Devenue CEO dans la tourmente, Theresa Condor a offert à Spire un bol d’air grâce à sa ténacité dans la vente de son activité maritime à Kpler. (Photo: Mike Zenari/Archives)

Devenue CEO dans la tourmente, Theresa Condor a offert à Spire un bol d’air grâce à sa ténacité dans la vente de son activité maritime à Kpler. (Photo: Mike Zenari/Archives)

La finalisation, sous la menace, de la vente de son activité maritime à la belge Kpler pour 241 millions de dollars, offre un répit à celle que l’on a souvent présentée comme la «Next Billion Company», Spire, dont le siège européen était arrivé au Luxembourg contre 70 millions de dollars.

Les promoteurs du Luxembourg Future Fund ont dû souffler. Dans la nuit de vendredi à samedi, Spire a annoncé dans un communiqué avoir finalisé la vente de son activité maritime à Kpler pour 241 millions de dollars, de quoi éponger ses 102 millions de dollars de dettes et effacer provisoirement l’avertissement qu’elle avait dû lancer après la publication de son rapport annuel sur sa capacité à poursuivre ses activités.

Le LFF y avait investi 15 millions de dollars dans un tour de table à 70 millions de dollars dès 2017, dans le cadre des efforts d’Étienne Schneider pour attirer au Luxembourg des sociétés de l’espace. La faillite eut été un autre mauvais résultat... Mais Spire, qui a cédé via son siège européen luxembourgeois ce pan d’activité qui lui a rapporté 43 de ses 110 millions de dollars de revenus en 2024, a bien failli ne jamais voir cette transaction réalisée.

L’histoire commence par une offre de rachat totalement inattendue que l’entreprise spécialisée dans les images fournies par sa constellation de satellites a reçue un jour. Le CEO la transmet aussitôt à une banque d’affaires et la charge de tester l’appétit du marché. C’est là que la belge Kpler est entrée dans la danse. Jusqu’à l’annonce, en novembre 2024, d’un accord à 241 millions de dollars, dont 7 millions de dollars de services. L’opération concerne l’ensemble de l’activité maritime, y compris exactEarth, rachetée en 2021, mais exclut l’infrastructure satellitaire de Spire et ses contrats avec les agences gouvernementales américaines. Sauf que, faute de parvenir à renouveler le contrat avec un des clients, Kpler a tenté de se sortir de cet accord. C’était sans compter la ténacité de la nouvelle CEO, Teresa Condor: le jour de la Saint-Valentin, elle saisit la justice du Delaware pour «inviter» l’entreprise belge à honorer sa promesse. Les deux entreprises finissent par se mettre d’accord et quittent la voie judiciaire avec une deadline, ce 25 avril.

Longtemps moteur de croissance, l’activité maritime constituait l’une des principales lignes de revenus de Spire. Mais face à l’aggravation de ses pertes, le groupe a dû se résoudre à arbitrer. Entre 2021 et 2024, le chiffre d’affaires est passé de 43,4 à 110,5 millions de dollars, mais les pertes nettes n’ont jamais cessé d’augmenter:

2021:  -109,4 millions de dollars

2022: -89,4 millions de dollars

2023: -77,6 millions de dollars

2024: -102,7 millions de dollars

En parallèle, l’Ebitda est resté négatif, signe de difficultés structurelles sur l’ensemble des opérations.

Avec la vente à Kpler, Spire entend solder son emprunt principal, le Blue Torch Financing Agreement, contracté en 2022 pour 120 millions de dollars à des taux supérieurs à 12%. 

Les flux de trésorerie restent négatifs, les besoins de financement demeurent importants, et la croissance doit désormais venir des trois activités conservées: aviation, Weather & Climate et Space Services. Au 31 décembre 2024, Spire avait une constellation entièrement déployée de 199 satellites en orbite. La plateforme Lemur compte environ 40 de ces satellites capables de géolocalisation.

Pour sécuriser sa trésorerie, Spire avait déjà levé 40 millions de dollars en mars 2025, en anticipation d’un éventuel retard dans la finalisation de la vente.