La théorie du complot a connu de beaux jours dernièrement et a même fait l’objet de notre actualité pendant la pandémie de Covid-19. Pourtant, ce phénomène est loin d’être récent. Il s’agit même d’un phénomène récurrent à travers les âges. L’exposition «Gleff dat net…!» examine les origines de ce phénomène, le fonctionnement et la propagation de ces théories dans une perspective historique.
Des sorcières du Moyen Âge jusqu’au Covid-19
Cette exposition a été présentée pour la première fois en 2019 en Allemagne par la Stiftung Kloster Dalheim et devait être inaugurée en 2020 au Lëtzebuerg City Museum. Mais la pandémie en a décidé autrement et l’exposition a dû être reportée en 2021. Un contretemps que le musée a su mettre à profit en enrichissant le propos d’exemples tirés de l’actualité récente avec les complots liés au Covid-19.
Pour autant, l’exposition ne traite pas que de théories du complot récentes. Ces théories sont en fait un phénomène récurrent dans l’histoire et remontent même jusqu’au Moyen Âge. C’est la foi chrétienne qui a façonné la pensée conspirationniste en qualifiant les juifs ou les sorcières d’alliés du diable et voulant nuire au christianisme. Puis, au 18e siècle, des sociétés secrètes, comme les francs-maçons ou les Illuminati, ont été accusées d’être à l’origine de bouleversements politiques ou sociaux. Plus près de nous, des conspirations ont été élaborées autour des juifs ou encore de la «Peur rouge», propagée par le sénateur américain McCarthy et qui visait les communistes. Avec l’émergence d’internet et l’importance grandissante des réseaux sociaux, les théories du complot ont trouvé un terrain plus fertile que jamais pour se développer. C’est ainsi qu’une abondance d’insinuations conspiratrices s’est propagée à partir de la fin du 20e siècle et en ce début de 21e siècle: l’alunissage ne serait qu’une mise en scène, certains codes-barres de nos emballages pourraient être dangereux ou encore certains vaccins que l’on nous injecte n’auraient que comme objectif de nous empoisonner.
Une section consacrée au Luxembourg
Vers la fin du parcours, une section entière est consacrée aux théories du complot au Luxembourg. Car oui, le Luxembourg n’échappe pas à ce phénomène: au 18e siècle, la «conspiration des poudres» est née de la crainte d’une attaque française, dont l’armée viendrait voler les poudres à canon pour perpétrer un attentat contre la forteresse. Au début du 20e siècle, la mort soudaine du politicien Paul Eyschen suscite des rumeurs sur un prétendu suicide. Plus près de nous, les accusations portées dans l’affaire Clearstream n’ont jamais pu être prouvées, ou encore cette incroyable «conspiration luxembourgeoise», portée par le professeur belge de philosophie Matthieu Peltier, qui remet en cause l’existence même du Grand-Duché.
Ce qu’il est intéressant de souligner est que l’exposition ne se déroule pas en suivant un fil chronologique, mais de manière thématique. Ceci permet de garder en éveil la curiosité du visiteur et de se laisser un peu surprendre par la prochaine théorie du complot.
On y découvre de nombreux objets, comme des livres, des documents papier, des œuvres, des photos, des affiches, des objets de propagande… Des vidéos et des textes muraux amènent aussi un peu plus de contexte. Une exposition qui est en tout cas bienvenue actuellement pour interroger pleinement cette importante question sociétale et qui aide à mieux distinguer la réalité et la fiction dans notre monde contemporain complexe. C’est aussi pour cela que le musée a mis en place un important dispositif pédagogique pour sensibiliser les jeunes à cette thématique et leur apprendre à avoir des repères pour ne pas se laisser manipuler, notamment sur internet et les réseaux sociaux.
«Gleff dat net…!», jusqu’au 16 janvier 2022 au , 38, rue du Marché-aux-Herbes à Luxembourg.