Le secteur de la banque privée atteignait quasiment les 400 milliards d’euros d’actifs gérés à fin 2018. Les acteurs luxembourgeois se focalisent désormais de plus en plus sur le segment des ultra-riches.

«En 2008-2009, c’était le début des coups de boutoir vis-à-vis du secret bancaire et beaucoup de Cassandre prédisaient la fin du secteur bancaire luxembourgeois. C’est tout le contraire qui est arrivé», a déclaré , administrateur délégué de Pictet & Cie Europe, lors du  de la banque privée, mardi 10 septembre.

Fin 2018, les actifs gérés par les 57 membres du cluster Private Banking Group de l’ABBL (Association des Banques et Banquiers, Luxembourg) s’élevaient à 395 milliards d’euros, en hausse de 76% par rapport à 2008 (225 milliards d’euros).

2018 signe donc une dixième année consécutive de croissance des actifs gérés. Et les banquiers privés ne comptent pas en rester là: «Même si nous sommes très dépendants de l’évolution des marchés, il faut avoir de l’ambition. Une croissance de l’ordre de 10% par an serait un objectif motivant», estime Pierre Etienne.

Cap sur les ultra-riches

Cette évolution positive résulte notamment de l’environnement politique du pays, dont la par différentes agences de notation. Mais aussi de la maîtrise de l’activité transfrontalière par les banquiers privés. «Cette faculté nous rend uniques en Europe, voire dans le monde», confirme Pierre Etienne.

L’activité reste cependant focalisée sur l’Europe: plus de 80% des actifs de la clientèle en sont en effet issus.

Quant à la typologie de clientèle, elle progresse résolument vers le segment des «ultra-riches», qui augmente depuis 2014, tandis que la part des clients détenant moins d’un million d’euros décroit.

Sur cette dernière tranche, «beaucoup de clients se sont relocalisés dans leur pays d’origine et font appel à des banques domestiques, qui investissent davantage sur ce segment. Le Luxembourg se spécialise de plus en plus sur la clientèle qui détient plus de 20 millions d’euros d’actifs, d’autant plus que nous avons de moins en moins de compétiteurs sur ce marché», affirme Pierre Etienne.

La bonne santé de la banque privée luxembourgeoise ne doit pas occulter les nombreux défis auxquels elle doit faire face.

À commencer par l’érosion des marges, due à la fois à l’environnement de taux d’intérêt bas, à la baisse des revenus liés aux commissions, et aux coûts relatifs à la mise en conformité réglementaire.

Taille critique

Concernant les taux bas, les banquiers privés réfléchissent à la manière de traiter au cas par cas les clients qui disposent d’une grande partie de leurs avoirs en cash, ce qui pénalise aujourd’hui les banques. «Il n’est pas exclu qu’il y ait un retransfert de coût vers le client», lance Pierre Etienne.

Avant d’ajouter: «Pour faire face à la détérioration de la profitabilité, il faut atteindre une taille critique. Le secteur est donc en . À terme, dans ce domaine, seuls les acteurs importants pourront survivre».

Les banquiers privés se préparent enfin à la visite du Gafi (Groupe d’action financière) en 2020, qui viendra évaluer la conformité du secteur financier en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.

«Si un acteur luxembourgeois a un ‘accident’ en la matière, s’il y a une brebis galeuse, c’est toute la Place et tout le pays qui en pâtira», prévient Pierre Etienne.