Installé au bord de la Moselle luxembourgeoise depuis 1931, le groupe Hein n’en est pas à sa première crise. Willy Hein, oui. L’homme de 37 ans a pris la direction de l’entreprise familiale, pour laquelle il travaille depuis 12 ans, il y a deux ans. Elle emploie 210 salariés dans ses trois sociétés: Sablière Hein, Hein Déchets et Transports Hein. Entouré des camions et du bruit de leurs moteurs, le gérant nous livre sa stratégie pour la suite.
L’arrêt des chantiers a mis en pause une partie de votre activité. Le fait d’être diversifié vous a-t-il aidé à surmonter cette crise?
Willy Hein. – «Oui, la philosophie de diversification a sauvé les meubles, un peu. Cela a toujours été important pour nous. Avec la crise, nous en avons vu les avantages. Les déchets et les transports ont tout de suite été reconnus comme activités essentielles, qui devaient donc être maintenues.
Pendant que la fermeture de la totalité des chantiers a eu un impact important. Les trois sociétés Hein, mais aussi celles dans lesquelles nous tenons des participations, comme Ecotec à Sanem et SESS (Société d’exploitation des sablières de Sentzich) en France, étaient également concernées par ces interdictions. Nos activités se sont retrouvées réduites. Heureusement, nous pouvions faire rouler nos camions pour d’autres secteurs, comme l’industrie.
Le ‘stay at home’ a aussi eu pour conséquence la fermeture temporaire du parc de recyclage Am Haff, qui permet aux habitants des communes de Schengen, Remich, Stadtbredimus, Waldbredimus et Bous d’évacuer leurs déchets.
Le coronavirus nous a lancé des défis économiques, mais aussi humains. Une réorganisation dans les bureaux pour séparer les équipes a été nécessaire. Nous avons dû investir dans des mesures préventives, pour nous protéger pendant les heures de travail, mais aussi dans du matériel informatique, pour proposer le télétravail.
Qu’avez-vous appris de cette crise, en tant qu’administrateur délégué et représentant de la quatrième génération de la famille Hein?
«J’ai l’impression de mieux comprendre Hein, dans ma fonction de gérant, mais aussi de mieux connaître mes collaborateurs.
Aujourd’hui, sommes-nous revenus à la normale?
«Tout a bien redémarré, il n’y a plus d’activités réduites pour l’instant. Certaines ont même rattrapé leur retard.
Il ne faut pas oublier que le monde a changé, le marché doit s’adapter. Les prochains mois et années seront décisifs pour l’économie et pour nous.
Craignez-vous une baisse des commandes?
«Il y a le risque que certains de nos clients tombent en faillite.
Votre chiffre d’affaires s’élevait à 32 millions d’euros en 2019. De combien sera-t-il en 2020?
«Nous aurons une baisse de 10% environ.
Le partage des activités, égal entre Déchets, Sablière et Transports, va-t-il évoluer?
«Le monde des déchets restera toujours dans le futur. Alors que pour la partie Sablière, nous savons que dans les 10 prochaines années, il y aura toujours moins de terrains à exploiter.
Quelle stratégie adoptez-vous pour la suite?
«Elle reste la même, il faut maintenant suivre l’évolution permanente de la situation. Essayer au mieux d’anticiper et de réagir immédiatement.
Nous sortons de plusieurs gros investissements: nous avons refait notre quai fluvial et investi dans une nouvelle installation pour le tri des déchets de Valorlux. De nouveaux investissements seront réalisés dans les prochains mois pour améliorer son fonctionnement.
Nous sommes aussi en train de finir la construction d’un nouvel atelier pour les camions et engins, qui devrait être opérationnel dans les prochaines semaines. Cela nous permettra de réaliser l’entretien et le contrôle technique de notre flotte (75 camions), mais aussi de proposer aux tiers (professionnels) des réparations.
L’ancien bâtiment sera supprimé, nous devrons ensuite investir dans de nouvelles boxes de stockage de matériel, ce qui réduira nos frais de manutention.
Ce sont des millions d’euros d’investissements (le montant précis reste confidentiel, ndlr), que nous n’avons pas arrêtés pendant la crise.
Le coronavirus nous a aussi montré qu’il était important de se préparer à la digitalisation de nos processus et savoir-faire.
Qu’y a-t-il de prévu en ce sens?
«Nous allons investir dans la digitalisation de nos programmes. Tout se fait encore sur papier. Le but serait que les clients puissent commander chez nous directement par internet.
Vous souhaitez également réduire vos émissions de CO2…
«Nous restons sur notre principe de réduction des émissions de CO2, toujours en investissant dans la meilleure technologie disponible. Nos camions sont des ‘Euro 6’, c’est la meilleure norme possible pour nous aujourd’hui.
Il n’y a pas de réelle alternative au diesel pour le moment sur le marché pour les transporteurs… La puissance de l’électrique n’est pas le problème, mais il y a peu de moyens pour charger nos camions lors de voyages à l’international.»