Le projet de loi relatif aux heures d’ouverture dans le secteur du commerce et de l’artisanat sera présenté par le ministre Delles (DP) aux députés ce jeudi 16 janvier. (Photo: Shutterstock)

Le projet de loi relatif aux heures d’ouverture dans le secteur du commerce et de l’artisanat sera présenté par le ministre Delles (DP) aux députés ce jeudi 16 janvier. (Photo: Shutterstock)

Le projet de loi réglementant les heures d’ouverture dans le secteur du commerce et de l’artisanat fera l’objet d’une présentation à la Chambre des députés par le ministre de l’Économie, Lex Delles (DP). De quoi clarifier la situation qui repose aujourd’hui sur de nombreuses exceptions et dérogations. Un autre projet de loi est aussi en commission et concerne quant à lui les dispositions du travail du dimanche. 

Quand la dérogation devient la règle, faut-il légiférer? Oui, estime le gouvernement. Le projet de loi 8472 relatif aux heures d’ouverture dans le secteur du commerce et de l’artisanat sera présenté par le ministre de l’Économie (DP) aux députés ce jeudi 16 janvier. Alors que depuis 2018, le ministère de l’Économie a accordé des dérogations à de nombreuses reprises et qu’en moyenne, 35 communes demandent aussi une dérogation chaque année, le projet de loi a pour vocation à remettre à plat le système et doit aussi répondre aux conclusions d’un arrêt de la Cour constitutionnelle qui considérait comme discriminatoire, le régime instauré jusqu’alors en raison d’une inégalité de traitement en ce qui concerne la vente de certains produits. Un exemple parlant est celui de la vente de pain: un boulanger-pâtissier n’était jusqu’alors pas autorisé à ouvrir pour vendre son produit phare alors même qu’une station-service le pouvait (car elle ne relève pas du champ d’application de la loi). 

Ainsi, en 2024, «la jurisprudence de la Cour concernait au total 332 points d’intérêts, représentant une surface commerciale de 10.045 m2», est-il rappelé dans l’exposé des motifs du projet de loi. Concernant les magasins de détail dans le secteur du commerce, pour les années 2022, 2023 et 2024, 80,65% ont été autorisés à ouvrir le dimanche en vertu de cette dérogation, représentant ainsi 82,50% de la surface commerciale totale du pays. Ce qui illustre bien la situation actuelle, avec un cadre légal caractérisé par ses dérogations. 

Selon le projet de loi, s’il est adopté sans amendements, les heures d’ouverture des magasins seraient les suivantes: de 5h à 22h du lundi au vendredi; de 5h à 19h les samedis, les dimanches, les jours fériés légaux ainsi que les veilles de jours fériés légaux et de 5h à 18h les 22 juin, 24 décembre et 31 décembre. Les entreprises qui voudraient ouvrir plus longtemps que ce qui figure dans le projet de loi devront le faire figurer dans une convention collective. 

Aujourd’hui, pour bénéficier d’une dérogation, certains critères sont à remplir. D’abord, «il doit d’agir d’une demande collective d’une organisation professionnelle représentative des commerçants et/ou artisans ou de l’administration communale. La demande doit être adressée un mois avant la date de l’ouverture en question», nous a précisé le ministère de l’Économie que nous avons interrogé. 

Un projet de loi est à ne pas confondre avec celui du travail du dimanche bien qu’il semble lié: celui déposé par le ministre du Travail Georges Mischo (CSV) et qui vise à modifier les dispositions du travail du dimanche. Il prévoit que le travail du dimanche soit limité à huit heures dans le secteur du commerce de détail, contre quatre heures à ce jour.

La société a changé 

Lorsque le ministre du Travail, Georges Mischo (CSV), a fait part de sa décision sur le sujet en fin d’année 2024, les syndicats, notamment l’OGBL et le LCGB, avaient perçu cette «libéralisation du travail du dimanche» comme «une attaque contre le dialogue social». En cause, le manque de concertation du ministre avec les partenaires sociaux qui se sont sentis «mis devant le fait accompli». En fin d’année, dans un communiqué, l’OGBL disait craindre un «affaiblissement des conventions collectives». 

La Chambre des salariés, aussi, s’est dit «navrée de la décision unilatérale de libéraliser le travail dominical dans le secteur du commerce de détail dont les salariés comptent déjà parmi les plus vulnérables sur le marché du travail». Elle pointe ainsi une potentielle atteinte de l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée. 

et notamment des commerces, le patron des Librairies Ernster et président de la Chambre de commerce nous avait livré son opinion sur le sujet. Selon lui, le débat se situe bien au niveau de la flexibilité. Une flexibilité qui «aide à jongler entre les contraintes. Nous devons être conscients que les commerces sont soumis à une concurrence digitale 24h/24 et 7 j/7. En plus de donner envie aux clients de venir, il faut leur donner l’occasion de le faire quand ils le peuvent. Il serait temps de se demander ce que l’on peut faire pour donner l’occasion au commerce physique de faire face.»

Au départ, l’absence traditionnelle de travail le dimanche dans le pays repose sur des racines à la fois culturelles mais aussi religieuses. Un héritage des valeurs chrétiennes et du rôle important qu’ont joué les chrétiens-sociaux dans la politique du pays qui militaient à l’époque pour l’idée selon laquelle le dimanche devait rester un jour de repos. Mais la transformation des sociétés, et surtout des modes de consommation, redistribue les cartes.