Thierry Raizer, rédacteur en chef de Paperjam. (Photo: Maison Moderne / Archives)

Thierry Raizer, rédacteur en chef de Paperjam. (Photo: Maison Moderne / Archives)

L’été. La saison qui invite à la respiration. À faire une pause. À rêver à de nouveaux objectifs. Devant son écran d’ordinateur ou sur son lieu de villégiature, la période est propice aux premiers bilans, six mois après les bonnes résolutions de l’an neuf.

Quel mot choisir pour qualifier le premier semestre du gouvernement DP-LSAP-Déi Gréng – deuxième du genre – arrivé au pouvoir en décembre 2018? Mitigé, écriront certains, qui regrettent peut-être le souffle de renouveau politique et de modernisation de 2013. Cette coalition toujours inédite serait-elle atteinte du syndrome dont souffrent tous les gouvernements reconduits? Celui de donner une image routinière dans un monde rythmé par les effets d’annonce.

Certaines réformes, comme celle des retraites, resteront probablement un doux rêve d’ici à la fin de la mandature. Mais d’autres résultats traduisent une politique mêlant souci de l’environnement, économie innovante et caractère social assumé jusque dans les rangs des libéraux. La gratuité des transports publics en 2020, les jours de congé supplémentaires et l’augmentation du salaire social minimum ont largement occupé l’actualité depuis le début de l’année, tandis que d’autres signaux, hors polémiques, donnent une lecture complémentaire des travaux ministériels.

L’attraction des fintech internationales pour la Place, la participation au projet européen de supercalculateurs, des investissements industriels dans le spatial ou une stratégie dans l’intelligence artificielle sont à mettre au crédit d’un gouvernement qui, comme ses prédécesseurs, mise sur la continuité des dossiers en faveur de la diversification économique.

Car le Luxembourg a l’obligation de jouer sur plusieurs tableaux pour conserver sa bonne santé économique et sa paix sociale. Outre le volet économique, le marqueur vert qui a surligné de nombreux passages dans l’accord de coalition devra être accentué dans les prochains mois en raison du rêve formulé par de nombreux citoyens: conserver un cadre de vie agréable, et, en même temps, disposer d’un haut niveau de vie. Un paradoxe qui s’illustre lors des discussions animées autour du projet de data center de Google à Bissen ou de l’usine de yaourt du grec Fage à Bettembourg, fournisseurs d’emplois et de revenus à l’État, mais interpelant sur leurs incidences environnementales.

Pragmatique, un brin opportuniste et parfois visionnaire, le Luxembourg s’est adapté aux différentes crises. Il peut, à l’approche d’un ralentissement économique que d’aucuns prédisent, rêver d’une green nation. Pas d’un énième label qui répondrait à des critères aussi louables soient-ils, mais d’un positionnement européen en matière de développement économique et sociétal durable. À la croisée de la recherche publique et privée, de la volonté politique et des demandes des citoyens, en particulier chez les jeunes, il se doit de donner l’exemple.

Toute activité humaine a des répercussions indéniables, et la surconsommation et le tourisme de masse pratiqué en cette saison doivent par ailleurs susciter l’interrogation. Le combat pour la première partie de l’année est déjà perdu, puisque le pays a consommé plus que ce qu’il ne peut produire depuis le 16 février, selon le triste classement du « jour du dépassement » établi par l’ONG WWF.

Rêvons pendant cette pause estivale à tous les gestes quotidiens que nous pourrons tous accomplir pour faire avancer la cause climatique dans un pays où la voiture continue de rouler en maître. Rappelons aux entreprises que l’enjeu écologique n’est plus un frein, mais un impératif.

L’action de la coalition DP-LSAP-Déi Gréng se mesurera peut-être à l’aune du déficit public ou du taux de chômage. Il devra aussi s’évaluer quant à sa capacité de léguer un Luxembourg viable aux futures générations. «Nous n’avons pas de planète B», répètent à l’envi les dirigeants politiques, dont le Premier ministre . Pas de Luxembourg B non plus.