Une nouvelle voie réservée au covoiturage et aux bus a été mise en service sur l’A3, avec une amende d’au moins 74 euros pour les conducteurs seuls qui l’empruntent, et quelques incertitudes quant aux conséquences en cas d’accident. (Photo: MMTP)

Une nouvelle voie réservée au covoiturage et aux bus a été mise en service sur l’A3, avec une amende d’au moins 74 euros pour les conducteurs seuls qui l’empruntent, et quelques incertitudes quant aux conséquences en cas d’accident. (Photo: MMTP)

Réclamée par certains, ignorée par d’autres, la première voie dédiée au covoiturage a ouvert fin mars sur l’A3. L’emprunter en étant seul dans son véhicule coûtera au moins 74 euros.

Une voie de priorisation au covoiturage et aux bus, opérationnelle 24h/24, a été récemment aménagée sur l’A3, sur 2,1 km entre l’aire de Berchem et la Croix de Gasperich. À la fin de cette section, cette voie située à gauche devient une voie de circulation normale. Une autre voie, à droite au niveau de la bande d’arrêt d’urgence, est, elle, réservée aux bus. La vitesse sur ces deux voies spécifiques est limitée à 70 km/h lors des heures de pointe.

Censé fluidifier le trafic et encourager la pratique du covoiturage, le dispositif peut toutefois surprendre, avec finalement non pas une, mais deux voies réservées. Mais aussi parce que, dans d’autres cas — comme à quelques kilomètres du Luxembourg, entre Arlon et Sterpenich — les voies réservées au covoiturage sont le plus souvent situées à droite.

Cette configuration luxembourgeoise a pourtant une logique : éviter les conflits avec les entrées et sorties d’autoroute (qui sont à droite) et garder la voie fluide pour éviter les ralentissements.

Malgré la signalisation mise en place, le fonctionnement ne semblait pas toujours très clair, à en croire certains comportements observés sur cette portion d’autoroute, avec des automobilistes seuls circulant sur cette voie, et des voitures avec deux passagers ou plus sur les voies centrales.

Pourtant, cette voie spéciale fait l’objet de plusieurs signalisations: au sol, mais aussi via des panneaux placés à trois kilomètres et à 600 mètres du début de la voie. De couleur bleue, ces panneaux montrent une voiture accompagnée de la mention «2+».

À noter toutefois que les conducteurs de véhicules en covoiturage ne sont pas obligés d’emprunter cette voie dédiée.

Tolérance zéro

Bien que le dispositif soit encore à ses débuts, le ministère de la Mobilité veut dès à présent faire respecter les règles. Ainsi, un conducteur seul empruntant cette voie «s’expose au minimum à une amende de 74 euros. Il n’y a pas de tolérance appliquée. La voie de covoiturage est réservée aux véhicules occupés par au moins deux personnes et aux bus», nous indique le ministère. Afin de contrôler le bon usage de cette voie, le ministère mentionne deux phases. «Dans une première phase, l’usage de la voie est contrôlé par des patrouilles de police. Dans une deuxième phase, il est envisagé d’installer des équipements de terrain pour contrôler l’usage de la voie et sanctionner les infractions.» Il ne donne toutefois pas plus de précisions sur le type de dispositif envisagé.

Plusieurs moyens, technologiques ou humains, permettent de contrôler le bon usage de la voie. À Lyon ou à Strasbourg, des expérimentations ont été menées via des caméras intelligentes à reconnaissance optique, qui utilisent l’IA pour détecter le nombre d’occupants à bord, mais leur fiabilité varie selon plusieurs éléments, tels que la luminosité ou la teinte des vitres du véhicule. Des caméras thermiques peuvent aussi être utilisées, mais avec des coûts généralement plus élevés et une maturité technologique moins avancée.

Et côté assurance?

Au-delà de l’amende ou de la sanction, se pose aussi la question du sinistre qui surviendrait. Prenons l’exemple d’un conducteur seul qui n’aurait donc pas à circuler sur cette voie et qui causerait un accident. Serait-il couvert par son assurance? «Cela dépend de la police d’assurance», répond le ministère de la Mobilité.

Ce que confirme le Senior Associate de Brucher Thieltgen & Partners, , avocat en droit des assurances et de la responsabilité exerçant au Luxembourg et en Belgique, apporte quant à lui quelques précisions. «Il y a lieu de distinguer deux rapports: d’une part, le lien entre l’assureur et la personne lésée, et d’autre part, celui entre l’assureur et son propre assuré (le conducteur fautif). Dans le premier rapport, la victime sera très certainement indemnisée par l’assureur du conducteur fautif. Dans le second rapport, ledit conducteur n’est pas à l’abri que son assureur refuse d’intervenir pour les dégâts matériels à son propre véhicule» indique-t-il, ajoutant que «tout est fonction du cas d’espèce et du contenu du contrat d’assurance», explique-t-il. 

Toutefois, peu de chance que ce type de comportement soit très clairement et précisément défini dans le contrat, s’agissant d’un cas très spécifique et les assureurs fonctionnent avec des polices relativement standards. 

L’Association des compagnies d’assurance, également sollicitée sur ce sujet ajoute:  «pour ce type d’infraction et en cas d’accident, il n’y a pas d’exclusion de garantie ou de recours contre le conducteur fautif. Le sinistre sera pris en charge par l’assureur pour indemniser la victime de l’accident au titre de l’assurance de responsabilité civile automobile, ainsi éventuellement que les dommages au véhicule fautif si celui-ci est assuré pour les dégâts matériels». Et d’ajouter: «Nous tenons toutefois à rappeler l’importance d’une conduite prudente pour des raisons évidentes de sécurité routière, et également au regard du contrat d’assurance puisqu’un sinistre responsable aura des conséquences sur le degré de bonus/malus du conducteur.»