L’affaire devait se dénouer à la Cité judiciaire entre les ex-époux Pitt-Jolie. Elle s’est finalement terminée dans l’intimité de gens bien avisés: les 50% qu’Angelina Jolie détenait dans le Château de Miraval, et logés dans la société luxembourgeoise Quimicom, sont passés dans les mains de Tenuto del Mondo, filiale de Stoli, elle-même filiale du SPI Group, propriété du tsar de la vodka, Yuri Scheffler.
«Nous sommes fiers d’apporter notre contribution pour aider à maintenir l’intégrité et le degré d’engagement nécessaires. Et c’est véritablement un honneur pour nous d’investir notre temps et notre passion dans ce domaine. Nos efforts sont récompensés à leur juste mesure et transparaissent à la fois dans le château et dans la marque Miraval», a commenté le CEO du SPI Group, Damian McKinney, sans évoquer le montant de la transaction. «Nous sommes ravis d’avoir un poste au côté de Brad Pitt en tant que conservateurs des millésimes extraordinaires du château.»
Au 44 rue de la Vallée, à Luxembourg-ville, entre le quartier général de la BIL et la gare, les sept employés du groupe coulent des jours presque heureux. L’an dernier, SPI Group a dégagé des bénéfices de 365,5 millions d’euros, qui sont venus s’ajouter aux 616 millions d’euros accumulés ces dernières années. Visiblement, le Covid a dopé les ventes de ces quelque 400 marques d’alcools de luxe qu’il abrite de près ou de loin.
La vodka qui reste en travers de la gorge de Poutine
Parmi celles-ci, la célèbre marque de vodka Stolichnaya qui vaut à M. Scheffler, milliardaire résidant en Suisse et propriétaire d’un yacht de 130 mètres de long à 350 millions de dollars, quelques ennuis avec le président russe, Vladimir Poutine. En mars 2010, alors Premier ministre, ce dernier réclame que cette société, rachetée en 2008 à Absolut mais détenue à 48% par la société publique russe Sojuzplodoimport, soit entièrement restituée à l’État russe.
En 2018, les médias russes reprenaient les accusations du pouvoir russe selon lesquelles SPI avait acquis les droits sur la célèbre vodka pour 45 millions de dollars alors qu’ils valaient, selon les sources, de 400 millions de dollars à 1,4 milliard, avec à la clé un bénéfice annuel variant de 500 à 680 millions de dollars.
Cet été, SPI Group ne s’est pas privé de se féliciter de la décision de la justice néerlandaise de lui faire droit dans huit des 13 pays dans lesquels le litige subsiste (Suisse, France, Espagne, Portugal, Danemark, Italie, Norvège et Pologne). «La situation des cinq autres sera réglée en appel», assurait le communiqué de presse du groupe luxembourgeois. Sa vodka star n’a pas la gueule de bois et reste solidement calée entre la cinquième et septième place des vodkas les plus vendues au monde. Toutefois, sept fois moins que Smirnoff et trois fois moins qu’Absolut.
Un Marine et une organisation militaire
Depuis un an, le groupe s’est engagé dans une transformation en profondeur avec une ambition folle à cinq ans: se rapprocher du podium mondial. Les manettes ont été confiées à un spécialiste… du whisky. L’ex-lieutenant-colonel des Marines est l’un des prestigieux «Keepers of the Quaich». Trois mois après son arrivée, il avait déjà recruté Kathryn Walters pour les vodkas, Mike Lloyd pour l’ultra-premium Brands, et Jon Pepper comme directeur général de Tenute Del Mondo, le groupe viticole de Stoli qui a racheté les parts d’Angelina Jolie. À elles trois, les recrues ont travaillé pour les plus prestigieuses marques au monde de cointreau, de rhum, de whisky ou même pour la communication de L’Oréal et de LVMH.
Il y a un deux mois, le groupe a ajouté des directeurs de zone, et il y a un mois une superstar de l’innovation dans le branding des marques de ces produits. En effet, Nik Keane a lui aussi rejoint le groupe.
Et dans une ombre toute relative, le groupe développe aussi depuis le Luxembourg sa deuxième «franchise», Amber, un des principaux producteurs, distributeurs, prestataires de services logistiques et détaillants de boissons, avec plus de 1.400 marques couvrant tout, de la vodka et des vins mousseux haut de gamme aux tequilas mexicaines de spécialité. À sa tête, Jekaterina Stuge a été tour à tour la meilleure femme CEO de Lettonie de l’année 2020, dans le cadre des Global 100 Annual Awards, le prestigieux prix Business Worldwide Global Corporate Excellence Award dans des catégories telles que The Most Innovative CFO – Lettonie et The Strongest Growth Strategy Equipe en Europe. Sa marque, prévient-elle, atteindra le milliard d’euros d’ici cinq ans et le top 10 mondial.
Autant de talents qui ont soif… de résultats, prêts à acheter tous les châteaux de princesses qui ne seraient plus ivres de bonheur.