La sculpture au-dessus de l’entrée voit Victoria couronner Mercure, le dieu du gain financier et du commerce. (Photo: Maison Moderne/archives)

La sculpture au-dessus de l’entrée voit Victoria couronner Mercure, le dieu du gain financier et du commerce. (Photo: Maison Moderne/archives)

Autrefois monument de la florissante industrie sidérurgique luxembourgeoise, le 19 avenue de la Liberté accueille désormais les clients de la Spuerkeess. Un édifice qui symbolise l’histoire du développement de l’économie du pays.

Le site de ce que l’on appelle communément le bâtiment Arbed – du nom de la société sidérurgique qui l’a construit, devenue ensuite Arcelor, puis ArcelorMittal – aurait pu abriter un musée national ou des bâtiments judiciaires, selon les premiers plans du terrain. Mais en 1919, l’État le vendit à l’Arbed.

L’entreprise sidérurgique a profité pleinement du boom du début des années 1900. La production du pays est passée d’environ 145.000 tonnes d’acier en 1900 à plus de 1,1 million de tonnes en 1913. Les aciéries de Burbach, Eich et Dudelange ont donc fusionné pour former l’Arbed en 1911.

Les années d’après-guerre ont vu l’Arbed s’étendre en Belgique et en Allemagne, et la société a mis son succès en avant avec un siège digne de ce nom sur l’une des principales artères de la capitale, situé juste entre la gare centrale et la Spuerkeess sur la place de Metz. Ces deux bâtiments ont ouvert leurs portes en 1913, 10 ans après que le pont Adolphe a relié les deux plateaux de la capitale.

Avec plus de 15.000m² de surface, le bâtiment comportait, lors de son inauguration, non seulement des bureaux, mais aussi des fumoirs, un restaurant, une bibliothèque, une salle de sport et un jeu de quilles.

Inspiré par les châteaux des 17e et 18e siècles, l’architecte français René Théry en a conçu la grande structure. Mais si son style rappelle le passé, son entrée principale rend hommage à l’industrie et à la science.

Mercure, dieu du commerce, est couronné par Victoria, déesse romaine de la victoire, dans une sculpture au-dessus des portes principales. Des chérubins portant des globes symbolisent la portée de l’entreprise, des rouages ​​et des pièces de monnaie se trouvent à leurs pieds.

Il a fallu environ 18 mois à la Spuerkeess pour rénover le bâtiment, avant une grande réouverture en juillet 2016. Mais l’avenir du bâtiment était tout sauf certain avant que la banque ne l’achète en 2014.

ArcelorMittal a en effet quitté ce siège historique en 2013, en raison du coût élevé de l’entretien du bâtiment. Les syndicats ont qualifié la décision de «sans âme» et accusé les propriétaires indiens d’ArcelorMittal de manquer de respect envers l’héritage de leur entreprise.

Le Premier ministre (DP) avait déclaré que le gouvernement n’achèterait pas le bâtiment suite aux appels des députés à transformer le site en un lieu culturel, comme une bibliothèque ou un musée. Des rumeurs circulaient sur les plans d’un hôtel ou d’un espace à usage mixte avec des bureaux, des restaurants et des boutiques.

Bien qu’il ait décidé de ne pas acheter le bâtiment, le gouvernement l’a classé monument national, limitant les options de rénovation pour les acheteurs potentiels. Mais la polémique appartient depuis longtemps au passé, puisque la Spuerkeess a déménagé une partie de son marketing, de sa banque privée et de la gestion de ses agences sur le site, désormais appelé «19 Liberté». Tout comme l’économie luxembourgeoise est passée de l’acier à la finance, ce bâtiment emblématique a donc connu une vraie transition.

Le statut de monument national s’accompagne d’obligations de conservation. Tout, du vernis utilisé sur les portes en chêne massif aux poignées en laiton, en passant par les extincteurs et l’éclairage, doit être en harmonie avec l’architecture et le design intérieur du bâtiment. Un aspect monumental de la rénovation a été le nouveau revêtement de la toiture en ardoise, qui couvre plus de 4.300m².

Des centaines de mètres de câbles ont aussi dû être installés pour mettre en place une infrastructure informatique moderne sans laisser de traces visibles. Salles de bains, ascenseurs, espaces de cuisine – des améliorations étaient nécessaires tout autour. Un nouveau luminaire éclaire également les couloirs en pierre par ailleurs un peu sombres, et le mobilier contemporain ajoute une touche moderne au cadre historique.

«Un joyau du patrimoine industriel et architectural luxembourgeois est passé de l’hibernation au renouveau», a déclaré la PDG , lors de la réouverture en 2016.

Cet article a été écrit pour , traduit et édité pour Paperjam.