Les syndicats avaient prévenu: pas question que les trois plus gros employeurs de l’aéroport concoctent chacun leur plan dans leur coin sur le dos des salariés et dans le dos des autorités. Les trois CEO (pour Lux-Airport), (pour LuxairGroup) et (pour Cargolux), sont chacun venus avec deux ou trois chiffres-clés au premier rendez-vous de la tripartite «aviation», organisée par le ministre de la Mobilité, , mardi matin.
Même si les deux syndicats, OGBL et LCGB, disent leur unité, le premier étant majoritaire à Lux-Airport et le second dans les deux autres sociétés, le syndicat chrétien-social avait organisé une brève manifestation, à l’heure du rendez-vous, histoire de rappeler que les salariés sont inquiets.
Le début de l’année a été catastrophique. Cargolux a réalisé une bonne année 2019, mais janvier et février ont reflété une conjoncture moins favorable… jusqu’à ce que le Covid-19 ne dope l’activité, la compagnie aérienne de fret ayant joué un rôle-clé dans la livraison de l’hôpital militaire de campagne de l’Otan, installé près du centre hospitalier, et dans celle des masques et autres produits nécessaires à faire face à la pandémie.
Même chose pour Luxair et LuxairTours: la compagnie aérienne avait transporté 163.000 personnes lors des deux premiers mois (contre 183.000 un an plus tôt), tandis que le tour-opérateur s’en sortait nettement mieux (51.531 passagers, contre 40.966 passagers en 2019) avant que les avions ne restent cloués au sol, puis soient victimes de la méfiance des consommateurs.
La partie fret a limité la casse, comme Cargolux, avec 426.000 tonnes transportées, contre 433.000 tonnes l’année précédente.
Un secteur stratégique sous la surveillance de Bruxelles
Et, fatalement, quand le nombre de passagers diminue de 64% depuis le début de l’année, la situation est compliquée pour Lux-Airport, qui tire une grande partie de ses recettes des taxes aéroportuaires. «Heureusement que nous avons des rentrées de notre secteur immobilier», nuançait M. Steinhaus.
Dans la même salle du centre de conférences, où l’ex-ministre de l’Économie, Étienne Schneider (LSAP), vantait les charmes du satellite et ceux du Luxembourg, le ministre reconnaît au secteur une dimension stratégique, clairement mise en évidence pendant la crise. «Heureusement que nous avions la logistique», insiste-t-il. «Imaginez une seconde sans l’aéroport…»
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Seulement, le vice-Premier ministre n’est pas libre. Bruxelles a certes relâché la pression sur les États membres, mais cela ne durera pas éternellement, et il lui faudra aller «vendre» à la Commission européenne son plan de soutien à ce secteur sensible. «Il nous faut évidemment parler de la sortie de la crise, mais aussi avoir une vision à moyen et à long terme, avec un objectif: maintenir les emplois et veiller à la qualité et à la sécurité des services qui sont proposés au Findel.»
Les trois entreprises et les deux syndicats ont donc trois mois pour faire leurs cahiers de vacances, et le rendez-vous est déjà fixé, le 17 septembre à 9 heures, pour tenter de réunir tous les points de vue.
La réfection de la piste aura bien lieu en 2021
Secrétaire centrale pour les services et l’énergie à l’OGBL, Michelle Cloos a salué l’initiative et «fustigé» le libéralisme de la Commission européenne, appelant à un plan de sauvegarde européen du secteur, où les annonces de plans sociaux s’enchaînent avec des dizaines de milliers de licenciements. «Il ne s’agit pas seulement d’éviter des licenciements», confie-t-elle, en marge de la réunion. «Il faut aussi remettre tout le monde au travail. Les dispositifs de chômage partiel ne doivent pas se prolonger trop longtemps. C’est important de revenir au travail.»
S’il salue lui aussi l’initiative, le président du LCGB, , abonde dans ce sens. «Le chômage partiel ne s’accompagne pas seulement d’une perte de revenus. Mais aussi d’une insécurité grandissante. Aucune tripartite n’est facile!», a-t-il dit, avant de rappeler que des instruments avaient émergé des plans de licenciement massifs dans la sidérurgie.
Une seule chose est certaine: le ministre a insisté pour que la réfection de la piste ait bien lieu, et dès l’année prochaine, comme prévu. «Nous sommes obligés: elle faisait partie de la certification de l’aéroport!»
Un chantier qui doit durer quatre ans, dont deux pour la seule piste, et qui va nécessiter un investissement de 265 millions d’euros. Son impact sur les autres acteurs-clés sera aussi important. Assez important pour que tout le monde aligne ses objectifs et ses plans.