Christian Point, partner Real Estate chez Arendt. (Photo: Focalize)

Christian Point, partner Real Estate chez Arendt. (Photo: Focalize)

Dans le cadre de l’événement Paperjam’s 3rd Real Estate Seated Dinner Party organisé ce 27 septembre, Christian Point, partner Real Estate chez Arendt, partage avec nous son analyse des grandes tendances du marché immobilier luxembourgeois et ses évolutions.

Quelle est votre analyse du marché immobilier actuel? Quelles sont les perspectives d’évolution?

. – «Le constat est certainement général en ce qui concerne l’état du marché immobilier luxembourgeois actuel: celui-ci est sinistré quel que soit le secteur dont on parle (immobilier résidentiel ou immobilier professionnel) et quels que soient les domaines d’activité de ce marché immobilier (construction, promotion, investissement, transaction et financement…).

En ce qui concerne le secteur résidentiel, il convient de distinguer deux catégories d’acquéreurs: d’une part, les ménages souhaitant faire l’acquisition d’un logement pour leurs propres besoins, et, d’autre part, les investisseurs dont l’objectif est de proposer les logements à la location.

Pour la première catégorie, l’augmentation des taux d’intérêt a diminué la capacité de financement des ménages, si bien que bon nombre de logements ne trouvent pas acquéreurs en raison d’une inadéquation de leurs prix avec ladite capacité de financement.

On pourrait, de façon simpliste, imaginer que les prix proposés par les promoteurs pourraient être revus à la baisse; néanmoins, les coûts d’acquisition du foncier pour de tels projets et l’augmentation des coûts de construction expliquent et justifient que les prix de commercialisation ne puissent être que difficilement revus à la baisse.

Il en découle que ce marché est à l’arrêt et que les projets qui n’ont pas été réalisés restent dans les cartons, tandis que des stocks de logements restent invendus, voire inoccupés. Au regard du fort besoin de logements, ceci paraît pour le moins paradoxal et particulièrement inquiétant.

Ceci nuit à l’attractivité du pays pour les talents dont celui-ci a besoin en particulier pour son poumon économique que constitue la place financière.

De même, certaines incertitudes politiques pèsent sur le cadre juridique et fiscal de la location de logements, par exemple, le plafonnement des loyers, ce qui rend les investisseurs frileux à s’engager dans le secteur résidentiel.

En ce qui concerne le secteur de l’immobilier professionnel, toujours en raison de l’augmentation des taux d’intérêt, on constate un décrochage des valorisations par rapport à celles d’il y a deux ou trois années (avec une augmentation des «yields» réclamés par les acquéreurs, ceci se traduisant par une diminution des valorisations et des prix de transaction).

En conséquence, ce marché est actuellement quasi inexistant (sauf pour quelques acquisitions de pure opportunité ou s’inscrivant dans un contexte de «fire sale») en raison de l’inadéquation entre ce que des acheteurs seraient prêts à offrir comme prix et ce que des propriétaires conservent comme expectative (en raison des valorisations historiques).

En l’absence de transactions, on assiste à des renouvellements de financement qui interviennent dans un contexte particulièrement délicat et, comme on l’a vu, dans un contexte baissier au regard des valorisations.

Quels sont les métiers de l’immobilier qui ont été les plus touchés par la conjoncture économique récente? Lesquels ont le mieux résisté?

«Tous les métiers ont été et sont impactés par la diminution des activités liées à l’immobilier:

– tout le domaine de la construction, ce qui signifie les entreprises de construction, mais également les architectes, les bureaux d’études, etc.;

– tout le domaine de la promotion immobilière et de la commercialisation, par exemple les agents immobiliers;

– mais également les notaires et toutes les activités de conseil qui accompagnent ces opérations.

C’est donc tout un secteur d’activité qui est concerné.

Comme évoqué précédemment, au-delà de l’impact sur ces différents secteurs d’activité, la situation a pour effet d’augmenter le besoin de logements et de nuire à l’attractivité du pays.

Chacun dans son entourage a connaissance de personnes rencontrant des difficultés à trouver un logement.

La situation est encore plus délicate pour les nouveaux arrivants et en particulier les jeunes diplômés et futurs talents qui sont pourtant essentiels pour le pays et sa place financière.

Face à cette situation, l’investissement public lié au logement a été sollicité, mais la réponse semble encore insuffisante pour combler la baisse fulgurante de l’investissement privé et surtout pour ranimer un secteur qui apparaît comme paralysé.

Comment le développement technologique et les nouvelles tendances d’urbanisation influencent-ils le secteur immobilier au Luxembourg? Quelle tendance pour le futur?

«Redynamiser le secteur passe certainement par différentes solutions.

En termes de construction, on peut imaginer de possibles gains de temps de réalisation induits par la digitalisation et la préfabrication qui sont deux pistes qui devront être exploitées pour l’avenir.

Il conviendra également de réduire les délais d’instruction des projets et les délais d’obtention des autorisations qui sont mentionnés de façon récurrente comme étant des freins par les acteurs du secteur.

Il conviendra également de réfléchir à augmenter les densités et à permettre à certains quartiers ou certaines zones dédiés à de l’immobilier de bureaux de recevoir et d’accueillir des surfaces de logement en quantité substantielle.

L’intérêt serait de proposer des surfaces de logement additionnelles et de permettre une proximité entre logement et travail.

Offrir un cadre juridique et fiscal stable et rassurant permettra d’attendre un rôle accru de la part des investisseurs institutionnels ou de la part de family offices pour de grands projets de logements, voire pour de nouvelles formes d’occupation et de partage comme le coliving ou des structures parahôtelières d’occupation à moyenne ou longue durée.

Il conviendra peut-être que le droit s’adapte à la recherche par les occupants d’une flexibilité accrue ainsi qu’à l’influence que le télétravail sera susceptible d’avoir sur le logement et le rapport que les personnes ont avec celui-ci.»

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