Claude Marx, directeur général de la CSSF, a exprimé son scepticisme à l’égard des cryptomonnaies lors d’une conférence de l’Association luxembourgeoise des fonds d’investissement, le 22 mars 2022. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne/Archives)

Claude Marx, directeur général de la CSSF, a exprimé son scepticisme à l’égard des cryptomonnaies lors d’une conférence de l’Association luxembourgeoise des fonds d’investissement, le 22 mars 2022. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne/Archives)

Seules des parties limitées de fonds d’investissement luxembourgeois ont été suspendues en raison de la crise russe, a déclaré le directeur de la CSSF. Lors d’une conférence sur la gestion d’actifs, Claude Marx a également mis en garde contre l’écoblanchiment et s’est dit préoccupé par les changements potentiels des règles de délégation de l’UE.

Seuls 61 des compartiments de fonds d’investissement luxembourgeois, dont quelque 15.000 domiciliés au Grand-Duché, sont fortement exposés au marché russe, assure , directeur général de la Commission de surveillance du secteur financier (CSSF).

Il s’est exprimé lors de la conférence European Asset Management de l’Association luxembourgeoise des fonds d’investissement, qui s’est tenue mardi au Kirchberg.

Selon les enquêtes quotidiennes de la CSSF, les rachats ont été gelés pour 41 de ces 61 compartiments de fonds, un nombre plus élevé que pendant les premières semaines de la crise du Covid, a-t-il déclaré. Les actifs sous-jacents ne sont pas négociables ou se négocient avec une forte décote, ce qui est évidemment une «préoccupation» pour ces investisseurs. Toutefois, le régulateur n’a pas constaté «d’autres situations de liquidité», qui sont apparues en mars 2020.

Claude Marx a cité les sanctions de l’UE contre les intérêts russes en rappelant aux sociétés de fonds et aux prestataires de services que «tous les acteurs» ont leur rôle à jouer dans l’application des mesures. «C’est votre propre réputation» et «la réputation du Luxembourg» qui sont en jeu, a-t-il averti. Il n’aimerait pas découvrir à travers la presse des affaires concernant des investissements sanctionnés.

La finance durable

L’écoblanchiment, qui consiste à prétendre que des investissements sont respectueux de l’environnement alors que ce n’est pas le cas, est une source d’inquiétude. Claude Marx a admis qu’il n’existait «aucune définition fixe» de ce qu’est le blanchiment écologique, mais il «pense que nous n’en avons pas besoin». Les entreprises qui font de l’écoblanchiment se livrent, dans le meilleur des cas, à une «fausse déclaration» et, dans le pire des cas, elles «pourraient faire de la vente à perte».

Il a noté la publication de la version – normalement – finale des normes techniques réglementaires pour le règlement de l’UE sur la divulgation des informations relatives au financement durable. Il s’attend à ce que les règles, déjà deux fois retardées, entrent en vigueur le 1er janvier 2023.

Dans ses commentaires, Claude Marx a répondu aux critiques concernant les règles d’investissement vert de l’UE, qui, selon de nombreux acteurs du secteur, sont peu claires et incomplètes. Son conseil aux sociétés de fonds: «Ne passez pas trop de temps sur ce qui n’est pas parfait… les régulateurs n’attendront pas de vous que vous fassiez l’impossible.» «Concentrez-vous sur ce qui est clair et ce qui est nécessaire», principalement en identifiant les sources de données et en utilisant les informations qui en découlent, a-t-il ajouté.

Révision de la réglementation

Claude Marx a commenté l’actuelle «révision ciblée» par la Commission européenne des règles relatives aux OPCVM (fonds de détail) et aux fonds d’investissement alternatifs (pour les investisseurs professionnels). Le principal signal d’alarme étant les changements potentiels par rapport aux règles sur la délégation et la substance. Celles-ci permettent à des fonctions d’être exécutées dans différents pays en même temps. La Commission a proposé de limiter le nombre de fonctions pouvant être «déléguées» à d’autres unités opérationnelles ou à des prestataires de services en dehors du pays d’origine d’un fonds, ce qui est extrêmement courant pour les fonds domiciliés au Luxembourg. Se concentrer sur ces paramètres «quantitatifs vs qualitatifs» n’est «pas utile», a affirmé Claude Marx.

Il s’est ensuite penché sur la révision des règles européennes relatives aux fonds Eltif, qui étaient censées stimuler les investissements dans les infrastructures, mais qui ont été sous-utilisées. La réforme proposée ouvrirait cette catégorie à certains investisseurs de détail. Claude Marx assure qu’en principe, ils accueillent favorablement ces changements. Cependant, il est conscient que les investisseurs de détail devront être formés sur la façon dont les rachats fonctionnent pour ce type de fonds. En effet, la plupart des Eltif sont des fonds fermés que les investisseurs individuels n’ont peut-être jamais utilisés auparavant.

Numérisation

La CSSF est «technologiquement neutre», a commenté Claude Marx, interrogé sur les actifs numériques. Il voit une différence massive entre les investisseurs de détail et les investisseurs institutionnels qui se lancent dans les cryptoactifs. Les fonds Ucits devraient rester bloqués pour investir dans les cryptomonnaies, a-t-il dit. Selon lui: «Une cryptomonnaie n’est pas une monnaie.»

Il est moins préoccupé par les fonds alternatifs qui investissent directement dans les cryptoactifs, mais il note que les fonds et les prestataires de services doivent effectivement demander une autorisation préalable.

Quant à la tokénisation des instruments financiers d’entités financières, il estime que «d’énormes changements d’infrastructure sont nécessaires», mais ce n’est «pas un obstacle en ce qui concerne la CSSF».

Cet article a été rédigé par  en anglais, traduit et édité par Paperjam en français.