Fièvre inflationniste, sécurité énergétique, guerre en Ukraine, goulots d’étranglement des chaînes d’approvisionnement… Le cycle de l’actualité des marchés financiers ne manque pas de diversité. Pour autant, l’annonce de Gazprom de à la Pologne et la Bulgarie, le 27 avril, rajoute encore davantage du carburant aux incertitudes macroéconomiques en Europe.
Même si la Commission européenne a dénoncé le «chantage au gaz» et a promis «une réponse coordonnée», cela n’empêchera pas l’économie d’absorber les conséquences d’un tel choc. Un commentaire publié le 28 avril par l’agence de notation DBRS Morningstar met justement en exergue l’impact pour l’industrie bancaire européenne.
«En cas de suspension de l’approvisionnement en gaz russe, les banques européennes auraient une capacité encore plus limitée à distribuer des dividendes et les banques dont les coussins de capital sont serrés pourraient devoir puiser dans leurs réserves de capital», commente l’agence de notation.
DBRS Morningstar note également que le risque de rupture d’approvisionnement en gaz russe viendrait s’ajouter au fait qu’«avec le ralentissement de l’activité économique, les banques européennes vont probablement générer des bénéfices plus faibles et pourraient finir par revoir leurs plans de distribution de dividendes et de rachat d’actions».
Tant que le conflit ne dure pas
Alors que le Fonds monétaire international réduisait le 19 avril sa perspective de croissance pour la zone euro en 2002 de 3,9% à 2,8%, DBRS Morningstar indique qu’en cas de prolongation du conflit opposant l’Ukraine à la Russie, la croissance du PIB ne pourrait être que de 0,3% finalement. Ce serait le résultat de nouvelles sanctions et de pénuries d’énergie possibles, une substitution complète au à d’autres sources énergétiques restant un défi complexe en un court laps de temps.
L’évolution du conflit armé en Ukraine met déjà fortement les institutions bancaires européennes sous pression. L’un des principaux facteurs de pression pour les banques sont les expositions directes aux emprunteurs russes et ukrainiens. Dans une analyse du 16 mars, DBRS Morningstar identifiait que «la plupart des banques européennes ont réduit leur exposition à la Russie depuis l’invasion de la Crimée en 2014».
Cependant, DBRS Morningstar affirmait que le conflit a augmenté le risque de crédit et de marché pour certaines banques ainsi que le risque opérationnel pour le secteur bancaire européen dans son ensemble. Les expositions directes semblaient donc «gérables» aux yeux de l’agence de notation, mais les répercussions sur les établissements de crédit «dépendront largement de la durée du conflit et de l’impact sur les économies européennes».
Le marché des dérivés de matières premières revêt une importance particulière. (…) Jusqu’à présent, les chambres de compensation n’ont pas signalé de risque de défaillance notable parmi leurs membres en raison de marges.
Bien que contenus à l’heure actuelle, les risques pour les banques au niveau des marchés énergétiques restent sur le radar de la Banque centrale européenne (BCE). En réponse à une question du Parlement européen, Andrea Enria, président du supervisory board de la BCE, indiquait dans une lettre, en date du 19 avril, que «le marché des dérivés de matières premières revêt une importance particulière». Ceci en raison de l’importance de la Russie en tant qu’exportateur d’énergie et d’autres matières premières. «Jusqu’à présent, les chambres de compensation n’ont pas signalé de risque de défaillance notable parmi leurs membres en raison de marges», ajoutait alors Andrea Enria.
Une génération négative de capital
Le président du supervisory board de la BCE souligne par ailleurs que «l’exposition au crédit de certaines banques de la zone euro dans le secteur des matières premières mérite également d’être surveillée de près, étant donné qu’environ un tiers du volume actuel des prêts en cours aux sociétés de négoce de matières premières, au niveau mondial provient de prêteurs de la zone euro».
Si le choc d’approvisionnement en gaz se matérialisait, la génération de capital serait négative.
Jusqu’à présent, DBRS Morningstar s’attend que la plupart des systèmes bancaires en Europe soient soumis à une génération de capital au cours de 2022 plus faible que prévu initialement. Toutefois, la situation pourrait dégénérer: «Si le choc d’approvisionnement en gaz se matérialisait, la génération de capital serait négative».
Un tel scénario n’est pas sans rappeler, qu’au Luxembourg, , déclarait Guy Hoffman, le président du conseil d’administration de l’ABBL, le 27 avril. Depuis 2016, ce dernier indique que la rentabilité des actifs (ROA) a entamé une tendance constante à la baisse. De 0,62%, la ROA des établissements de crédit de la Place est passée à 0,36%