Fin septembre 2018, Pier Andrea Chevallard (Infocert) et Étienne Schneider annonçaient un mariage de raison pour donner naissance à un champion paneuropéen. Deux ans plus tard, les Italiens ont abandonné la mariée. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

Fin septembre 2018, Pier Andrea Chevallard (Infocert) et Étienne Schneider annonçaient un mariage de raison pour donner naissance à un champion paneuropéen. Deux ans plus tard, les Italiens ont abandonné la mariée. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

La lune de miel annoncée par l’ex-ministre de l’Économie, Étienne Schneider, fin septembre 2018, n’aura pas duré. Moins de deux ans après leur union, les Italiens de Tinexta ont abandonné la mariée, Luxtrust, à Post. 

(Article mis à jour avec la réponse de Post lundi à 14h18)

L, ,  contenait une information encore jamais rendue publique: Post a repris les 50% des parts des Italiens de Tinexta dans Luxtrust le 10 février, deux mois après la démission de , et un mois après la démission de tous les administrateurs italiens du groupe Tecnoinvestimenti (Infocert-Tinexta) du conseil d’administration. Le même jour, Post annonçait le report de la présentation de ses résultats annuels. «Mais il n’y a aucun lien entre les deux», indique le service communication de Post à Paperjam. «Ce sont d’autres raisons qui ont conduit au report de quelques jours de notre présentation. Le rapport des résultats annuels évoquera évidemment la reprise des parts de Tinexta, tandis que les journalistes auront le loisir de poser leurs questions.» 

Ce qui ne manquera pas d’être le cas puisque plusieurs interrogations demeurent. Par exemple, est-ce que les Italiens auraient moyennement apprécié les 4 millions d’euros de dividende exfiltrés des comptes de Luxtrust, au profit de l’autre titulaire des 50% des parts dans Luxtrust, Luxtrust Development (la réunion de l’État, des banques luxembourgeoises, de Post, de la Chambre de commerce, de la Bourse, de la SNCH et de la SNCA), une semaine avant l’annonce de l’arrivée dans le capital de Tinexta pour former «le champion européen des services de confiance»? Quatre millions, ce n’est pas rien, puisque la société luxembourgeoise est redevenue déficitaire cette année-là (de 366.000 euros), après cinq années de bénéfices (de 4,87 millions d’euros au total entre 2013 et 2017).

Divergences d’objectifs stratégiques

Ce n’est pas la raison que les Italiens invoquent. Car, coté, le groupe italien expliquait, dans le communiqué sur les résultats des trois premiers trimestres de 2020, qu’il a publié le 11 décembre, avoir mis fin à son mariage avec les Luxembourgeois, au profit d’une union libre. La dissolution de la joint-venture au profit d’une solide alliance commerciale.

«Les actionnaires Infocert et Luxtrust Development ont constaté une divergence d’objectifs stratégiques», dit le communiqué officiel. En effet, l’actionnaire Luxtrust Development estime qu’il est prioritaire, dans les années à venir, de concentrer l’attention de Luxtrust sur ses marchés-clés pour assurer un fort développement de l’économie numérique.

Luxtrust – comme le fait justement remarquer Post – avait aussi publié . Sans aller jusqu’à évoquer le nouvel actionnaire. LuxTrust renvoie vers le même communiqué, seulement disponible dans une des quatre langues, l’anglais, et jamais envoyé aux journalistes.

Deux ans plus tôt, pour le ministre de l’Économie d’alors,  (LSAP), l’objectif semblait pourtant parfaitement aligné: «Ce partenariat gagnant-gagnant est une autre pierre angulaire du développement international de Luxtrust, en permettant à l’activité de l’entreprise et aux compétences de ses employés de se développer et de se développer dans le commerce transfrontalier. Ainsi, le partenariat rehaussera le profil du Luxembourg en tant que centre de confiance en Europe et contribuera à positionner davantage le Grand-Duché comme un lieu idéal pour le développement et l’internationalisation des entreprises des TIC, ainsi que pour l’innovation», disait le ministre, au cours de la conférence de presse.

La revente des parts se fait . Dans leur rapport annuel publié en mars dernier, les Italiens assuraient pourtant avoir revendu leur part pour leurs 12 millions d’euros de départ et avoir réalisé une plus-value de 2 millions d’euros à cette occasion. Soit 2 millions d’euros de différence.

Les 50% italiens ont été repris par Post, qui y aura donc consacré un tiers de son bénéfice annuel de 2019. L’opérateur historique devient de fait l’actionnaire majoritaire, avec 56,99% des parts. Faute de réponse d’aucun acteur luxembourgeois, il n’est pas difficile d’imaginer que, dans les actionnaires de Luxtrust Development, Post a dû aller «contrainte et forcée», seule entité qui pouvait se substituer à l’entreprise italienne.

La coquille vide – pardon, la soparfi – Luxtrust Development aura tout juste permis à ses administrateurs de toucher une prime annuelle de 6.000 euros par administrateur et 800 euros brut de jeton de présence (1.600 pour le président du CA, Christian Schuller, un des conseillers juridiques du ministre de l’Économie), soit 142.700 euros à payer cette année.