Présente à nouveau au Festival de Cannes cette année avec deux films en sélection («Corsage», où elle interprète le rôle de Sissi, et «Plus que jamais», où elle partage l’affiche avec Gaspard Ulliel qui joue ici son dernier rôle), Vicky Krieps (38 ans) continue de tracer sa route à l’international dans le monde du cinéma.
Elle qui avait été remarquée en 2017 dans «Phantom Thread» de Paul Thomas Anderson, aux côtés de Daniel Day-Lewis, a depuis tourné sous la direction de M. Night Shyamalan («Old», n°1 au box-office américain), l’homme de «Rain Man» et de «Good Morning, Vietnam» Barry Levinson («The Survivor») ou Mathieu Amalric («Serre-moi fort», qui lui a apporté ) et partagé l’affiche avec des acteurs tels John David Washington («Tenet», «BlacKkKlansman») dans «Beckett», Tim Roth dans «Bergman Island» ou Vincent Lacoste («De nos frères blessés»). Bientôt, on la retrouvera dans le nouveau film réalisé par Viggo Mortensen, comme elle le révèle ci-dessous.
Voici quelques années, vous expliquiez que les blockbusters n’étaient pas vraiment votre tasse de thé. Or, depuis, vous avez tourné dans «Old» de Night Shyamalan et dans la Avez-vous changé d’avis sur le sujet?
Vicky Krieps. – «‘Old’ est produit comme un blockbuster. Mais, au niveau de l’histoire, on est sur quelque chose d’assez fou. J’ai vu cela un peu comme un ‘freak show’. Une œuvre fantastique, presque un film d’horreur, mais avec un côté psychologique très fort. Je n’avais jamais lu un scénario comme celui-là, et cela m’a intriguée. Moi qui évolue souvent dans des drames sociaux et familiaux, j’étais tentée d’explorer une autre facette du cinéma et d’évoluer ainsi dans un univers à des années-lumière de ce que je connaissais.
Je ne sais pas si j’ai la force de porter un blockbuster.
Et pour «Les Trois Mousquetaires» de Martin Bourboulon, dont le premier des deux volets est attendu pour 2023?
«La démarche est un peu la même. ‘Les Trois Mousquetaires’, c’est un grand film populaire, tiré d’un classique de la littérature. Le genre d’aventure grand public à laquelle je n’avais jamais participé. Mais je ne l’ai acceptée que parce que je n’y tenais qu’un rôle secondaire. Une situation qui m’a permis d’observer sans avoir de trop grandes responsabilités. Si on m’avait proposé un rôle principal, j’aurais alors dû incarner ce film, le porter. Et je ne sais pas si j’ai la force de porter un blockbuster. Ce n’est pas dans ma nature…
Ces deux expériences vous ont confortée dans l’idée que les blockbusters, ce n’est pas pour vous?
«C’est une bonne question… Il me semble que cela n’a rien conforté ou, à l’inverse, infirmé. Cela a plutôt renforcé, chez moi, l’idée que la vie vous réserve toujours des surprises. Si j’ai appris quelque chose de l’année qui vient de s’écouler, c’est que des événements que vous n’attendiez pas surviennent toujours. Que ce soit dans votre vie professionnelle ou privée, vous pouvez vous sentir préparé à quelque chose, avoir vos certitudes, etc. Et puis, la vie passe et elle vous emporte ailleurs…
Je ne crois pas aux plans ou même aux ‘timetables’. Qu’il s’agisse de ma vie ou de l’emploi du temps de ma journée.
Vous êtes une actrice avec un pied aux États-Unis, un autre dans les cinémas francophone et germanophone, tout en restant présente dans l’univers cinématographique luxembourgeois. C’est un mélange qui peut surprendre. Vous ne semblez pas avoir de plan de carrière?
«Non, je n’en ai pas. Je ne crois pas aux plans ou même aux ‘timetables’. Qu’il s’agisse de ma vie ou de l’emploi du temps de ma journée. J’essaie de vivre jour après jour, et ce, du mieux que je peux. Et lorsque, de temps en temps, je me retourne sur ce que j’ai vécu, on pourrait parfois croire y déceler un plan et penser que le chemin parcouru a été tracé à l’avance. Or, ce n’est pas le cas. Je n’ai, en réalité, fait que suivre mon cœur.
De plus en plus, vous faites un peu figure d’ambassadrice du cinéma luxembourgeois. Vous réalisez une carrière comme on en voit peu chez nous. Voire, comme on n’en a jamais vu…
«J’essaie de tout prendre avec sourire et humour. J’ai l’impression qu’au Luxembourg, on est reconnaissant envers ce que je réalise. Si je ne me trompe pas à ce niveau-là, si je parviens à apporter du plaisir à mon pays et aux Luxembourgeois, alors, cela me fait plaisir à mon tour. Et ce n’est pas une chose qui me pèse.
Depuis que votre carrière a décollé sur le plan international, qu’est-ce qui a le plus changé dans votre vie?
«Le nombre d’appels sur mon téléphone et d’e-mails dans ma mailbox! D’un coup, beaucoup plus de gens se sont aperçus de mon existence et me sollicitent. Parfois, c’est un peu trop pour moi. Et, dans ces cas-là, je préfère m’isoler, aller en forêt. Et, à ce niveau-là, le Luxembourg est un très bon endroit pour se cacher un peu et être tranquille [rires].
Ce qui a le plus changé? Le nombre d’appels sur mon téléphone et d’e-mails dans ma mailbox! D’un coup, beaucoup plus de gens se sont aperçus de mon existence.
Ces derniers mois, on vous a vue dans de grands médias reconnus comme , Vanity Fair, Variety, Télérama, etc. Quelle réaction cela provoque chez vous?
«Je vous avoue que je n’y pense pas… Je sais que ces articles existent et, évidemment, d’un côté, c’est agréable. Mais je ne lis pas trop ce qu’on écrit sur moi. Je ne me concentre véritablement que sur deux choses: ma famille et mon travail. La base.
Quels sont vos prochains projets?
«Actuellement, je suis en train de tourner une autre coproduction luxembourgeoise consacrée à la poétesse autrichienne Ingeborg Bachmann (baptisé «Bachmann & Frisch», coproduit par Amour Fou, ndlr). Et après, j’enchaînerai avec le nouveau film écrit et réalisé par Viggo Mortensen, un western qui va se tourner au Mexique.
Je veux apporter ma petite pierre afin de permettre au cinéma luxembourgeois de continuer à grandir.
De quoi avez-vous envie aujourd’hui?
«De vacances en famille! [rires]
Et professionnellement parlant?
«De fonder ma société de production au Luxembourg. Je vais le faire, d’ailleurs. Je voudrais soutenir de jeunes talents, surtout féminins. Aider à développer des projets, en amenant ce que j’ai pu apprendre ces dernières années, et peut-être le carnet d’adresses que j’ai réussi à me constituer. Apporter ma petite pierre afin de permettre au cinéma luxembourgeois de continuer à grandir.
Et où en est ce projet?
«C’est très avancé. Je peux même dire qu’il est en train de se mettre en place. Une fois que ce sera fait, je me laisserai un peu de temps, afin de voir par quoi je veux commencer. Cette société va s’appeler Viktoria.»
La première partie de cet entretien est à retrouver .