Vous avez été réélu président pour un second mandat d’un an lors de la dernière assemblée générale de la Chambre française de commerce et d’industrie (CFCI) au Luxembourg. Pouvez-vous rappeler le rôle de la CFCI et vos ambitions pour cette année?
. – «Notre première ambition est de continuer à répondre à l’ensemble des entreprises et aux chefs d’entreprise qui nous contactent régulièrement pour avoir des informations sur la façon dont ils peuvent développer leur activité au Luxembourg, soit à partir d’une entité luxembourgeoise, soit à partir de la France à travers des accords ou même directement à travers leurs activités.
Nous avons aussi un rôle de promotion. Nous comptons aujourd’hui plus de 241 entreprises adhérentes, et notre but est notamment de les informer sur les marchés et de les mettre en relation avec les communautés d’affaires locales et les autorités. Nous avons pour mission de défendre et promouvoir les intérêts de nos adhérents.
Nous avons fixé comme objectif de mettre en place une relation plus étroite avec l’Association Victor Hugo, qui a pour vocation la promotion et le développement de la culture française et francophone au Luxembourg. Nous avons également des relations très étroites avec l’ambassadeur de France, Bruno Perdu, qui est un fervent acteur du développement des relations entre les entreprises françaises et luxembourgeoises.
Les entreprises membres de la CFCI vous font-elles part de difficultés pour se développer au Grand-Duché?
«On ne peut pas parler aujourd’hui de difficultés. Ce qui ressort très souvent, en revanche, c’est un manque d’informations, et c’est pour cela que l’on se veut être le portail pour les entreprises françaises. Nous devons apporter un cahier des charges qui permette à une entreprise qui prend contact avec notre Chambre d’avoir tous les accès et d’aller directement à la source pour ainsi accélérer les démarches administratives.
Tous les salariés ne sont pas satisfaits par le télétravail.
Comment qualifieriez-vous les relations franco-luxembourgeoises?
«Elles sont excellentes, les liens bilatéraux sont forts et historiques , mais ce qu’on peut regretter c’est que l’on n’arrive pas à se mettre d’accord sur une uniformisation des règles, pour le télétravail par exemple. Il faut que les choses changent plutôt à l’échelon européen, parce que le problème qui existe entre la France et le Luxembourg existe aussi entre le Luxembourg et la Belgique, et avec l’Allemagne.
Aujourd’hui, les contraintes sont relativement importantes. Une entreprise qui veut faire du télétravail doit s’armer de patience, étudier toutes les conventions fiscales qui existent, entre les quatre pays, donc ça reste relativement obscur, et même s’il y a une certaine volonté de part et d’autre, rien aujourd’hui n’aboutit.
Il est compliqué aujourd’hui pour les entreprises de faire télétravailler leurs salariés?
«Les problèmes résident surtout au niveau des normes, notamment dans le domaine des banques, de l’assurance, qui sont précises et qui imposent une certaine contrainte. Et même pour les entreprises qui ne font pas partie de ces secteurs. Aujourd’hui, uniquement avec l’élargissement du RGPD qui nous oblige à maîtriser la confidentialité des données personnelles, faire du télétravail demande aussi d’avoir un accès et une sécurité optimaux. Il reste donc des contraintes, qui ne vont pas faciliter le télétravail des frontaliers.
Les difficultés de recrutement sont un vrai sujet.
Y a-t-il également une différence de rythme entre le Luxembourg et la France?
«Il est certain que la volonté est là de part et d’autre, mais cela prend du temps, c’est pour cela qu’il faut une harmonie au niveau européen. Il y a aussi des contraintes par rapport à la sécurité sociale et aux règles européennes. Quand vous avez un travailleur qui fait plus de 25% de son temps de travail dans son pays de résidence, on est obligé aussi d’appliquer les charges sociales du pays de résidence, donc tout cela vient s’ajouter et demande d’avoir un œil très aiguisé sur ce que l’on met dans la politique du télétravail.
Quels retours avez-vous des entreprises qui recourent au télétravail?
«Certaines se rendent compte que leurs salariés en télétravail ne sont pas tant satisfaits que cela d’être en dehors de l’entreprise pendant plusieurs jours par semaine, parce qu’ils n’ont plus accès à l’information comme on peut l’avoir quand on est dans l’entreprise physiquement. Le télétravail va donc prendre du temps à se mettre en place. Il va falloir faire des essais pour trouver le meilleur équilibre et permettre aux frontaliers d’avoir des conditions de travail plus favorables, ce qui n’est pas simple.
Les entreprises françaises au Luxembourg ont-elles des difficultés pour recruter?
«Oui, c’est un vrai sujet pour nous. Parmi nos objectifs, nous souhaitons, par exemple, permettre à nos membres d’accéder à une base de données interne à la CFCI, parce que l’on reçoit régulièrement des demandes de conjoints français qui sont appelés à travailler au Luxembourg, et qui cherchent du travail, donc on va essayer de les mettre en relation avec nos entreprises locales.
Tous les secteurs sont concernés par cette pénurie de salariés, et elle ne touche pas que les postes qualifiés. Le Luxembourg reste, certes, attractif au niveau des salaires, mais les problèmes de mobilité sont importants. Nous nous apercevons que l’on a de plus en plus de remarques de Français qui souhaitent retourner travailler en France, parce que l’impact du transport est devenu beaucoup trop important aujourd’hui, et qu’ils préfèrent gagner un peu moins, mais sans perte de temps dans les transports. Il faudra donc observer l’impact de la gratuité des transports sur ce sujet dès 2020.»