Pour Gaston Reinesch, l’euro s’est imposé sur la scène internationale et entre maintenant dans l’âge adulte. (Photo: BCL/Olivier Minaire)

Pour Gaston Reinesch, l’euro s’est imposé sur la scène internationale et entre maintenant dans l’âge adulte. (Photo: BCL/Olivier Minaire)

Alors que l’euro fête ses 20 ans, Gaston Reinesch, le président de la Banque centrale du Luxembourg, livre à Paperjam son bilan sensible de la monnaie commune européenne.

Pour parler du et de ses éventuels bienfaits, préfère plutôt adopter une approche contrefactuelle – une méthode issue de la science historique et qui consiste à imaginer des développements alternatifs – et pose la question de savoir ce qui se serait passé si l’euro n’avait pas existé.

Et pour éviter de se laisser emporter, il met en avant quelques évidences comme autant de repères pour rester en terrain connu.

«Si nous n’avions pas eu l’euro et la politique monétaire qui l’accompagne, le Luxembourg et sa place financière n’auraient pas pu passer la crise de 2008 comme ils l’ont fait», insiste-t-il. Et pour lui, cette vertu «défensive» de la monnaie européenne s’est encore vérifiée avec la crise sanitaire actuelle.

Un euro vaccinal

«La crise du Covid a vite évolué en crise économique sans que celle-ci ne dégénère comme on aurait pu le craindre en crise financière.» Et il en accorde le crédit à l’action de la Banque centrale européenne «dont les interventions ont été déterminantes», tout en reconnaissant que les politiques budgétaires des pays membres de la zone euro ont été également à la hauteur du péril.

«Si nous avions eu encore une monnaie nationale, le Luxembourg aurait été bien plus touché qu’il ne l’a été de par sa structure d’économie ouverte et tournée vers les exportations.»

Et si les contrecoups à long terme de ces politiques accommodantes – et notamment le faible niveau des taux d’intérêt – ne doivent pas être négligés, Gaston Reinesch estime que les décisions prises devaient l’être afin d’éviter «la mort du malade», comprendre l’écroulement économique de l’Europe.

Ces vertus défensives ont pu être constatées à différents moments. Notamment lorsque la flambée des cours de l’énergie a plusieurs fois été amortie ces dernières années par la force de l’euro par rapport au dollar, la monnaie de référence sur les marchés pétroliers et gaziers.

Un atout pour le développement de la Place et de l’économie

L’euro n’a évidemment pas que des qualités de bouclier. Pour Gaston Reinesch, c’est aussi grâce à l’euro et au développement d’un marché financier unique qui en découle que la place financière a pu se développer et se diversifier aussi vite ces dernières années. «Je ne pense pas qu’avec une monnaie nationale, les choses aient été aussi rapides et aussi efficaces. Et, par contrecoup, l’économie luxembourgeoise n’aurait pu connaître une croissance comme elle en a connu ces vingt dernières années.»

Sur un plan plus global, le président de la BCL estime que l’euro est devenu «une monnaie de réputation internationale» à côté du dollar. Et du renminbi dans une certaine mesure. Un plus pour l’Europe et donc pour le Luxembourg. Bien sûr, la vie de l’euro n’a pas été un long fleuve tranquille et il y a eu «des hauts et des bas». Pour Gaston Reinesch, «le moment le plus difficile» a certainement été la crise de 2012, dite de la «dette souveraine», mettant la monnaie européenne ainsi que la solidarité des pays de l’Union à rude épreuve.

Pour les 20 années à venir, Gaston Reinesch voit l’euro entrer dans «l’âge adulte». Avec peut-être comme rite initiatique la renégociation au programme du pacte de stabilité et de croissance.

Cet article est issu de la newsletter Paperjam Finance, le rendez-vous mensuel pour suivre l’actualité financière au Luxembourg.