’explosion pourrait amener à des corrections de valeurs comprises entre 14% et 22%. (Photo: Shutterstock)

Le FMI craint une bulle immobilière, dont l’explosion pourrait amener à des corrections de valeurs comprises entre 14% et 22%. (Photo: Shutterstock)

5,3% de croissance pour le marché immobilier mondial en période de récession: un record qui inquiète le FMI. L’institution financière internationale y décèle des signes avant-coureurs d’une bulle, dont l’explosion ne serait pas sans conséquences.

Les raisons de l’exceptionnelle flambée du prix des logements, et ce malgré le Covid, sont désormais bien documentées. D’abord, une politique monétaire accommodante, qui, renforcée avec la pandémie, a stimulé les revenus des particuliers, et donc facilité l’accessibilité au logement.

Ensuite, une forte demande de maisons individuelles et multifamiliales résultant de l’évolution des préférences des ménages pour plus d’espace, préférence renforcée par l’émergence du télétravail. Les personnes qui en ont les moyens et qui peuvent télétravailler préfèrent des maisons plus grandes et plus éloignées des centres-villes, ce qui met certains segments du marché sous pression.

Enfin, une offre limitée qui a creusé le différentiel avec la demande. En plus des défis structurels qui limitent l’offre, comme le nombre limité de permis de construire dans les zones métropolitaines du monde entier, les goulets d’étranglement liés à la pandémie, tels que les pénuries et la hausse des coûts des matériaux et de la main-d’œuvre, ont prolongé les délais de construction et retardé l’augmentation de ladite offre. Et comme le relève le FMI dans la dernière édition de son Global Financial Stability Report, «les mises en chantier mondiales par habitant ont commencé à se redresser, bien qu’elles soient encore considérablement inférieures aux niveaux du début des années 2000».

Une correction qui pourrait atteindre entre 14% et 22%

Conséquence logique: «Alors que les prix des logements ont historiquement tendance à baisser pendant les récessions, ils ont bondi dans les principales économies de marché avancées et émergentes, et les reventes ont atteint des sommets historiques cette année.» Dans certains pays (Nouvelle-Zélande, Luxembourg et Turquie en tête), les prix réels des logements ont augmenté de plus de 15% depuis la fin de 2019.


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Le risque, selon le FMI, est que, dans ces périodes prolongées de croissance rapide des prix de l’immobilier, puisse s’installer l’anticipation que ces prix continueront à augmenter à l’avenir, ce qui peut conduire à une prise de risque excessive et à une vulnérabilité croissante des marchés de l’immobilier. Pour ce dernier, «les risques de baisse des prix de l’immobilier semblent importants». L’institution de Washington estime que, «dans le pire des scenarii», la baisse des prix de l’immobilier au cours des trois prochaines années pourrait atteindre 14% dans les économies avancées et 22% dans les marchés émergents, soit un retour à des niveaux pré-pandémie. Un pessimisme partagé par la Banque centrale européenne (BCE). Devant le Parlement européen, Andrea Enria, responsable des activités de supervision du secteur bancaire à la BCE, a indiqué que «la qualité des actifs semble être en train de se détériorer. Nous observons aussi l’apparition de vulnérabilités dans l’immobilier résidentiel dans certains pays.»

Pour l’instant, la situation semble sous contrôle si on considère que la situation financière des ménages est plus solide qu’au moment de la crise financière de 2008, ceux-ci ayant bénéficié de la baisse des taux d’intérêt des politiques de soutien budgétaires. Le FMI estime qu’«il existe un risque de détérioration de la situation financière des ménages en cas de retrait prématuré de ces politiques».

Subprimes: le retour?

Une hausse des défauts ne serait pas forcément fatale au système bancaire. Le risque de défaillance sur les prêts hypothécaires et autres dettes à la consommation s’est considérablement réduit ces derniers mois, observe le FMI, grâce, notamment, à une plus grande sélectivité des banques dans l’octroi de crédits, ainsi qu’au recul des prêts hypothécaires à taux d’intérêt variable. Sur ce dernier point, le Luxembourg fait figure d’exception.

Le risque, c’est une répétition de la crise des subprimes. Aux États-Unis, les prêteurs hypothécaires non bancaires sont devenus plus importants sur le marché américain de l’origination hypothécaire, notamment pendant la pandémie, en termes de refinancements. Des acteurs vulnérables à un resserrement brutal des conditions du marché du financement, dont la défaillance aurait un impact important sur le secteur du crédit.

La hausse des prix de l’immobilier pourrait aussi avoir rapidement des conséquences sociales, estiment les analystes. D’abord, le coût de plus en plus élevé des logements renforce les inégalités entre les générations, et entre les plus aisés et les plus pauvres. Ensuite, la hausse des prix finira par se traduire dans les loyers d’autant plus vite que l’offre tardera à répondre à la demande.