Stefan Städter est associé en gestion des investissements chez Arendt & Medernach. (Photo: Arendt)

Stefan Städter est associé en gestion des investissements chez Arendt & Medernach. (Photo: Arendt)

En janvier 2023, 84 Eltif ont été lancés dans l’Union européenne dont 48 domiciliés au Luxembourg. Dans une interview accordée à Delano, Stefan Städter, associé en gestion des investissements chez Arendt & Medernach, s’est plongé dans le nouveau règlement Eltif, approuvé par la commission des affaires économiques et monétaires du Parlement européen le 12 janvier.

Le texte concernant les modifications du règlement sur les fonds européens d’investissement à long terme (Eltifs), qui est entré en vigueur en 2015, a été approuvé par la commission des affaires économiques et monétaires du Parlement européen, le 12 janvier 2023, le vote étant prévu pour le 13 février. Les Eltifs sont des fonds qui investissent dans des actifs tels que les infrastructures d’énergie et de communication, les transports, les bâtiments publics ou les infrastructures sociales, et peuvent être distribués au-delà des frontières.

«Nous connaissions déjà la teneur du projet», a déclaré , au sein du département de gestion des investissements du cabinet Arendt & Medernach, et qui a été impliqué dans environ 65% des Eltifs existants au Grand-Duché. «Mais voir le texte définitif est une sensation très différente.»

Quelles sont donc les nouveautés du règlement modifié?

Les amendements facilitent l’investissement dans les Eltifs. Ils incluent un champ plus large d’actifs éligibles et de portefeuilles admissibles, et facilitent l’acheminement de plus de financements vers les petites entreprises, indique un flash d’information publié par Arendt le 16 janvier. Elle favorise également la protection des investisseurs et simplifie la distribution.

«L’accès aux actifs sera beaucoup plus simple, car vous pouvez désormais investir également dans d’autres fonds en tant que cible. Avant, c’était plutôt des investissements directs, c’est-à-dire que vous investissez dans le private equity, et que vous suivez une stratégie de crédit privé. Il sera désormais possible d’investir dans des fonds alternatifs au sens de la directive AIFM.»

«Et c’est nouveau: quand on veut adopter une stratégie de fonds de fonds, on était alors juridiquement limité aux fonds de l’UE.» Parce que les institutions veulent empêcher l’utilisation offshore des Eltifs. «C’est pourquoi elles ont favorisé les fonds AIFM afin de s’assurer qu’il n’y a pas de risque pour les investisseurs.»

Plus d’actifs réels et d’investissements verts

Le nouveau règlement Eltif simplifiant la définition des actifs réels, Stefan Städter s’attend à voir se développer plus de nouveaux projets. La définition des actifs réels était très compliquée auparavant: les biens immobiliers devaient être «labéllisés».

«Cela n’était pas cohérent et compatible avec l’approche ESG du SFDR, il y avait un petit décalage entre les deux. Et cela créait, bien sûr, de l’incertitude. Et les gestionnaires d’actifs n’aiment pas l’incertitude.» Il était donc difficile de mettre en œuvre une stratégie d’actifs réels dans une stratégie globale. «Cette situation est désormais révolue. La définition a été complètement simplifiée.»

«L’autre point était qu’il y avait toujours une valeur minimale. Votre actif réel devait valoir 10 millions d’euros. Des montants irréalistes lorsque vous investissez par exemple dans les nouvelles énergies comme les panneaux solaires ou l’énergie éolienne où les projets peuvent être moins couteux. La refonte du régime supprime ce seuil minimum pour les stratégies immobilières. C’est une réforme qui va dans le sens de la volonté de la Commission de promouvoir ce type d’investissements.»

La suppression du « ticket d’entrée » augmente l’accès des investisseurs de détail

Le nouveau règlement supprime également le «ticket d’entrée», c’est-à-dire une participation minimale de 10.000 euros et un plafond d’exposition de 10% pour les investisseurs individuels dont les portefeuilles financiers sont inférieurs à 500.000 euros.

