La hausse des bénéfices des entreprises va soutenir les marchés actions pour encore de long mois. (Photo: Shutterstock)

La hausse des bénéfices des entreprises va soutenir les marchés actions pour encore de long mois. (Photo: Shutterstock)

Pour les mois à venir, la BIL table sur la poursuite de l’actuel scénario positif pour les actions et ne voit dans l’actuelle poussée d’inflation qu’un phénomène temporaire.

Pour Ilias Abou Haidar, senior investment advisor chez Belair House, le family office filiale de la BIL, toute la question que doivent se poser les gestionnaires d’actifs est de savoir si nous ne sommes pas en train de basculer d’une phase de normalisation de l’activité économique vers une phase inflationniste qui remettrait en cause la vision que l’on peut avoir de l’économie et des marchés.

Du côté de la BIL, on a tranché et on se rallie au scénario consensuel: celui d’une inflation temporaire. «S’il demeure des risques liés à l’inflation, nous ne pensons pas que nous allons entrer dans une spirale inflationniste qui va requérir un resserrement monétaire. On peut s’attendre à des pics de volatilité qui viendront des poussées d’inflation qui, vu notre scénario central, n’engendreront pas d’accidents sur les marchés.» Pour Ilias Abou Haidar, l’inflation ne deviendra structurelle que lorsque l’on sera dans une situation de plein emploi. Ce qui n’est pas encore le cas.

Le trublion inflation écarté, et donc le spectre d’un resserrement des politiques budgétaires et monétaires, l’environnement macroéconomique reste porteur pour les actions.

Croissance solide, mais désynchronisée

Pour ce qui est de la croissance, elle est au rendez-vous. Les anticipations de croissance économique formulées par le FMI – 6% au niveau mondial en 2021 et 4,4% en 2022 – rejoignent le consensus de marché. «Nous avons devant nous des taux de croissance extrêmement élevés – respectivement 5,1% et 3,6% en 2021 et 2022 pour les économies développées; 6,4% et 3,5% pour les États-Unis, 4,4% et 3,8% pour la zone euro, 6,7% et 5% pour les pays émergents, et 8,4% et 5,6% pour la Chine – que l’on ne peut plus imputer à un effet de rattrapage post-crise, mais à la seule force du cycle économique attendu pour les deux années à venir.»

Dans le détail, la croissance américaine est portée par la consommation et les investissements, ce qui se traduira par une forte hausse des importations et un creusement du déficit commercial, alors que la croissance européenne sera portée, outre par la consommation et les investissements, par les exportations. «Le monde extérieur sera un moteur de croissance pour la zone euro.»

Fait marquant, si la croissance est de retour au niveau mondial, les performances ne seront pas homogènes en termes de zones géographiques. «Un phénomène que l’on peut relier directement aux performances des pays en matière de vaccination.»

Les performances vaccinales influent également sur le rendement des marchés actions. «Les deux marchés qui surperforment actuellement sont les États-Unis et l’Europe. Dans une phase haussière d’un cycle, on s’attend à ce que ce soient les pays émergents qui prennent la tête. Ce n’est pas le cas, et cela s’explique par le fait que le déploiement des programmes de vaccinations a été beaucoup plus rapide dans les pays développés, ce qui a permis une réouverture beaucoup plus rapide, et donc une normalisation des économies. Cela explique la capacité des entreprises à générer des bénéfices bien plus forts cette année aux États-Unis et en Europe que dans les zones émergentes.»

Les obligations toujours à la traîne

Pour lui, cette croissance n’est pas due à une euphorie ou à une quelconque précipitation: il y a une poussée fondamentale qui est réelle derrière. «La force de la dynamique des marchés actions a un substrat fondamental qui est très fort.»

Mécaniquement, cela va entraîner une hausse de la confiance des analystes et des investisseurs, ce qui dans un environnement de reprise de la croissance économique va reléguer au second plan les craintes relatives aux valorisations des marchés. Et si les valorisations des actions sont de facto très élevées, cette question passe au second plan.

Du côté des obligations, la situation est moins reluisante. «Il n’y a pas beaucoup à en attendre», estime Ilias Abou Haidar, qui parie sur la poursuite de la croissance des taux longs – «c’est intéressant pour les investisseurs futurs, mais pour ceux qui détiennent des obligations aujourd’hui, cela va se traduire par des pertes en capital pour les mois à venir» – et sur une stabilité des taux courts – «ce qui pénalise les investisseurs qui ont du cash à placer à court terme». 

Cette situation «challenging» pour les investisseurs est une bouffée d’oxygène pour les banques. «Avec un coût du capital qui reste adossé aux taux courts, et donc stables, et des prêts à long terme dont les revenus générés sont adossés aux taux longs, les perspectives s’améliorent sur les marges d’intérêt.»

Et si on peut trouver du rendement sur les obligations corporate de bonne qualité (investment grade), celui-ci reste faible. De 2,2% aux États-Unis à +0,4% en Europe.

Allocations géographiques et sectorielles

«Le choix des actions étant acté, les performances restent tributaires des choix géographiques et sectoriels. En terme régional, on aime bien les États-Unis et la Chine pour la robustesse du cycle économique, et surtout, pour les États-Unis, que la sortie de crise est très franche. Récemment, nous avons augmenté notre exposition à l’Europe pour acter l’amélioration macroéconomique constatée et prévue en relation directe avec le fort effort de vaccination fait par les pays européens.»

En matière de style de gestion, Ilias Abou Haidar préfère les secteurs cycliques et le style «value» au style «growth». Et pour ce qui est des secteurs d’activité, il privilégie la consommation discrétionnaire pour privilégier des programmes de soutien fiscaux, de l’amélioration de l’emploi et de l’épargne excédentaire accumulée par les ménages, le secteur des matériaux de base dans un contexte de renchérissement des matières premières et le secteur des services aux collectivités dans une optique à moyen terme liée au développement des énergies renouvelables.

Enfin, il privilégie les entreprises ayant la capacité de répercuter les hausses de leurs coûts. Un plus dans une période d’inflation.