Au second plan, 25 écrans interactifs réunis pour former un mur de 7 mètres sur deux, qui réunissent toute une série d’informations. Au premier plan, une table interactive, sorte de poste de pilotage. En jouant sur le niveau de couleur de chacun des sept indicateurs, la machine élabore des scénarios, a expliqué Luc Vandenabeele (List). (Photo: Paperjam)

Au second plan, 25 écrans interactifs réunis pour former un mur de 7 mètres sur deux, qui réunissent toute une série d’informations. Au premier plan, une table interactive, sorte de poste de pilotage. En jouant sur le niveau de couleur de chacun des sept indicateurs, la machine élabore des scénarios, a expliqué Luc Vandenabeele (List). (Photo: Paperjam)

Le Luxembourg Institute of Science and Technology a présenté, ce jeudi après-midi à Belvaux, son «tableau de bord transversal Covid-19». Le VisWall, qui intègre toutes sortes de données et en restitue des visualisations et des scénarios, ne tardera pas à devenir l’ami du décideur politique.

«C’est compliqué pour tout le monde mais celui qui doit décider n’a pas un job facile: il doit le faire en fonction des informations dont il dispose à un instant précis.» Le directeur de l’unité Data science & Analytics du Luxembourg Institute of Science and Technology (List) a 24 écrans de 46 pouces – soit 50 millions de pixels – dans le dos et une table interactive devant lui.

Canicule oblige, la climatisation tourne à fond autour de cet outil technologique, au premier étage du bâtiment de Belvaux.

Après l’avoir présenté aux deux ministres de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, (DP), et de l’Économie, (LSAP) lundi, Benoît Otjacques montre en quelques slides l’intérêt de cette technologie peut-être unique en Europe et dont la crise du Covid-19 a dopé le développement.

Il faut que le pays soit face à une crise systémique, explique-t-il, pour que l’outil démontre son potentiel: comment le Covid-19 se développe-t-il? Quels sont les besoins des hôpitaux en chambres ou en respirateurs? Et si je ferme le secteur du bâtiment, quel impact cela va-t-il avoir? Que se passera-t-il si l’économie est placée en sommeil? Comment rouvrir prudemment les vannes de la création de richesse? Il peut y avoir mille questions de ce type auxquelles les chercheurs doivent apporter des éléments de réponse pour que le politique puisse forger sa conviction, établir ses choix et les défendre face à la population et aux médias.

Trois types de flux d’information

Imaginer que le gouvernement n’a pas de plan ou pas de plan pour l’éventualité d’une deuxième vague est une vue de l’esprit simpliste.

Avec «Deborah», pour «Digital E Booth Remote Applications H», le VisWall intègre différents flux d’information: des statistiques d’institutions de recherche (comme le Luxembourg Centre for Systems Biomedicine) ou de parties prenantes du sujet (ici, les hôpitaux par exemple), des modélisations d’autres acteurs (comme le Liser) à partir de données sur les entreprises de Luxinnovation et de données en temps réel, comme les caméras au-dessus des grands axes de circulation, des capteurs dans certains bâtiments ou des données de réseaux sociaux.

Arrivée en décembre, la partie infrastructure – les écrans, les ordinateurs et le centre de données ou les capteurs – a été complétée par des logiciels, développés au List. Deborah est capable de travailler aujourd’hui sur 2.200 scénarios avec son premier modèle de juin, dont une nouvelle version sera présentée au cours de ce mois.

Un outil qui apprend en permanence pour affiner ses propositions

Car les modélisations peuvent être prises en défaut par la réalité et les chercheurs doivent revoir leurs théories, les adapter, les rendre plus réalistes et progresser encore vers une sorte de prédiction ou au moins d’aide à la décision. «Le processus apprend toujours», explique le chercheur avant que son ingénieur en chef, Luc Vandenabeele, ne montre comment les écrans sont séparés en fonction des flux, comment 32 points de touche permettent à une équipe de travailler en même temps sur différents aspects.

Si les chercheurs ne veulent pas s’étendre sur les coûts du projet, financé par le List, le Fonds national de la recherche et des fonds européens, à terme, dopé à l’intelligence artificielle, l’outil «permettra d’élaborer de nouveaux scénarios plus vite, de gagner du temps, et surtout de travailler avec des situations très dynamiques».


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La technologie, qui existe à l’abri des regards dans le centre de formation de la Nasa, Nasa Ames, où l’ex-ministre de l’Économie, Étienne Schneider (LSAP), s’était rendu début 2018, est développée au Luxembourg pour servir le Luxembourg. Non contente de poser les jalons de ce qu’on appelle le «digital twin», elle pourrait être commercialisée à d’autres pays si elle démontre son efficacité.

Mais plus tard. Pour l’instant, les chercheurs continuent d’intégrer de nouvelles sources d’information et de les relier pour en extraire la substantifique moelle.

«D’éventuels partenaires, scientifiques ou industriels, sont les bienvenus», glisse M. Otjacques. À bon entendeur: l’outil d’aide à la décision politique de demain se construit aujourd’hui au Luxembourg.