La logique d’un tel seuil était «d’obliger» les investisseurs à réfléchir à deux fois explique Stefan Städter. Mais une personne disposant de 500.000 euros, par exemple, serait théoriquement en mesure d’investir 1 euro, poursuit-il. «Un résultat absurde car il oblige les investisseurs à investir plus qu’ils ne l’auraient souhaité dans un seul fonds». Les investisseurs auraient pu, par exemple, souhaiter investir 5.000 euros dans un Eltif et 5.000 euros dans un autre afin de se diversifier – une décision logique. Mais le règlement forçait les investisseurs à mettre tout cela sur un seul.

«Tout cela est du passé. Mais si l’exigence d’un investissement minimum disparait, d’autres exigences demeurent. Au Luxembourg, par exemple, pour investir dans un Raif (fonds d’investissement alternatif réservé), un Sif (fonds d’investissement spécialisé) ou une Sicar (société d’investissement en capital à risque), il faut avoir le statut d’investisseur averti.»

D’autres produits n’ont pas de critères d’éligibilité: en théorie, on peut investir 100 euros dans un produit d’investissement, à condition de passer le «test d’adéquation» avec un distributeur. Ce test d’adéquation a toujours existé, mais auparavant, il était plus spécifique à Eltif, explique Stefan Städter. Mais les spécificités engendrent des coûts. Avec le nouveau règlement Eltif, le test d’adéquation Eltif a été aligné sur celui de Mifid II.

Cela «rend la vie très facile et pratique pour le distributeur. Ils connaissent bien le cadre et peuvent l’appliquer à ce nouveau contexte. Du point de vue de l’investisseur, je pense que c’est un gain. Pour le distributeur, c’est un gain».

Renforcer le Luxembourg en tant que centre de distribution

L’Eltif 2.0 est également une bonne réforme pour le distributeur. «Je pense que cela renforce le distributeur, et ils obtiennent de la clarté, ce qui est une bonne chose», déclare Stefan Städter, surtout pour le Luxembourg et son intention de devenir le centre de distribution de référence. 48 Eltifs – 57% des 84 Eltifs lancés dans l’UE en janvier 2023 – sont domiciliés au Grand-Duché.

Stefan Städter est intervenu lors d’un panel à Prague en décembre 2022 et a noté le vif intérêt de l’Europe centrale pour le sujet des Eltifs. «C’est la même chose en Italie. Dès que vous allez en Italie et que vous prononcez le mot Eltif, tout le monde sait ce qu’est un Eltif. C’est une nouvelle normalité.» La France est également très motivée pour les Eltif, mais c’est national, observe Stefan Städter. «Il est rare qu’un Eltif français soit réellement distribué en dehors de la France, de même pour l’Italie.»

«Mais au Luxembourg, vous pouvez voir en moyenne 10 pays de distribution, ce qui est incroyable. Et depuis ce janvier, la Norvège – pays non membre de l’UE, mais faisant partie de l’EEE – autorise les Eltifs. Vous pouvez maintenant distribuer vos produits en Norvège, en Islande et au Lichtenstein. Autant de nouveaux marchés

Calendrier

Le Parlement européen devrait voter le projet en février, estime Stefan Städter, et «il serait surprenant qu’il soit rejeté.» La publication finale au journal officiel de l’UE est donc prévue pour mars 2023, et le règlement Eltif révisé devrait entrer en vigueur 20 jours plus tard – en avril 2023.

«Vous devrez appliquer les nouvelles règles en fait neuf mois plus tard, ce qui nous amène à janvier, février 2024. Si vous êtes un fonds à durée indéterminée ou si vous êtes encore en phase de commercialisation, vous bénéficierez d’une période de droits acquis de cinq ans.»

Cela dit, il sera possible de «s’inscrire» plus tôt. Il y a la possibilité de «notifier à votre régulateur que vous voulez déjà faire usage du nouveau régime. Ce qui signifie, techniquement parlant, que vous pourriez, dès avril de cette année – cela dépend un peu de la publication et des 20 jours – utiliser déjà le nouveau régime.»

Cet article a été écrit en anglais pour , traduit et édité en français pour Paperjam.

Cet article a été publié pour la newsletter Paperjam+Delano Finance, la source hebdomadaire d’informations financières au Luxembourg. .