«Quand vous venez d’un petit pays comme le Luxembourg, le Festival de Cannes est une chose qui semble à ce point inaccessible…», explique l’actrice luxembourgeoise vue chez Paul Thomas Anderson, M. Night Shyamalan, Mathieu Amalric, ou encore Barry Levinson. (Photo: Anna Krieps/Film AG/Samsa Film)

«Quand vous venez d’un petit pays comme le Luxembourg, le Festival de Cannes est une chose qui semble à ce point inaccessible…», explique l’actrice luxembourgeoise vue chez Paul Thomas Anderson, M. Night Shyamalan, Mathieu Amalric, ou encore Barry Levinson. (Photo: Anna Krieps/Film AG/Samsa Film)

Vicky Krieps est à Cannes pour défendre deux films: «Corsage», où elle interprète l’impératrice Sissi, et «Plus que jamais», pour lequel elle partage l’affiche avec Gaspard Ulliel. Un double moment marquant. Elle nous a accordé une longue interview, que nous publions en deux parties.

Le Festival de Cannes a ouvert sa 75e édition mardi soir. Cette année, sont reprises en sélection officielle, dont deux produites par Samsa Film (via les producteurs et ) et présentées dans la section «Un certain regard». Deux films où apparaît l’actrice n°1 du cinéma luxembourgeois, Vicky Krieps (38 ans).

Après sa en début d’année, la , dans lequel elle tient l’un des rôles principaux, ou ses apparitions dans les pages cinéma de médias importants tels que le , Vanity Fair ou Variety, celle qui avait percé à l’international dans le film «Phantom Thread» (en 2017) de Paul Thomas Anderson est, à nouveau, en haut de l’affiche.

L’an passé, vous étiez en sélection à Cannes avec deux films et un court métrage. Cette année, vous y êtes à nouveau avec deux longs métrages. La Croisette devient un peu un de vos pied-à-terre du printemps…

Vicky Krieps. – «C’est très étonnant à mes yeux de revivre cela. Je pourrais même utiliser le mot ‘bouleversant’. Parce qu’être à Cannes, c’était un rêve que je ne pouvais pas faire. Quand vous venez d’un petit pays comme le Luxembourg, c’est une chose qui semble inaccessible… Alors, l’année dernière, lorsque je me suis déjà retrouvée ici avec deux longs métrages, c’était un peu comme si j’avais marché sur la lune. Cannes est un rendez-vous qui a vu passer tant de films que j’ai aimés et qui m’ont marquée. Y assister en tant que spectatrice aurait déjà été incroyable à mes yeux. Alors, vous imaginez, y être conviée avec deux films dans lesquels je joue… C’était énorme en 2021, et cela l’est tout autant en 2022.

À 15 ans, Vicky Krieps a lu la biographie de Sissi. Un acte fondateur du film «Corsage». (Photo: Anna Krieps/Film AG/Samsa Film)

À 15 ans, Vicky Krieps a lu la biographie de Sissi. Un acte fondateur du film «Corsage». (Photo: Anna Krieps/Film AG/Samsa Film)

Vous y êtes avec deux films qui s’annoncent marquants. Dont «Corsage», de la réalisatrice autrichienne Marie Kreutzer, dans lequel vous jouez Sissi, l’impératrice Élisabeth d’Autriche. Un rôle que tout le monde assimile à Romy Schneider depuis son interprétation dans la saga du même nom, réalisée dans les années 1950. Être comparée à une telle actrice ne doit pas être simple…

«Effectivement. Qui plus est, Romy Schneider est une actrice dont j’apprécie l’œuvre. Mais ‘Corsage’ est très différent de cette saga tournée voici pratiquement 70 ans. Notre film se concentre sur la femme qu’était l’impératrice Élisabeth, et notamment sur sa lutte pour conserver son image publique à l’aube de ses 40 ans. Alors que ‘Sissi’ collait, lui, davantage à l’image qu’on avait donnée d’elle. Du coup, je joue une Élisabeth qui n’a pas grand-chose à voir avec celle de Romy Schneider. On peut même dire qu’au final, ce sont deux rôles très différents.

Vous n’avez donc pas revu les différents volets de cette saga pour vous en inspirer?

«Non. Mais ces films-là m’ont inspirée différemment. Dans ma jeunesse, je les ai vus grâce à ma voisine. Dans sa famille, on les regardait chaque année à la période de Noël. J’y ai pris beaucoup de plaisir parce que c’était très différent de ce je voyais chez moi. Je me suis intéressée à cette histoire de princesse, parce que, chez moi, il n’y avait justement pas de princesse (elle sourit, ndlr). Et grâce à ça, à 15 ans, j’ai lu la biographie de Sissi. À cet âge-là, je n’ai évidemment pas compris toutes les subtilités de son existence, mais suffisamment pour que cela m’intrigue, m’interroge. Pourquoi ne voulait-elle pas être prise en photo? Ne pas être peinte? Pourquoi est-elle une des premières personnes à avoir demandé que l’on confectionne à son intention ce qu’on appelle aujourd’hui des machines de fitness? La profondeur de ce récit m’échappait en partie, mais cela a suscité mon intérêt. Et en 2015, lorsque j’ai tourné une première fois avec Marie Kreutzer (le film ‘Was hat uns bloß so ruiniert’, ndlr), je lui ai proposé le sujet.

C’est donc vous qui avez initié ce film?

«Oui. À l’époque, Marie avait, elle aussi, en tête ces films avec Romy Schneider. Et ce qu’elle en avait retenu, c’était leur côté superficiel et kitsch qui les rendait assez peu intéressants à ses yeux. Je lui ai alors parlé de cette biographie que j’avais lue quelques années plus tôt. Et cela en est resté là… Du moins jusqu’à ce qu’elle m’envoie, deux ou trois ans plus tard, le scénario de ‘Corsage’. Elle avait fait des recherches et mis tout cela par écrit. Mais vous comprenez, du coup, pourquoi cette production me tient beaucoup à cœur. Il y a beaucoup de choses personnelles dans ce film.

L’affiche du film «Plus que jamais», où Vicky Krieps partage l’affiche avec Gaspard Ulliel. (Photo: Samsa Film)

L’affiche du film «Plus que jamais», où Vicky Krieps partage l’affiche avec Gaspard Ulliel. (Photo: Samsa Film)

L’autre long métrage dans lequel vous apparaissez, «Plus que jamais» (dont la sortie dans les salles est annoncée pour le 9 novembre), est très attendu par le public et la presse française, du fait qu’il s’agit du dernier film de l’acteur Gaspard Ulliel (décédé à 37 ans, le 19 janvier dernier, ndlr). Cela risque d’être un vrai moment d’émotion lors de sa présentation ce samedi 21 mai…

«Oui… Néanmoins, j’espère que ‘Plus que jamais’ ne sera pas juste attendu parce qu’il s’agit du dernier film de Gaspard Ulliel. Avant tout, c’est un très beau film, d’une réalisatrice (la Franco-Autrichienne Emily Atef, pour laquelle Vicky Krieps avait déjà tourné en 2018 ‘Trois Jours à Quiberon’, ndlr) qui mérite d’être enfin sélectionnée dans ce festival cannois. La projection ne pourra être qu’un joli moment, vu que, le temps de ce film, Gaspard sera vivant à l’écran. Être présent à Cannes, dans un dernier long métrage qui parle ainsi de l’amour d’un couple, et de comment cet amour peut survire à la mort, c’est une belle analogie. Forte et profonde. J’espère que nous parviendrons à transmettre un peu de cette vérité au public…»

La suite de cet entretien est à retrouver .