Plus de 100.000 personnes au Luxembourg ouvrent l’application Uber et la referment aussitôt chaque année. À partir de la mi-juin, ces touristes et autres hommes ou femmes d’affaires pourraient y trouver une offre.
«Nous avons commencé Webtaxi en 2012 avec 30 taxis. Nous sommes venus sur le marché avec l’idée d’avoir des prix transparents, savoir le prix de la course avant la course. Aujourd’hui, nous sommes fiers d’avoir une flotte de 203 véhicules mais nous sommes toujours à la recherche de nouvelles opportunités.» Émile Weber junior, septième génération de ceux qui ont fait de Voyages Emile Weber une success-story, a donc pris contact avec Uber. «Nous avions remarqué, quand nous partions en vacances, qu’Uber avait noué des partenariats avec des entreprises de taxi», raconte-t-il depuis le siège de Canach, où même les employés n’ont pas encore été mis au parfum de cette annonce au moment de rencontrer des représentants des médias.
«Nous avons commencé à discuter il y a quelques mois. Assez rapidement, nous nous sommes rendu compte qu’il y avait moyen de faire quelque chose qui serait un win pour tout le monde, pour Webtaxi, pour Uber – pour nous c’est évident, ça nous permet de rentrer sur le marché – mais aussi pour les passagers. Il y a une demande pour les visiteurs internationaux mais aussi pour les chauffeurs», précise le directeur d’Uber, Laurent Slits, présent pour officialiser le partenariat. Cela va «nous permettre de générer plus de courses et donc plus de revenus pour les chauffeurs actifs. C’est l’équation parfaite: nous avons accès directement à de nombreux chauffeurs de qualité qui vont pouvoir être mis en relation avec des passagers.»

C’est en vacances qu’Emile Weber jr a compris qu’Uber nouait des partenariats avec des compagnies de taxi. Et a invité Laurent Slits et le géant américain à trouver un partenariat. (Photo: Marie Russillo/Maison Moderne)
Les chauffeurs respectent toutes les règles
«Pour nos chauffeurs comme pour nos clients, rien ne va changer», enchaîne M. Weber jr. «Nos clients pourront toujours précommander des courses via internet ou via leur téléphone. Nous cherchions à élargir notre base de clients. Cette application est une très bonne application, utilisée dans beaucoup de pays, et est synonyme de sécurité et de qualité. Ce sont nos valeurs.»
Le partenariat permet de sortir du blocage avec les autorités luxembourgeoises puisque les chauffeurs ont tous une licence et donc sont en règle avec toutes les législations (le paiement des cotisations sociales et des pensions, plus l’autorisation de conduire). «Sur notre plateforme, Webtaxi, il y a aujourd’hui 203 licences et 270 chauffeurs de taxi. Une soixantaine sont directement employés auprès de notre groupe et les autres sont adhérents et ont leurs patrons. Ils sont contrôlés par nous pour vérifier qu’ils respectent toutes les réglementations. Ce sont eux qui entreront aussi sur l’application Uber», détaille Émile Weber.
«En somme, ils ont une application de plus qui leur offre des courses», dit M. Slits. «Deuxièmement, on s’assure d’être à 100% conformes aux réglementations locales. C’est vrai que cela facilite grandement notre vie quand une entreprise reconnue peut nous guider.»
«Il y a des groupes de clients très différents: les Luxembourgeois ou ceux qui habitent au Luxembourg et qui utilisent Webtaxi continueront à utiliser Webtaxi. L’idée était de permettre plutôt à des touristes, à des ‘internationaux’ ou des hommes d’affaires qui seraient en visite et qui ne connaîtraient pas Webtaxi de pouvoir ouvrir avec tous les bénéfices qui vont avec et d’avoir accès aux chauffeurs de Webtaxi», explique le directeur d’Uber, ancien avocat chez Cleary Gottlieb Steen & Hamilton, puis consultant auprès du Boston Consulting Group (BCG).
Les tarifs pas encore fixés
Et le prix? «Au Luxembourg, il y a l’aspect densité de la population différente de celles de grandes villes et l’aspect sécurité sociale – et nos chauffeurs gagnent mieux leur vie que dans ces villes. Pour une course de 15 minutes semblable, comme un Luxembourg-Mamer, le chauffeur doit revenir en ville pour avoir sa prochaine course, cela lui coûtera 35 minutes. Le prix de 35 minutes selon la législation luxembourgeoise… À Barcelone, la même course sera suivie d’une autre course deux minutes plus tard et parfois même avant. Si vous comparez cela, les prix luxembourgeois s’expliquent», précise M. Weber.
«À ce stade, en toute transparence, nous n’avons pas encore fixé les prix sur l’application Uber», répond M. Slits. «Quand on réfléchit au bon prix, il y a les différences de ville et de pays. Il y a aussi le passager qui voudrait payer moins cher et un chauffeur qui doit s’y retrouver. Il faut trouver le bon prix pour stimuler assez de demande et que le chauffeur s’y retrouve. Parfois, le chauffeur gagnera plus, parfois moins pour stimuler la demande.»
«Nous n’allons pas nier le fait que le prix est important», dit-il encore. «Si c’est trop cher, il y a moins de personnes qui l’utiliseront. Aujourd’hui, dire que le prix d’Uber est toujours plus bas que le prix du taxi n’est plus tout à fait vrai. À Bruxelles, la réglementation des taxis et des VTC est identique. Il y a aussi la facilité et la sécurité, la promesse de nos applications.»
«Le point commun entre nous deux est que la personne qui monte dans le véhicule connaît le prix de la course!», renchérit M. Weber jr. «Nous avons à peu près 40% du marché. Ça veut dire que des clients ont envie de rouler avec nous, que des chauffeurs ont envie de rouler pour nous. C’est une fierté pour la famille. C’est une fierté pour l’entreprise. C’est aussi une opportunité pour rendre le marché du taxi plus attractif au Luxembourg.»
«Limiter le numerus clausus de chauffeurs est dangereux», poursuit M. Slits. «Quand il y a un nouvel entrant – nous allons amener de la demande –, il est évident que cette demande va vouloir être satisfaite. Elle va vouloir trouver à bon prix et dans de bonnes conditions – sans attendre trop longtemps. Limiter les licences peut faire beaucoup de mal à l’ensemble du secteur parce que si les clients n’ont pas d’offres, ils vont se détourner du taxi.»
«Si notre collaboration met fin aux prix hasardeux parfois pratiqués à l’aéroport parce que des touristes ne connaissent pas les prix au Luxembourg, tout le monde y gagnera, surtout le marché du taxi», conclut M. Weber jr.
Évidemment, le deal prévoit une rétrocession des revenus des courses à Uber, selon des modalités que les deux entreprises ont conservées secrètes.