La personnalisation des services est aujourd’hui un axe de développement et de différenciation majeur pour les banques privées en quête de nouvelles sources de revenus. Si les grands acteurs entièrement dédiés à la gestion de fortune ont tendance à s’orienter vers une clientèle disposant d’avoirs de plus en plus élevés, les banques plus traditionnelles ne restent pas les bras croisés. Voici deux ans, par exemple, la Spuerkeess a réorganisé son offre en se dotant d’un nouveau département Private banking dans le but de mieux servir cette clientèle aux attentes particulières. «Jusqu’en 2022, l’activité de banque privée était placée sous la responsabilité de notre réseau d’agences. Aujourd’hui, il s’agit d’une entité à part entière, aux côtés de nos trois autres pôles que sont le retail banking, la clientèle institutionnelle et le corporate banking», témoigne Alain Uhres, head of private banking à la Spuerkeess. «Cette nouvelle organisation traduit une volonté de personnalisation de nos services de private banking à destination d’une clientèle essentiellement de résidence luxembourgeoise et frontalière.»
En tant que banque universelle, détenue à 100% par l’État luxembourgeois, la Spuerkeess présente une très large gamme de services bancaires, qui sert directement l’activité des clients plus fortunés. «Au niveau de nos services de base, on retrouve les services daily banking comme les comptes courants, les cartes de paiement, notre application S-Net, qui rassemble plus de 300.000 utilisateurs aujourd’hui», explique Alain Uhres. «Notre département, qui se situe plus haut dans la pyramide des besoins, peut puiser dans cette offre et cette infrastructure développées par la banque, ce qui nous permet de profiter d’économies d’échelle importantes.»
Une gestion discrétionnaire de haut niveau
Pour servir au mieux sa clientèle, le département Banque privée peut également s’appuyer sur l’expérience acquise depuis de nombreuses années par la banque dans la gestion de titres. «À ce niveau, nous proposons aujourd’hui trois approches distinctes, avec l’execution only, l’advisory et la gestion discrétionnaire… À partir d’un certain seuil d’avoirs, nous pouvons réellement offrir un conseil très personnalisé, jusqu’à la mise à disposition d’un gestionnaire professionnel dédié qui prendra, dans le cas de la gestion discrétionnaire, toutes les décisions d’investissement pour le compte du client, en fonction de son profil de risque et de ses attentes très précises, en termes d’impact environnemental notamment», continue Alain Uhres.
Comme dans beaucoup d’autres institutions, la personnalisation est d’abord conditionnée par le niveau des avoirs sous gestion (AuM) que le client est prêt à confier à son banquier privé. «Bien que la clientèle de la Spuerkeess diffère de celle des pures maisons de banque privée, nous sommes pleinement engagés à développer des solutions avec lesquelles on peut aborder les clients family office ou ultra high net worth (UHNW)», partage Fred Kutten, deputy head of private banking à la Spuerkeess. «À ce niveau, notre atout est de pouvoir puiser dans toute l’expertise déjà en place au sein de la banque, et tout particulièrement celle des équipes de Spuerkeess Asset Management, notre filiale spécialisée en gestion de portefeuilles. Au niveau le plus prestigieux de la gestion discrétionnaire, nous avons le privilège de pouvoir mettre à disposition de nos clients les plus fortunés un gestionnaire dédié et expérimenté de Spuerkeess AM, pour prendre en compte les contraintes individuelles en matière de politique d’investissement.»
Aller davantage vers cette personnalisation, qui exige de maîtriser de nombreux sujets, à la fois en matière de compliance, mais aussi au niveau des produits et services.
L’avantage d’une banque universelle est de pouvoir accompagner ses clients tout au long de leur vie. «Grâce à cette organisation, qui se matérialise à travers les quatre activités commerciales, nous pouvons offrir à ces clients un service à 360 degrés et identifier, le moment venu, les clients qui disposent du profil et des ressources pour frapper à la porte de notre département», souligne Fred Kutten. «C’est notamment le cas de nos clients corporate. Au commencement, nous sommes là pour financer leur projet et, une fois que leur activité se développe, leurs besoins évoluent. Le niveau de fortune du chef d’entreprise ou du titulaire d’une profession libérale peut augmenter. On entre petit à petit dans la sphère des placements, de l’accompagnement et, au final, de la banque privée. En outre, compte tenu de leur parcours, ces personnes sont souvent d’une grande fidélité.»
