Pour Édouard Carmignac, le variant Omicron rend l’inflation moins temporaire. (Photo: Carmignac Gestion)

Pour Édouard Carmignac, le variant Omicron rend l’inflation moins temporaire. (Photo: Carmignac Gestion)

Carmignac parie sur une baisse de la croissance mondiale à 4,2% pour 2022 contre 5,1% en 2021, la faute à un passage à vide chinois au premier semestre avant un rebond au second. 2022 sera dominée par les thèmes de l’inflation et du risque géopolitique.

À la fin de l’année dernière, Édouard Carmignac, fondateur et PDG de Carmignac Gestion, estimait que l’inflation post-Covid devait s’avérer résistante, il soulignait que les forces déflationnistes séculaires (démographie, technologie…) compenseraient partiellement la pression à la hausse sur les prix. Le variant Omicron a, selon lui, rebattu les cartes et il s’attend désormais à un prolongement des pénuries en raison de la désorganisation dans la logistique et les chaînes d’approvisionnement. «Il faudra attendre encore un certain temps avant que les prix à la production ne commencent à baisser du fait que les fabricants réduisent leurs stocks de sécurité. Et le moment de cette baisse pourrait être encore repoussé si la situation déjà fragile de la santé publique en Chine s’aggrave», ajoute-t-il.

Si les effets de la pandémie vont durer plus longtemps que prévu, «ils finiront par passer», estime Édouard Carmignac, qui porte son attention sur «le marché du travail d’après-Covid». Un marché en pleine mutation. «La reprise économique actuelle, contrairement à celles qui ont suivi les récessions précédentes, s’est traduite par un niveau décevant de création de nouveaux emplois – même si le nouveau variant est moins dangereux et que les allocations de chômage sont réduites. Le nombre de demandeurs d’emploi a diminué, en raison de l’augmentation sensible du nombre de travailleurs prenant une retraite anticipée, de la diminution du nombre de couples avec enfants à la recherche d’un double revenu et de l’apparition de la dépression post-Covid – sans parler des millennials, dont les études ont été interrompues et qui n’aspirent plus à un poste traditionnel en entreprise.» Conséquence, «une pression à la hausse sur les salaires, en particulier à l’extrémité la moins qualifiée du spectre».

Des marchés actions toujours dynamiques

Si on ajoute à cela les pressions à la hausse sur les prix de l’énergie qu’Édouard Carmignac voit se prolonger, il s’attend à ce que les banques centrales resserrent leurs politiques monétaires pour éviter un dérapage inflationniste. Sans pour autant «faire dérailler la reprise économique en cours, qui est déjà menacée par la diminution des stimuli fiscaux».

Chez Carmignac, on pense que les marchés d’actions devraient continuer à être soutenus par les taux d’intérêt négatifs. Et on parie sur un scénario dans lequel «une hausse modérée des taux d’intérêt s’accompagnerait de tensions inflationnistes persistantes devant soutenir les valeurs de croissance avec une bonne visibilité des bénéfices qui constituent le cœur de nos portefeuilles. Ces entreprises ont la capacité d’absorber des coûts plus élevés tout en défendant leurs marges bénéficiaires, et sont moins vulnérables au ralentissement inévitable de l’activité économique que nous anticipons pour 2022.»

Ralentissement marqué au premier semestre

Ce ralentissement de l’activité, les économistes maison l’ont chiffré. Raphaël Gallardo prédit une croissance globale de 4,2% en 2022 contre 5,1% en 2021.

Dans le temps, le premier semestre sera marqué par un ralentissement de l’activité suivi d’un retour à la normale conduit par une Chine qui a déjà commencé à resserrer ses politiques monétaires et qui a donc pris de l’avance dans la normalisation des politiques monétaires et budgétaires. Des vents contraires existent et ne doivent pas être négligés: une stratégie zéro Covid économiquement coûteuse et tributaire de la mise à disposition d’un vaccin national attendu pour le troisième trimestre; une baisse attendue des exportations qui ont fortement contribué à la croissance en 2021, mais qui doivent faire face au rééquilibrage des dépenses des ménages occidentaux vers les services; et la situation du marché immobilier.

Pour la zone euro, Raphaël Gallardo voit «une croissance robuste de rattrapage qui se poursuivra en 2022»; un coût économique limité de la vague Omicron grâce aux campagnes vaccinales, à une impulsion fiscale positive et à un marché de l’emploi dont l’atonie permettra d’éviter un resserrement monétaire précoce.

La principale menace à la croissance européenne n’est pas d’ordre économique selon lui, mais d’ordre géopolitique. L’actuelle crise entre l’Ukraine et la Russie l’inquiète. Et il rappelle que la Russie représente 47% des importations de gaz de la zone euro et 25% des importations de pétrole…

Enfin, outre-Atlantique, le ralentissement «temporaire» de l’activité au premier trimestre suite à la vague Omicron est jugé «salutaire». Ne serait-ce que pour aider la Fed à refroidir une économie américaine surchauffée sans casser la croissance. Le principal risque venu des États-Unis est celui de voir se développer des risques de valorisations élevées dans certaines poches des marchés immobiliers et financiers.

Raphaël Gallardo voit, pour 2022, 3,6% de croissance aux États-Unis, 3,6% dans la zone euro et 4,7% en Chine. La Chine devrait rebondir en 2023 avec une croissance de 5,1% alors que zone euro et États-Unis continueront sur la lancée d’une baisse de croissance avec respectivement des estimations de 2,4% et de 2,1%.