Instaurée depuis le 1er mars 2020, la gratuité des transports en commun au Luxembourg fait la joie des citoyens. Une gratuité dont le coût a été chiffré, par l’État, à 41 millions d’euros par année. Un chiffre qui correspond à la perte des recettes tarifaires annuelles enregistrée depuis sa mise en place et aucunement à un éventuel coût de fonctionnement (qui est bien plus élevé) des transports en commun.
Avec l’envolée des prix de l’énergie et des carburants vue ces derniers mois, ce coût de fonctionnement va augmenter en 2022. Une augmentation que l’État devra donc en bonne partie compenser.
Ainsi, au niveau des RGTR, le plus grand réseau de bus au Luxembourg (environ 1.200 véhicules), à la mi-juin, on évaluait «la hausse générée par l’augmentation des prix de l’énergie en 2022 à 5% du coût d’exploitation», selon Alex Kies, le directeur de l’Administration des transports publics. Ces 5% ne représentant l’impact que sur la première moitié de cette année.
Pour donner une idée de l’ordre de grandeur, on peut noter que le coût d’exploitation des RGTR se situait, en 2021, à plus ou moins 280 millions d’euros. On pourrait donc aboutir en fin d’année avec une facture se chiffrant en dizaines de millions d’euros supplémentaires par rapport à ce qui a été budgétisé…
Le contrat des CFL arrive à échéance
Si les bus RGTR roulent encore majoritairement aux carburants (10 à 12% du parc est électrique, l’objectif étant de 50% à l’horizon 2025), le tram et le train fonctionnent, eux, à l’électricité. Un autre marché qui est monté en flèche ces derniers mois.
Enovos, le fournisseur principal d’électricité et de gaz au Luxembourg, ayant dénoncé le contrat (à taux fixe) qui les liait, Luxtram, la société anonyme qui gère le tramway, s’est vue obligée d’en parapher un autre à des conditions moins avantageuses pour elle. Du coup, si l’électricité «était estimée à 8% du coût d’exploitation en 2021, elle devrait se situer à 25% à la fin de cette année, selon nos estimations», explique André Von der Marck, le directeur général de Luxtram. Un pourcentage à mettre en perspective avec un budget bien moindre que celui des RGTR (il dépassera cette année, pour la première fois, la barre des 12 millions d’euros). Mais, si des économies n’ont pas été générées ailleurs, les actionnaires (à savoir l’État et la Ville de Luxembourg) devront compenser cette hausse.
Concernant les CFL (détenus à 94% par l’État), la bonne nouvelle est que la société nationale des chemins de fer luxembourgeois ne ressent pas, pour le moment, d’impact lié à la hausse du prix de l’électricité vue ces derniers mois. En 2022, elle est, en effet, toujours couverte par une convention pluriannuelle signée avec Enovos.
La mauvaise nouvelle, par contre, c’est que ce contrat arrive à échéance en fin d’année et qu’il va donc falloir reconsulter le marché (ce sera aussi le cas pour Luxtram). Et si le nouvel appel d’offres se prépare, il ne débouchera certainement plus sur les mêmes conditions que la précédente convention. Il se chuchote ainsi que, sans grand changement d’orientation dans les prochains mois sur le marché de l’électricité, le prix d’achat pourrait se voir multiplié jusque par trois. De quoi fameusement chambouler les choses, donc…
L’énergie joue aussi sur la masse salariale
À l’heure où le budget de l’État pour l’année 2023 se négocie en coulisses et où le ministère de la Mobilité et des Travaux publics a besoin de moyens pour mettre en œuvre les nombreuses mesures préconisées par , ces augmentations du prix de l’énergie et les coûts supplémentaires qu’elles engendrent au niveau des transports en commun ne sont pas anecdotiques.
Qui plus est que celles-ci ont également un impact indirect sur les salaires des nombreux employés des transports publics, tirant à la hausse l’indexation de ces mêmes salaires. Or, dans ce secteur, la masse salariale représente généralement entre 50 et 60% des coûts d’exploitation. À titre d’exemple, on peut ainsi noter que, pour les RGTR, chaque indexation supplémentaire correspond à une augmentation de sa masse salariale d’une valeur plus ou moins égale à 1% de ses coûts d’exploitation annuels. Soit une somme évaluée à environ 3 millions d’euros…