Selon la Commission européenne, ce sont surtout les économies européennes hors de la zone euro qui sont le plus exposées aux incertitudes géopolitiques. (Photo: Shutterstock)

Selon la Commission européenne, ce sont surtout les économies européennes hors de la zone euro qui sont le plus exposées aux incertitudes géopolitiques. (Photo: Shutterstock)

Les banques résistent aux vents contraires géopolitiques grâce à des niveaux de capital et de liquidité élevés. Malgré tout, elles restent exposées à un défaut de paiement russe ou de ses entreprises. Face aux incertitudes macroéconomiques, les conditions d’accès aux crédits se sont resserrées.

À l’occasion de la présentation de ses à Bruxelles ce 16 mai, la direction générale Economic and Financial Affairs (DG ECFIN) de la Commission européenne s’est prêtée à une analyse des répercussions financières de la guerre en Ukraine. «Ces derniers mois, les conditions financières mondiales se sont resserrées et la volatilité a augmenté», indique la DG ECFIN.

Toutefois, «la guerre en Ukraine a renforcé les vulnérabilité préexistantes du système financier de l’UE», rappelle cette même DG ECFIN. En ce sens, les préoccupation concernant l’inflation galopante, l’impact économique du variant Omicron et l’affaiblissement de la politique monétaire des banques centrales incitaient déjà les investisseurs à faire preuve de prudence au début de 2022. C’est donc sur cette base que, mi-février, la géopolitique a accéléré les pertes sur les marchés mondiaux, reflétant la hausse des coûts de financement des entreprises, la détérioration des perspectives économiques due à la hausse des prix et des nouvelles perturbations de l’offre.

Malgré une proximité géographique directe de l’Union européenne à l’Ukraine et à la Russie, la DG ECFIN indique que les expositions financières directes de l’Union européenne aux deux pays restent limitées. «Les pertes potentielles encourues par les fonds d’investissement et les banques de l’UE ne sont pas assez importantes pour générer des problèmes de stabilité financière au sein du système financier.»

Pour confirmer son analyse, la Commission explique que le système bancaire européen «a développé une résilience au cours des trois dernières années», l’amenant à atteindre des niveaux de capital et liquidité élevés. «Par conséquent, les effets de la guerre en Ukraine devraient être contenus.»

L’euro se déprécie

Bien que la plupart des valeurs bancaires européennes soient peu exposées, l’exécutif européen n’exclut toutefois pas «un choc sévère» au niveau des banques et des fonds d’investissement en cas de défaut de la dette souveraine russe et des grandes entreprises, «éventuellement simultanément».

C’est surtout dans certains États membres en-dehors de la zone euro que la DG ECFIN observe un resserrement difficile des conditions financières, où les banques centrales ont poursuivi leurs rehaussements des taux directeurs en réponse aux fortes pressions inflationnistes. C’est notamment le cas de la Hongrie, la Pologne la Roumanie, le Danemark et la Tchéquie. «Les hausses de taux n’ont pas empêché une dépréciation de ces monnaies par rapport à l’euro», note la DG ECFFIN, tout en mettant en mentionnant «l’exposition économique plus importante de ces pays à la Russie et le rôle de valeur refuge que joue l’euro à l’égard des pays voisins».

Pourtant, la poussée de fièvre persistante de l’inflation au sein de la zone euro a contraint la Banque centrale européenne (BCE) à accélérer sa politique de normalisation, interrompant par exemple ses achats nets d’actifs dans le cadre du programme d’achat d’urgence en cas de pandémie (PEPP) à la fin mars. La Commission souligne également que, la pression inflationniste s’accélérant, le conseil des gouverneurs de la BCE a revu à la baisse le volume des achats nets d’actifs dans le cadre du programme d’achat d’actifs (APPP) en vue d’y mettre un terme à la fin de ce troisième trimestre. «Les marchés s’attendent désormais à plusieurs hausses des taux d’intérêt cette année, la première devant avoir lieu dès juillet», commente la DG ECFIN.

Alors que l’euro s’est déprécié de 2,1% depuis fin janvier en terme de taux d’effectifs nominaux, «la BCE reste en retard sur la Fed dans son cycle de resserrement», rapporte la Commission, ajoutant: «L’écart de rendement qui en découle associé au rôle de valeur refuge du dollar américain se traduit par une dépréciation significative de l’euro par rapport au dollar.»

L’euro se déprécie aussi par rapport au renminbi chinois, en raison d’une demande soutenue d’obligations et de biens chinois.

Un resserrement de l’accès aux crédits

Malgré un durcissement des conditions financières, les prêts bancaire dans la zone euro ont enregistré une augmentation. Selon la BCE, le taux de croissance annuel des crédits au secteur privé s’est ainsi établi à 4,7% en mars, contre 4,2% en décembre 2021. Le taux de croissance annuel des prêts aux sociétés non financières a par contre quelque peu reculé, passant de 4,3% en décembre dernier à 4,2% en mars.

L’accès aux crédits se sont par ailleurs resserrées au cours du premier trimestre de cette année. À en croire l’enquête de la BCE sur la distribution du crédit bancaire d’avril, «les banques de la zone euro ont fait état d’un léger resserrement net des critères d’octroi des prêts pour l’achat d’un logement», souligne la DG ECFIN.

C’est cependant surtout pour deuxième trimestre de 2022 que les banques s’attendent à un resserrement «nettement plus important» pour les prêts aux entreprises, ce qui reflète «l’anticipation d’une politique monétaire moins accommodante». Un resserrement qui intervient malheureusement juste au moment où les banques signalent une demande accrue des prêts aux entreprises, due à des besoins de financement en fonds de roulement suite aux nouvelles perturbations sur les chaînes d’approvisionnement.