Le directeur général de la Chambre de commerce, Carlo Thelen, la directrice des affaires économiques à la Chambre de commerce, Christel Chatelain, et Bérengère Beffort ont présenté les résultats du neuvième «Baromètre de l’économie». (Photo: Chambre de commerce)

Le directeur général de la Chambre de commerce, Carlo Thelen, la directrice des affaires économiques à la Chambre de commerce, Christel Chatelain, et Bérengère Beffort ont présenté les résultats du neuvième «Baromètre de l’économie». (Photo: Chambre de commerce)

Face à un contexte économique épineux, les entreprises sont confrontées à l’inflation galopante, la hausse des taux d’intérêt ou encore le manque de main-d’œuvre. En année électorale, le «Baromètre de l’économie» revient sur ces problématiques et suggère des propositions pour répondre à ces préoccupations.

«Certaines grandes entreprises internationales, mais aussi des structures de taille moyenne et des entités de type family offices réfléchissent à délocaliser leur siège, filiale ou site de production, si l’environnement économique continu à se détériorer au Luxembourg ou si la position compétitive par rapport à d’autres pays devait s’affaiblir davantage. Si de tels signaux se concrétisaient, les effets d’entraînement sur une multitude d’autres prestataires de services seraient néfastes pour notre économie dans son ensemble.» Et le directeur général de la Chambre du commerce, , d’ironiser en conclusion, comme pour souligner la menace qui pèse sur le pays: «Dans le pire des cas, le Luxembourg n’aura plus de souci à se faire en ce qui concerne la crise du logement.»

De la 9e édition de l’enquête semestrielle du «Baromètre de l’économie», réalisée auprès de 611 entreprises d’au moins six salariés du 4 au 25 avril et présentée ce mercredi 7 juin, il ressort que le score synthétique diminue pour le quatrième semestre consécutif. Ce résultat, qui correspond à la moyenne de cinq indicateurs de conjoncture (confiance, activité, emploi, rentabilité et investissements) passe de 52,3 à 50,7 sur 100.

Avec un ralentissement économique mondial et une inflation inédite (quasiment deux fois plus élevée que lors de la crise des subprimes), la situation conjoncturelle du pays est loin d’être au beau fixe. La productivité ne décolle pas et le coût du travail atteint des sommets. «Les nombreuses indexations n’ont fait qu’alimenter l’inflation», explique ainsi Christel Chatelain, directrice des affaires économiques à la Chambre de commerce.

«La hausse du coût du travail ne serait pas dramatique si la production augmentait également… Malheureusement ce n’est pas le cas», poursuit Carlo Thelen. Chute du niveau d’activité, situation économique volatile incertaine… Les entreprises subissent de plein fouet la crise. Résultats des courses: une entreprise sur quatre a déclaré une baisse de son activité au cours des six derniers mois.

Elles ne sont que 19% à prévoir d’augmenter leurs effectifs (contre 34% au premier semestre de 2019), les emplois devraient rester stables selon les deux tiers des entreprises. Elles sont quasiment aussi nombreuses à avoir lancé ou poursuivi un programme de formation en un an… et espèrent une défiscalisation des bonus et une baisse de l’impôt pour les célibataires.

Une baisse de la compétitivité et de l’attractivité

L’activité a chuté dans la quasi-totalité des secteurs ce dernier semestre. Avec la hausse du prix des matières premières et des taux d’intérêt, l’industrie (-17%) et la construction (-10%) sont les plus touchées. Seuls le secteur financier (+8%) et celui des transports (+2%) ont réussi à rester dans le positif.

27% des chefs d’entreprise prévoient également de réduire leurs investissements au Luxembourg. L’industrie (-20%) et la construction (-24%) sont de nouveau parmi les plus affectées. L’horeca est en souffrance, puisque les branches de l’hôtellerie et de la restauration sont les plus atteintes (-25%).

La hausse récurrente des taux directeurs de la Banque centrale européenne (BCE) ne touche pas uniquement les ménages mais aussi les sociétés: 18% ont connu quelques difficultés à emprunter ces six derniers mois, et 9% en ont rencontré beaucoup.

«Il faut dérouler le tapis rouge quand quelqu’un frappe à la porte», insiste Carlo Thelen, en référence aux problèmes d’attractivité du Luxembourg, par rapport à l’Irlande notamment. (Photo: Chambre de commerce)

«Il faut dérouler le tapis rouge quand quelqu’un frappe à la porte», insiste Carlo Thelen, en référence aux problèmes d’attractivité du Luxembourg, par rapport à l’Irlande notamment. (Photo: Chambre de commerce)

Le manque d’amélioration des procédures administratives aggrave la situation. Lors , 44% des CEO estimaient que la simplification et l’accélération des procédures devaient être une priorité pour le gouvernement. Une grande majorité des entrepreneurs (62%) ne constate aucune amélioration. Pire encore, 35% estiment qu’elle s’est complexifiée. «Il faut simplifier les démarches administratives, ce qui va de pair avec la digitalisation», souligne encre Christel Chatelain.

«On a la chance d’avoir de nombreuses petites et moyennes entreprises qui s’en sortent très bien», nuance cependant Carlo Thelen.

Les mesures proposées

Mais «ces nombreux signaux» inquiètent tout de même le directeur général de la Chambre de commerce, qui répète les habituelles tares du Luxembourg. D’après l’enquête, coût du travail, manque de disponibilité des talents et fiscalité sont ainsi les trois principaux éléments qui refroidissent les entreprises dans leurs perspectives d’investissement au Grand-Duché.

«On est au dernier tiers du classement européen dans le domaine de la fiscalité. Alors que l’on doit absolument se situer dans le premier tiers», explique Carlo Thelen. «Il faut dérouler le tapis rouge quand quelqu’un frappe à la porte.»

Pour restaurer l’attractivité et la compétitivité, des réponses politiques fortes doivent être entreprises. La Chambre de commerce propose ainsi de:

: une seule indexation maximum par an, une indexation plafonnée à partir de 1,5 fois le salaire médian et dégressive à partir de quatre fois ce salaire médian, ainsi qu’une indexation basée sur un «panier durable»;

– faire converger vers la médiane européenne (21%);

– adopter une stratégie nationale «talents» et assouplir la législation sur l’organisation du temps de travail pour permettre une gestion au cas par cas dans le cadre du dialogue social en entreprise en fonctions des spécificités de chaque entreprise.


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«Il faut absolument que le nouveau gouvernement prenne en compte nos recommandations sur ces trois piliers», explique Carlo Thelen. «J’ai consulté les programmes des partis, certaines mesures sont positives.  Après, faut-il encore les mettre en œuvre et rapidement», conclut-il.