Beaucoup d’acteurs ont une offre pour les entreprises. C’est un peu difficile de s’y retrouver, non?
Anne-Marie Loesch (A.-M. L.). – «La House of Sustainability offre justement une porte d’entrée pour toutes les entreprises, face à une inflation réglementaire. Pour certaines aides, nous faisons nous-mêmes les dossiers pour le ministère de l’Économie, comme l’aide temporaire environnementale, les SME Packages Sustainability ou le Starter Kit. Six conseillers peuvent guider les entreprises.
Est-ce que toutes ces offres font qu’il y en a de plus intéressantes que d’autres pour les entreprises?
Gilles Reding (G. R.). – «À la Chambre des métiers, selon les derniers chiffres, de 2022, il y a 77 % de microentreprises, qui comptent moins de dix salariés. Notre approche est plutôt d’aller dans les entreprises, depuis cinq ans, pour sensibiliser et informer au sujet de la digitalisation et, depuis l’année dernière, sur le développement durable. Quatre personnes proposent une offre de contenus que les petites entités peuvent digérer. Elles ont visité 150 entreprises l’an dernier. La demande est de plus en plus forte, notamment sur la décarbonation. Le prix de l’énergie change la donne mais aussi la pression qui vient de tous les côtés, du salarié, des banques, etc.
Où en est-on? Est-ce qu’il y a «assez» d’entreprises qui s’y mettent?
A.-M. L. – «Il y a des pionniers sur le sujet, de grandes entreprises qui sont plus exposées à des contraintes réglementaires, et l’enjeu est de créer un effet de masse qui entraîne le plus grand nombre d’entreprises.
G. R. – «Nous demandons une réforme de la loi « environnement » depuis un moment. Il y a eu l’aide temporaire impact environnemental, qui est un peu plus généreuse… mais qui s’arrête fin décembre. Nous espérons soit qu’elle sera prolongée, soit qu’il y aura une réforme de la loi, notamment pour la rénovation énergétique des bâtiments. Nous sommes demandeurs d’un régime d’aides correct.
A.-M. L. – «C’est une aide qui est très intéressante en termes de taux de participation, qui s’adresse à toutes les entreprises, pour avoir une participation conséquente à leur investissement. De plus en plus de dossiers entrent, que ce soit pour l’installation de panneaux photovoltaïques, pour des rénovations énergétiques ou des équipements industriels. Les entreprises sont volontaires mais elles ont besoin d’être épaulées.
Dans les pays limitrophes, l’infrastructure n’est pas toujours adaptée.
Selon vos retours du terrain, où sont les points de blocage, la charge administrative, les finances? Ou l’offre qui peut convenir, par exemple, à une entreprise qui voudrait acheter des bus électriques mais ne les trouve pas sur le marché?
G. R. – «Sur les camions, non, il n’y a pas assez d’offres sur le marché. Le prix est le triple ou le quadruple… Ce n’est pas très rentable. Il faut attendre que le marché se développe. Nous sommes sur un bon rythme de croisière en ce qui concerne l’installation des bornes de recharge.
A.-M. L. – «Par rapport à 2019, fin 2023, près d’un quart des nouvelles immatriculations sont électriques. Pour les flottes, ça prend plus de temps. Il y a d’autres éléments à considérer comme la recharge, l’organisation et le change management. Dans de grandes entreprises, de nouveaux fleet managers sont mis en place pour gérer ces questions.
G. R. – «Dans l’artisanat, vous avez 52% de frontaliers qui, souvent, rentrent avec la camionnette pour ne pas perdre en productivité et, dans les pays limitrophes, l’infrastructure n’est pas toujours adaptée. Ce n’est pas évident de charger son véhicule. Il y a un boost à attendre des développements des infrastructures de recharge.
Et les autres points de blocage?
G. R. – «C’est très variable selon la taille des entreprises. Les entreprises sont un peu fragilisées par les multiples crises depuis quatre ans. Il faut avoir un budget. Oui, il y a aussi les démarches administratives. Nous avons bon espoir que les mesures annoncées par le gouvernement de réduction de 25% des démarches administratives aboutissent. Au niveau de SME Packages, les deux chambres aident à remplir les dossiers, pour des dossiers jusqu’à 25.000 euros.
A.-M. L. – «Même pour l’aide temporaire. Il faut distinguer les investissements dans la mobilité, dans les équipements, dans la rénovation énergétique. Donc comprendre la stratégie de l’entreprise. Celles qui sont soumises à la SFDR, déjà en vigueur, et qui va concerner de plus en plus d’entreprises, devront faire cet exercice d’analyse de la double matérialité, des impacts qu’elles ont, et développer en conséquence des stratégies à long terme. Ce sera aussi un driver pour faire avancer les choses.
Les entreprises font partie de la solution!
Qu’est-ce qu’un entrepreneur doit faire en premier?
A.-M. L. – «Il y a beaucoup d’angles différents selon la situation de l’entreprise. Nous avons un programme d’information et de sensibilisation sur la réglementation, mais aussi sur l’opérationnel, sur les volets stratégiques ou de décarbonation, sur les actions les plus efficaces à mettre en place en fonction de leur activité et de leur secteur. Ça ne sert à rien de travailler sur un sujet alors qu’il n’est pas du tout stratégique.
G. R. – «À l’artisanat, nous proposons la démarche RSE en trois étapes: initiation, analyse et valorisation. Avec un outil en ligne, puis le Starter Kit RSE, financé à 100% par le ministère des Classes moyennes, qui prépare une analyse à partir de cinq jours passés dans l’entreprise par des spécialistes mandatés par l’INDR pour arriver à une labellisation.
Dans la feuille de route de la nouvelle coalition, il y a beaucoup d’aspects liés à cette nécessaire révolution. Qu’en pensez-vous? Quelle est la chose la plus importante à faire?
A.-M. L. – «Il ne faut pas rajouter trop de charge administrative ni de contraintes pour les entreprises. Même chose avec l’électromobilité. Il faut jouer sur les leviers fiscaux pour les entreprises qui investissent dans des technologies plus innovantes et plus propres.»
G. R. – «La bonification d’intérêts pour cette transition doit être encouragée. Nos entreprises sont très intéressées par le photovoltaïque, en autoconsommation, parce qu’elles ont besoin de ce qu’elles pourraient produire!»
La formation, un enjeu clé
«Il y a beaucoup de nouveaux sujets, une nouvelle complexité qui se met en place. Nous travaillons avec la House of Training pour développer cette offre et assurer cette montée en compétences sur tous ces sujets dans un contexte de formation continue», explique Anne-Marie Loesch. «Beaucoup de fonctions sont concernées et vont devoir s’adapter.»
«Ne vous inquiétez pas, on trouve ces profils!», enchaîne Gilles Reding. «Si la demande augmente, l’offre augmente aussi. D’ailleurs, l’artisanat est aussi un acteur de ce changement. Il installe toutes ces nouvelles technologies, les pompes à chaleur ou les panneaux solaires. Dans nos formations sur les pompes à chaleur, nous sommes sold out jusqu’à mi-2025, l’intérêt est très grand.»
Cet article a été rédigé pour l’édition magazine de Paperjam , paru le 27 mars 2024. Le contenu du magazine est produit en exclusivité pour le magazine. Il est publié sur le site pour contribuer aux archives complètes de Paperjam.
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