Pollution par des déchets alimentaires et emballages sur la rive du lac Taungthaman près du pont U Bein au Myanmar.  (Image: Shutterstock)

Pollution par des déchets alimentaires et emballages sur la rive du lac Taungthaman près du pont U Bein au Myanmar.  (Image: Shutterstock)

Et si, en investissant dans l’agro-alimentaire disruptif, vous contribuiez à stopper la faim dans le monde et lutter contre le réchauffement climatique? Un investissement d’avenir, pour qui se montre patient, selon un économiste du groupe de gestion d’actifs Oddo BHF AM.

Le rapport 2021 sur l’indice de gaspillage alimentaire des Nations unies indique que 1,3 milliard de tonnes de nourriture sont perdues ou gaspillées chaque année dans le monde. Soit un tiers de toute la nourriture produite à l’échelle mondiale, un chiffre saisissant qui représenterait de quoi permettre à plus de 1,2 milliard de personnes de s’alimenter. En parallèle, le nombre de personnes souffrant de la faim sur la planète ne cesse d’augmenter: on l’estime aujourd’hui à environ 800 millions. Les sociétés de capital-risque sont de plus en plus nombreuses à investir dans des startups qui proposent des outils technologiques permettant de réduire le gaspillage alimentaire. d’euros au niveau européen en 2020, selon le rapport annuel de l’agence spécialisée DigitalFoodLab.

La société d’investissements française Agro Invest est spécialisée dans l’investissement des ETI et PME de l’agroalimentaire et l’agro-industrie. En 2021, la startup Too Good to Go a levé 25 millions d’euros pour redonner vie aux invendus alimentaires, principalement aux USA, où elle veut se développer. Sur le même principe, au Luxembourg, (Food for all), lauréate des startup stories de 2019 est l’une des pépites à suivre. Elle participe à la lutte contre le gaspillage alimentaire en proposant aux supermarchés de récupérer les produits proches de la date de péremption pour les placer dans un rayon spécifique, et une application permettant aux consommateurs de connaître l’impact écologique de leur démarche. Un investissement agroalimentaire peut permettre de générer les tout premiers revenus au bout de trois à cinq ans, c’est donc un investissement à long terme. Ce type d’investissement peut également intégrer des portefeuilles à visée environnementale lancés par de grandes entreprises et peut profiter à un segment économique inattendu: celui de la lutte anti-gaspillage alimentaire.


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Le gaspillage alimentaire: un problème de riches

Selon une étude menée par , gérant senior sur la thématique Future of Food au sein d’ODDO BHF Asset Management, il existe deux grandes sources de gaspillage alimentaire. D’abord la perte de nourriture en soi (problèmes sur les chaînes d’approvisionnement et les récoltes) qui est souvent non intentionnelle, ensuite les déchets alimentaires de tendance culturelle, due à une esthétique du produit considéré comme invendable. Selon les chiffres rapportés par Oddo BHF Asset Management, la quantité totale de nourriture gaspillée représenterait 220kg par personne et par an, soit plus de 2.000USD par consommateur américain. Toutes les catégories de produits sont concernées par le gaspillage alimentaire (fruits et légumes, céréales, mais aussi la viande et la volaille).

Si l’on raisonne par pays, ce sont sans surprise les pays les plus peuplés qui gaspillent le plus, comme la Chine, l’Inde, l’Europe et les États-Unis, tandis que l’Afrique subsaharienne et l’Asie du Sud et du Sud-Est figurent tout en bas. Le gaspillage de cette quantité astronomique de nourriture n’est pas qu’un vecteur de sous-alimentation mondial, c’est aussi un problème écologique majeur. Selon les Nations unies, si la perte et le gaspillage alimentaires constituaient un pays, celui-ci serait le troisième émetteur mondial de gaz à effet de serre après la Chine et les États-Unis, représentant 8 à 10% des émissions à l’échelle globale.

Deux indices officiels pour mesurer le gaspillage alimentaire

Les sociétés qui se positionnent dans la lutte contre ce fléau constituent selon Clément Maclou, des opportunités intéressantes d’investissement sur le long terme proposées par des entreprises opérant tout au long de la chaîne de valeur. D’autant qu’elles disposent aujourd’hui de deux indices officiels permettant de mesurer le niveau de gaspillage alimentaire. L’indice de la (Food and Agriculture Organization) baptisé Food Loss Index, ou FLI concerne des pertes alimentaires entre la phase de production et de distribution (cette dernière n’étant toutefois pas prise en compte). Cet indice mesure l’évolution des pertes en pourcentage pour un panier de dix produits principaux par pays, et ce, par rapport à une période de référence. De leur côté, les Nations Unies gèrent un autre indice de gaspillage alimentaire (Food Waste Index, ou FWI), une méthodologie permettant aux pays de mesurer ce gaspillage, aussi bien au niveau des ménages que des services de restauration et du commerce de détail.

Notre panier de sociétés (…) devrait ainsi bénéficier d’une croissance à long terme, offrant visibilité et attractivité à notre stratégie “Future of Food”

Clément Maclou gérant senior ODDO BHF Asset Management

Clément Maclou conseille d’investir dans les sociétés agroalimentaires proactives en matière de gestion des déchets et celles proposant des solutions concrètes pour contribuer à les réduire d’autre part. «Notre panier de sociétés exposées à la problématique du gaspillage alimentaire devrait ainsi bénéficier d’une croissance à long terme, offrant visibilité et attractivité à notre stratégie “Future of Food”», indique-t-il dans sa dernière publication. Dans le viseur: les sociétés ou startups qui renoncent aux conservateurs alimentaires chimiques (, et sa concurrente irlandaise  cotée à la bourse de Londres et de Dublin en font partie) et les sociétés proposant des emballages sains et durables comme le géant allemand  coté au MDAX.

Ces opportunités sont selon lui renforcées par les réglementations qui se durcissent, sans surprise, et donnent aussi un cadre à la problématique. Les Nations Unies ont annoncé leur ambition de diviser par deux le gaspillage alimentaire par habitant d’ici 2030. Le ministère de l’Agriculture américain ainsi que l’Union européenne (UE) ont décidé de s’engager à atteindre ces objectifs.