Corinne Lozé ne se sépare jamais de sa veste en daim pour voyager. (Photo: Andrés Lejona/Maison Moderne)

Corinne Lozé ne se sépare jamais de sa veste en daim pour voyager. (Photo: Andrés Lejona/Maison Moderne)

La CEO d’Orange Luxembourg, Corinne Lozé, conserve un rapport prudent à l’argent, qu’elle utilise avant tout de façon dématérialisée.

Avez-vous une devise ou un principe par rapport à l’argent?

– «Aucun. Je réfléchis toujours et je ne suis pas dépensière. À un certain niveau de res­ponsabilité, l’argent permet de s’octroyer des petits extras qui font plaisir tout de même… Il ne faut pas forcément de l’argent pour se faire plaisir. J’ai par exemple le plaisir de me réunir en famille autour d’une table.

Vous souvenez-vous de votre premier salaire et de ce que vous en avez fait?

«Oui, c’était à l’époque où je ­travaillais à l’ambassade d’Égypte au Mali (où Mme Lozé a grandi, ndlr), je devais avoir 19 ans environ. J’ai acheté un billet d’avion pour la Grèce, c’était mon premier voyage et j’en garde un beau souvenir, c’était génial.

Votre rapport à l’argent a-t-il évolué avec votre carrière?

«Pas au fil de ma carrière, mais plutôt de ma famille. Lorsque vous avez des enfants et des petits-enfants, vous commencez à vous poser la question de comment les aider et les rassurer, c’est plutôt cela mon angle de réflexion: m’assurer qu’ils ne manquent de rien.

Leur inculquez-vous certaines valeurs autour de l’argent?

«Oui, d’abord je leur apprends que l’argent nécessite de l’investissement dans le travail, que ce n’est pas très facile d’avoir beaucoup d’argent. J’essaie de leur apprendre qu’ils ont de la chance: ils vivent à Paris, et je compare avec ­Bangui (la capitale de la République centrafricaine, ndlr), où les en­fants ont ­beaucoup plus de mal. J’essaie de leur faire percevoir ce décalage qui existe dans le monde.

Vous avez voyagé dans votre carrière entre l’Europe et l’Afrique. Y a-t-il un objet dont vous ne vous êtes jamais séparée?

«Oui, je ne peux pas prendre l’avion sans la même veste en daim qu’il y a 20 ans. Cela ne s’explique pas. Elle m’a été offerte et, à mes yeux, c’est quelque chose qui me protège.

Qu’a-t-elle de si particulier?

«Rien de spécial. C’est une belle veste en daim beige magnifique. Vous avez lancé Orange Money en Centrafrique, la solution de transfert d’argent sur mobile d’Orange en 2016.

Vous êtes pro-monnaie dématérialisée?

«Je n’ai que ça! J’utilise des transferts d’argent, Payconiq et je n’ai jamais de cash sur moi, à l’exception de quelques pièces jaunes pour prendre mon café au distributeur. En Europe, il semble que l’adoption du paiement mobile soit moins rapide qu’en Asie ou en Afrique.

Que vous inspire ce décalage?

«L’Europe a des habitudes ancrées alors qu’en Afrique, les solutions de paiement mobile répondent vraiment à un besoin et un enjeu. Le taux de bancarisation est largement plus faible, les distances et les difficultés de transport font que ces formules mobiles sont tout à fait adaptées, sans oublier que, pour les commerçants, cela leur évite d’avoir de l’argent sur eux.

Qu’est-ce que l’argent ne peut acheter?

«Pas mal de choses. Pour moi, la seule chose qui importe dans l’argent, c’est que cela peut donner le choix: j’accorde une certaine importance dans le fait d’avoir le choix, le fait d’avoir une certaine liberté.

L’argent est-il tabou?

«Non, pas du tout. L’argent n’est pas quelque chose qui m’a ­guidée dans ma vie. Ce qui m’a guidée, c’est plutôt le fait d’apprendre des choses et de découvrir des cultures. J’évolue dans un secteur et un métier que j’adore et, au fond, c’est toujours cela qui m’a guidée plus que l’argent.»

Cette interview a été rédigée pour parue le 16 décembre 2021.

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