Trop d’agences égale trop d’agents qui acceptent d’essayer de vendre des biens aux prix désirés par les vendeurs, ce qui tire le marché vers le haut et dope les commissions, aujourd’hui de 3%. Un problème, dit l’Autorité de la concurrence. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne)

Trop d’agences égale trop d’agents qui acceptent d’essayer de vendre des biens aux prix désirés par les vendeurs, ce qui tire le marché vers le haut et dope les commissions, aujourd’hui de 3%. Un problème, dit l’Autorité de la concurrence. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne)

Dans son rôle lorsqu’elle s’auto-saisit d’un sujet, l’Autorité de la concurrence évoque largement la question des agences immobilières et de la rémunération des agents immobiliers dans son rapport sectoriel. Et propose plusieurs pistes pour remédier à ce qu’elle qualifie «d’impact non négligeable sur les prix des logements».

Chaque chapitre de l’étude sectorielle publiée cette semaine par l’Autorité de la concurrence fera grincer des dents. À trois mois des élections et dans un contexte économique très tendu, c’est logique: le secteur craint de payer seul les pots cassés tandis que le gouvernement, en place depuis dix ans, aura attendu le dernier printemps pour mobiliser une task force (le 28 avril) et s’offusquer de certains problèmes déjà identifiés… en 1998.

«Il ressort de l’enquête de l’Autorité que la rémunération de l’agent immobilier, ainsi que son rôle en général, peuvent avoir un impact non négligeable sur les prix des logements au Luxembourg», dit-elle dans son chapitre 7 sur la commercialisation.

Quelle est la situation?

– En 2020, le chiffre d’affaires des 1.293 entreprises (les agences immobilières qui emploient 1.763 personnes) a atteint 573,2 millions d’euros pour un excédent brut d’exploitation de 92 millions d’euros. Soit un EBE de 16%, là où la moyenne nationale dépasse à peine 5%.

– Le Luxembourg est le champion européen des agences immobilières par millier d’habitants. Il compte 1,99 agence pour 1.000 habitants contre 1,13 en Belgique, 0,83 en France ou même 0,35 en Allemagne.

– Avec une commission plafonnée à 3% au-dessus de 12.500 euros, les agents immobiliers ne sont pas très gourmands: les 3% (comme en Belgique) sont sous la moyenne européenne de 3,3% et très loin des 6,5% français – le champion d’Europe – selon les données de la Commission européenne.

– Dans une simulation, l’Autorité de la concurrence estime à 7.000 euros une commission qui serait basée sur un taux horaire de 100 euros pour 70 heures de travail pour récupérer un bien à vendre et aller jusqu’à la clôture de la vente… contre 27.768 euros correspondant aux 3% pour un prix moyen annoncé d’un bien moyen annoncé.

Quel impact cela a-t-il sur les acheteurs?

«La surreprésentation des agences immobilières incite les agents à pratiquer une course à l’enchère, qui consiste pour les agences à proposer des prix de vente toujours plus élevés afin d’obtenir des mandats de vente auprès des propriétaires, quitte, parfois, à proposer un prix déconnecté du marché, ce qui a un impact certain sur le niveau des prix des logements», analyse l’Autorité de la concurrence.

Que préconise l’Autorité de la concurrence?

– L’abrogation du règlement grand-ducal du 20 janvier 1972 qui fixe la commission d’agence à 3% maxima… puisque ce chiffre est majoritairement appliqué, en raison de la concurrence.

–  La revalorisation de la profession de l’agent immobilier, par exemple dans le cadre de la réforme du droit d’établissement, comme le préconise la Chambre immobilière. Une revalorisation en termes de connaissances économiques, juridiques et techniques.

– L’expression en euros et non en pourcentage de la rémunération pour quelle soit plus facilement compréhensible.

– La mise en place d’une tarification horaire, basée sur le nombre d’heures qu’un agent aura passées autour d’une vente.