Il y a 18 mois que le Financial Times disait avoir découvert des irrégularités dans les comptes d’une des fintech européennes les plus emblématiques. (Photo: Shutterstock)

Il y a 18 mois que le Financial Times disait avoir découvert des irrégularités dans les comptes d’une des fintech européennes les plus emblématiques. (Photo: Shutterstock)

La société allemande de paiements électroniques Wirecard a déposé le bilan, ce jeudi matin, après la découverte d’un trou de 1,9 milliard d’euros dans ses comptes. Il y a 18 mois que le feu couvait.

L’ardoise va avoir du mal à passer: ce jeudi matin, Wirecard a annoncé déposer le bilan après avoir découvert un trou de 1,9 milliard d’euros dans ses comptes. La faillite coûterait également 3,5 milliards d’euros à ses créanciers, dont 1,75 milliard empruntés à 15 banques et 500 millions d’euros auprès d’investisseurs obligataires.

En janvier 2019, le Financial Times sonnait l’alerte, déclenchant la colère du régulateur allemand, qui accusait le journal financier de référence de collusion avec des vendeurs à perte. L’idée est simple à comprendre: des vendeurs à perte empruntent des actions pour les revendre aussitôt en pariant sur une chute du cours, qui leur permettra à la fois de racheter la même action, de la rendre à son propriétaire en le payant pour son prêt et de dégager un bénéfice plus ou moins substantiel.

À ce premier problème sur l’attitude du régulateur s’ajoute un autre problème. Après près d’une année de troubles, Wirecard a tenté de rassurer les observateurs en demandant à KPMG un audit indépendant. En avril, le Big Four a rendu son audit, soulignant qu’il n’avait pas pu avoir accès à tous les documents. L’alerte que KPMG a donnée n’a pas été assez tranchée, disent des experts… mais elle a suffi pour que EY, l’auditeur officiel de Wirecard, refuse de certifier les comptes, après les avoir certifiés les années précédentes.

1,9 milliard d’euros disparus

Enfin, on ignore où sont passés les 1,9 milliard d’euros disparus, ni même ce que ce trou cache exactement dans la gestion de la société cotée au Dax, en Allemagne. Deux banques philippines, pointées du doigt, ont affirmé ne rien avoir à faire avec Wirecard. Même la Banque centrale philippine a dit avoir étudié tous les mouvements de fonds et n’avoir rien détecté du tout.

Le trou de 1,9 milliard d'euros, indique Reuters, représente un quart du bilan de cette «fintech» munichoise, fondée en 1999, et dont la chute survient moins de deux ans après son admission dans le prestigieux indice Dax de la Bourse de Francfort, au sein duquel elle avait remplacé la Commerzbank en septembre 2018. Vingt ans après sa création, l’entreprise, concurrente de sociétés comme Ingenico ou PayPal, emploie quelque 5.800 salariés dans 26 pays.

Le scandale a conduit à la démission de Markus Braun, président du directoire de l’entreprise depuis 2002, soupçonné par la justice allemande d’avoir gonflé le bilan du groupe afin de le rendre plus attractif aux yeux des investisseurs et des clients. Il a été remis en liberté conditionnelle contre une caution de 5 millions d’euros.

La filiale luxembourgeoise menacée

Jan Marsalek, ancien directeur général adjoint, est lui aussi soupçonné. Il serait aux Philippines.

Dans un communiqué, Wirecard explique avoir entamé cette procédure de dépôt de bilan devant un tribunal de Munich, «en raison d’une insolvabilité imminente et d’un surendettement». La société ajoute étudier l’opportunité de lancer des procédures similaires pour ses filiales, dont sa filiale au Luxembourg, créée le 14 novembre 2018. Depuis mars, le directeur des partenariats digitaux, Jakob F. Kleinsasser, en était devenu le manager général, en tandem avec Andrea Noormann, qui dirigeait la stratégie globale depuis 2018 à Munich.