Marianne Reimann a dû se résoudre à écouter les signaux que lui envoyait son corps. (Photo: Andrés Lejona / Maison Moderne)

Marianne Reimann a dû se résoudre à écouter les signaux que lui envoyait son corps. (Photo: Andrés Lejona / Maison Moderne)

Après avoir subi d’im­por­tants trauma­tismes dans sa vie professionnelle, Marianne Reimann a parcouru un long chemin pour retrouver sa force et son dynamisme.

«Cela prend du temps. Il ne faut pas perdre espoir, car c’est un long processus, et le temps est votre meilleur allié», prévient Marianne Reimann, ancienne chef de service en ressources humaines. «On pense que, parce qu’on travaille dans les ressources humaines, on est outillé pour faire face aux conflits, aux mensonges persistants, au stress, à la surcharge de travail et à la pression professionnelle. Or, c’est totalement faux!», explique celle qui a subi une forme de violence mentale qui l’a mise à terre. Économiste de formation, son objectif était de rendre son entreprise plus performante grâce à de bons recrutements, l’amélioration des processus et d’atteindre des key performance indicators. Très impliquée dans son travail, elle n’a jamais compté ses heures et a fait partie de ces salariés high performers. Pourtant, au fond d’elle, elle sentait qu’elle n’était pas en harmonie avec elle-même, et une mauvaise ambiance de travail l’avait marquée dès le premier jour. Toutefois, elle poursuit et continue de s’investir. Mais un jour, elle a très mal au pied. Elle va voir le médecin, sans succès. «Malgré tous les examens et traitements, impossible de me défaire de cette douleur. Je ne pouvais plus marcher. En fait, c’était un signal que m’envoyait mon corps. Je dépassais mes limites.»

Le diagnostic est multiple, avec, entre autres, un épui­se­ment professionnel. Elle ac­cepte alors de se mettre en maladie, et prend conscience de l’étendue de son mal. «Je ne pouvais plus rien faire. Même lancer une machine à laver devenait une tâche trop importante. J’étais en état de choc, je ne comprenais pas ce qui m’arrivait. Mon travail était ma passion, mais j’ai dû faire une rupture avec ma carrière pour m’en sortir.»

Un instinct de survie

Le corps réagit au mental, c’est ce que comprend Marianne Reimann. «Si on néglige pendant trop longtemps ses besoins, ses valeurs, on se déconnecte de ses sentiments, et cela n’est pas bon. J’avais permis de mettre mon esprit dans une situation insuppor­table. Le corps a eu un réflexe de survie. Il m’a obligée à m’arrêter avant qu’il ne soit trop tard.»

Consciente de cet état de fait, elle décide de mettre à profit les outils qu’elle utilisait dans sa vie professionnelle pour son propre bénéfice. «Au lieu de chercher des solutions pour les autres, j’ai cherché des solutions pour moi-même.» Pour commencer, elle accepte de s’arrêter. «J’ai fait une grande pause et j’ai essayé de me re­mettre en forme.» Elle cherche alors de l’aide auprès de différents acteurs des métiers de la santé, suit divers coachings et formations, se rapproche d’associations…

«Cela peut arriver à tout le monde, surtout à ceux qui sont intelligents, qui travaillent beaucoup et bien, qui cherchent toujours à faire plus, font des sacrifices personnels au profit de leur carrière. Il ne faut surtout pas en avoir honte, ni chercher de coupable, mais arriver à comprendre les raisons de ce mal.» Dans son cas, il y avait des facteurs externes et internes, comme le fait de ne pas savoir dire non au travail ou d’accompagner sa mère diagnostiquée d’un cancer et qui vit loin d’elle. «Le stress et le nombre de ­facteurs négatifs s’accumulent avec le temps, et un jour, on n’y arrive plus.» Elle regrette toutefois que l’écoute professionnelle ne soit pas toujours accessible, et il lui est arrivé de se sentir abandonnée dans des situations très difficiles.

Un long parcours

Être malade n’est pas facile. «Il faut beaucoup de temps avant d’arriver à remonter la pente, il faut être courageux.» Elle a vu aussi certaines de ses fréquentations s’éloigner, «des personnes pour qui mon statut professionnel et social était plus important que ma personne. Mais heureusement, il m’a été possible aussi de rencontrer de nouvelles personnes formidables, et j’ai pu compter sur un soutien sans faille de la part de ma famille.»

Elle s’aperçoit qu’être dans la nature lui procure du bien-être. Elle commence alors à faire de courtes promenades, qui, au fil du temps, deviennent de plus en plus longues. Elle s’intéresse aux herbes sauvages, un sujet sur lequel elle est même maintenant diplômée. «J’ai aussi adopté un chien, ce qui m’a beaucoup aidée. En parvenant à prendre soin de lui, j’apprenais à reprendre soin de moi.» À force de persévérance et de patience, elle parvient à retrouver ses forces. Grâce à des sessions de coaching financées par différents acteurs au Luxembourg et des rencontres faites dans le cadre du programme Fit4Entrepreneurship, auquel participe l’Adem, elle commence à envisager une reconversion professionnelle. Elle re­découvre le sujet de la résilience, qu’elle avait déjà étudié, et surtout celui de la pleine conscience (mindfulness). «Avec la pleine cons­cience, j’ai appris à être dans l’instant présent, à accepter un passé qu’on ne peut pas changer, et à me projeter dans un nouvel avenir. Il est possible aussi de développer son intelligence émotionnelle et de mieux comprendre le comportement d’autres personnes dans des situations difficiles, ce qui aide à pardonner. La pleine cons­cience m’a tellement aidée que j’ai choisi de suivre un cursus pour devenir formatrice et pouvoir aider et orienter les autres à mon tour dans leurs périodes difficiles.» Aujourd’hui, Marianne Reimann affirme qu’elle a beaucoup plus gagné qu’elle n’a perdu, et qu’elle se sent plus forte que jamais. Elle a retrouvé le goût du travail et s’est lancée dans une nouvelle aventure professionnelle.

Cet article a été rédigé pour l’édition magazine de  qui est parue le 24 mars 2021.

Le contenu du magazine est produit en exclusivité pour le magazine, il est publié sur le site pour contribuer aux archives complètes de Paperjam.

Votre entreprise est membre du Paperjam Club? Vous pouvez demander un abonnement à votre nom. Dites-le-nous via