L’exposition «Stëmme vun der Schmelz» permet de comprendre la vie au cœur de l’usine de Dudelange. (Photo: Jean-Pierre Conrardy/Fonds HISAFD Claudine Wolff – Collection du CNA)

L’exposition «Stëmme vun der Schmelz» permet de comprendre la vie au cœur de l’usine de Dudelange. (Photo: Jean-Pierre Conrardy/Fonds HISAFD Claudine Wolff – Collection du CNA)

Il y a 140 ans, la première usine sidérurgique intégrée ouvrait ses portes au Luxembourg, à Dudelange. L’exposition «Stëmme vun der Schmelz» témoigne de cette histoire industrielle importante pour le pays et donne la parole aux anciens ouvriers.

La «Forge du Sud» a été pendant de très nombreuses années une grande fierté à Dudelange. Cette usine sidérurgique a en effet été la première usine intégrée du pays, combinant hauts fourneaux, aciérie et laminoir. 40 ans après la fermeture définitive de ce site industriel d’envergure, l’exposition «Stëmme vun der Schmelz» rend hommage à cette vie si singulière au cœur de cette fabrique du fer.

Il faut souligner que les commissaires Daniela Del Fabbro, Michel Feinen et Sandra Schwender ont mené un travail sensible et ambitieux pour réaliser cette exposition. En s’appuyant à la fois sur les archives du Centre national de l’audiovisuel (dans le cadre du projet «our archives.your story») et sur un ensemble de documents récoltés suite à un appel aux dons, l’équipe curatoriale a rassemblé de nombreux témoignages et documents permettant de faire revivre ce qu’était la vie à l’usine. Et c’est sur le site même de la Schmelz, au sein de la Pomhouse et du Waassertuerm du CNA, qui fêtent d’ailleurs cette année leur 10e anniversaire d’ouverture, que l’exposition est développée en plusieurs étapes.

 

La première station se trouve dans le socle du château d’eau. Une série de 19 portraits réalisés par Armand Quetsch donne un visage aux ouvriers qui racontent leur histoire. En vis-à-vis, un immense diagramme permet de mettre en parallèle l’évolution de l’usine et celle de la population ou encore le développement urbain du site pour pouvoir à la fois suivre l’évolution de l’usine, celle de Dudelange et les grands faits marquants du pays.

Puis, après avoir pris l’ascenseur, on arrive dans la cuve du château d’eau où un film retraçant de manière condensée le développement et le déclin de l’usine est diffusé sur un écran panoramique. Il faut saluer ici l’excellent travail de montage visuel et sonore qui prend le spectateur par la main pour le plonger pleinement dans cette histoire à la fois rude et tellement humaine.

En redescendant par l’escalier, les visiteurs peuvent prendre conscience de l’étendue du site et sont accompagnés par une bande-son telle une litanie industrielle, avant d’entrer dans la station de pompage.

Là, le propos se concentre sur la vie quotidienne des ouvriers, mais aussi sur les difficultés qu’ils ont rencontrées, le tout raconté par les anciens employés eux-mêmes: la vie conviviale entre les ouvriers, les processus de fabrication et les savoir-faire, les questions de sécurité au travail et de pollution, la place des syndicats… Tout au long du parcours, on retrouve des objets et souvenirs qui témoignent de la vie de l’usine. Une usine dont on était fier, qui fut un temps à la pointe de la technologie, employant au sommet de son activité plus de 4.000 personnes, mais aussi un lieu de travail et une activité dangereuse, abîmant le paysage et les hommes, qui a subi la crise, jusqu’à son démantèlement.

Aujourd’hui, le site est en cours de réaffectation pour devenir , un nouveau quartier urbain porté par la Ville de Dudelange et le Fonds du logement. Il fait partie des grands projets soutenus par l’État pour transformer les anciennes friches industrielles en quartiers mixtes accueillant une grande part de logements abordables. Le travail de mémoire qui a été fait ici est tout à fait remarquable et très bien transmis au public. L’exposition permet à la fois d’aborder de manière historique ce site et l’activité qui s’y est déroulée, mais sans jamais occulter l’aspect humain, avec des témoignages personnels, des anecdotes, des histoires intimes partagées avec sincérité. Il serait intéressant qu’une fois cette exposition finie, le travail fourni ne se perde pas et puisse être intégré d’une manière ou d’une autre au nouveau quartier, pour que les futurs habitants du Neischmelz connaissent l’histoire du lieu dans lequel ils vivent.

Par ailleurs, cette exposition peut aussi être vue en complément de celle présentée actuellement dans la Massenoire à Belval, , dédiée à la vie industrielle dans la région de la Minett, l’usine de Dudelange étant l’une des usines présentes sur ce territoire. Ces deux expositions s’inscrivent d’ailleurs dans le programme d’Esch2022 qui a pour ambition de faire découvrir l’histoire du sud du Luxembourg.

«Stëmme vun der Schmelz», jusqu’au 1er janvier, Waassertuerm et Pomhouse du CNA.