Afin de mieux servir sa clientèle de banque privée, la Spuerkeess étoffe encore sa gamme de services, notamment dans le domaine du financement. «Notre banque est très bien positionnée sur ce sujet, mais nous voulons aller plus loin pour répondre aux besoins spécifiques des plus fortunés. Nous avons donc mis en place une équipe dédiée. On pense souvent, à tort, que ces personnes n’ont pas besoin de solutions de financement. Or, c’est souvent le contraire. Et leurs besoins en la matière sont très spécifiques», reprend Alain Uhres. Enfin, même si la structuration patrimoniale n’a jamais été au cœur des services de la banque, là encore, une petite équipe est désormais en place pour analyser en profondeur la situation du client, l’accompagner par exemple au niveau de questions de succession, de fiscalité, de philanthropie, le plus souvent en partenariat avec des experts externes.
Un seuil d’entrée augmenté
En parallèle de toutes ces actions, et afin de garantir le niveau de personnalisation attendu par les clients, la Spuerkeess a décidé récemment d’augmenter le seuil d’entrée à la banque privée. « Alors que les coûts sont en augmentation constante, notamment d’un point de vue réglementaire, et que le métier de chargé de relation se complexifie, nous souhaitons limiter le portefeuille de chacun de nos conseillers, afin de les rendre plus disponible», précise Alain Uhres. «L’idée n’est pas d’exclure les gens, mais véritablement d’aller davantage vers cette personnalisation, qui exige de maîtriser de nombreux sujets, à la fois en matière de compliance, mais aussi au niveau des produits et services que nous proposons à cette clientèle, qu’il faut apprendre à connaître et à servir sur le long terme.»
L’appétit au risque en guise de segmentation
La spécialisation d’une banque privée passe par la segmentation de sa clientèle. Banque 100% luxembourgeoise, détenue par l’État, la Spuerkeess concentre ses efforts principalement sur ses clients locaux luxembourgeois et ceux qui ont un lien direct avec le pays, comme les frontaliers. «Cette segmentation touche directement à l’appétit au risque de la banque. Considérant l’investissement nécessaire et le risque encouru, élargir notre cible à d’autres zones géographiques trop ‘exotiques’ ne nous semble pas opportun, tout simplement parce que cela demande une expertise dont nous ne disposons pas. Nous avons donc décidé de nous concentrer sur ce que nous connaissons le mieux, avec l’avantage qu’il est plus facile aujourd’hui d’onboarder un client résident luxembourgeois qu’un ressortissant d’une zone géographique lointaine, notamment au regard des exigences de compliance (KYC, lutte contre le blanchiment d’argent ou le financement du terrorisme, reporting financier et extra-financier, etc.)», confie Alain Uhres.
Vient ensuite la prise en compte du niveau de sophistication du client. «Si, aujourd’hui, je m’occupe d’une personne physique résidente luxembourgeoise, l’entrée en relation sera différente que si nous devons ouvrir un compte pour une holding, détenue par d’autres holdings ou par un trust, et présente dans plusieurs juridictions à travers le monde. Chaque banque doit ainsi se poser la question de son appétit au risque et de ses affinités pour certains sujets ou certaines zones géographiques», ajoute le head of private banking.
Cette préoccupation rejoint un autre enjeu-clé, qui est celui du time consuming. «Notre département rassemble environ 70 personnes. La moitié sont des chargés de relation. L’autre moitié est là pour leur apporter tout le support nécessaire à leur activité de conseil. Si nous souhaitons consacrer tous nos efforts à la satisfaction de cette clientèle de banque privée, nous devons nous limiter dans le scope choisi», conclut Alain Uhres.
Cet article a été rédigé pour le supplément de l’édition de parue le 24 avril. Le contenu du magazine est produit en exclusivité pour le magazine. Il est publié sur le site pour contribuer aux archives complètes de Paperjam.
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