Un échec. Les économistes qui ont planché sur la question, à la demande de la Commission des affaires économiques et monétaires du Parlement européen, ont remis leur rapport. Et leur constat est sans appel: le processus de contrôle en matière de fraude dans l’affaire Wirecard est un raté.
«Les cinq lignes de défense contre la fraude et la tromperie des entreprises ont échoué: le système de contrôle interne de l’entreprise, son conseil de surveillance, son audit externe, les organes de surveillance de l’information financière et de l’audit, et enfin, et surtout, le superviseur du marché BaFin», soulignent les auteurs du document, qui rappellent que «plusieurs signaux suggérant un comportement frauduleux avaient été émis des années avant sa révélation».
«La BaFin doit renforcer considérablement ses pouvoirs de surveillance et d’exécution afin d’être à la hauteur de son mandat général en matière d’intégrité des marchés et de protection des investisseurs», insiste le rapport. Ne s’arrêtant pas à un simple constat soumis à l’appréciation de la sous-commission parlementaire, les auteurs du document de 47 pages prônent notamment le fait que les dirigeants d’entreprises aient à rendre des comptes, non pas au conseil d’administration, mais au conseil de surveillance.
La BaFin déjà ciblée par le gendarme européen
Plus tôt au mois de novembre, et pour la première fois de son histoire, le gendarme européen des marchés avait lui aussi enquêté sur son homologue allemand. L’Esma s’était, à la demande de la Commission européenne, penchée sur le scandale financier qui secoue l’Allemagne depuis juin dernier. Et l’autorité compétente a relevé certaines «défaillances» de la part de la BaFin, qui auraient pu déboucher sur de possibles «conflits d’intérêts», souligne le rapport.
En effet, l’Esma estime que l’autorité allemande pâtit du «manque d’informations sur les actions détenues par ses employés», et les conclusions de son enquête font état de «rapports très fréquents et détaillés de la BaFin au ministère des Finances allemand, entraînant un risque accru d’influence de la BaFin», via son ministère de tutelle.
Néanmoins, le directeur du service des investisseurs de l’Esma, Evert Van Walsum, a toutefois indiqué en conférence de presse que l’enquête n’avait pas relevé «d’exemples d’intervention» des pouvoirs publics. Pas suffisant pour la BaFin, qui rejette les critiques de l’autorité supranationale.
1,9 milliard d’euros
Pour rappel, le scandale de la fraude comptable avait éclaté en juin 2020, lorsqu’un ancien membre du principal indice boursier allemand, le DAX30 francfortois, avait affirmé que près de 1,9 milliard d’euros inscrit dans les comptes de la pépite allemande n’existait tout bonnement pas.
S’en était suivi, outre un titre qui avait dévissé en bourse, perdant plus de 98% de sa valeur, la mise en détention provisoire, toujours en cours, de l’ancien patron de Wirecard, Markus Braun, et de deux anciens directeurs. De son côté, le gouvernement allemand avait annoncé, début octobre, la mise en place future d’un certain nombre de mesures visant à renforcer la surveillance comptable des entreprises.