Le Luxembourg est en manque de main-d’œuvre qualifiée. Son principal défi est de recruter des talents, toujours plus loin, et de les garder. D’ici 2030, le pays aura besoin de 300.000 nouveaux collaborateurs, dont un tiers de nouveaux arrivants. Il faut donc mettre des stratégies en place pour recruter, mais aussi et surtout pour garder les employés. Comment les principaux employeurs du Grand-Duché font-ils? Éléments de réponse.
Recrutement en sept étapes ou en sept jours?
La human resources director d’Amazon Europe, , rappelle que quand vous faites une commande sur leur site, plus de 50 métiers différents peuvent être impliqués dans le processus jusqu’à l’acheminement de votre commande. Ce qui compte pour Amazon, plus que le recrutement, c’est la rétention de ses talents. C’est pourquoi il y a entre cinq et sept entretiens d’embauche avant de faire une offre aux candidats. Pour être sûr d’avoir la bonne personne, puis de lui laisser le choix de changer de carrière au sein de l’entreprise grâce à de multiples formations verticales ou horizontales. De nombreuses opportunités sont mises en place pour permettre aux talents de se développer. Il n’est pas inhabituel, au sein d’Amazon, que des cols bleus accèdent à des fonctions dirigeantes.
La HR marketing project manager de Dussmann, Christelle Noel, débute son discours en nous donnant une mission: trouver 40 agents de sécurité à engager. Tandis que le thème du film «Mission impossible» retentit en fond et que l’expert RH poursuit son discours, la difficulté des missions présentées à l’écran s’intensifie. Ce qu’elle met en avant? Les délais souvent très courts: les recrutements (nombreux) doivent souvent être faits en moins d’une semaine. Comment allier quantité et rapidité, qui plus est lorsque les candidats postulent sans lettre de motivation ou CV standard? Pour répondre à ce défi, un outil interne de gestion des candidatures qui permet de connaître au mieux les candidats (où ils vivent, quand ils peuvent se déplacer) a été mis en place, ainsi qu’une cellule qui fait le lien entre les RH et les opérations sur place. Rajoutons à cela une prévalidation des candidatures (sur un peu plus de 9.000 reçues par an) et une formation directement sur le terrain, et on obtient un résultat assez époustouflant: 1.900 nouveaux employés en 2023.
Réenchanter le travail
C’est ce que propose le human resources director de BGL BNP Paribas, . Après un constat assez parlant: les employés accordent plus d’importance à leur vie privée qu’à leur vie professionnelle. La «hustle culture», qui autrefois était synonyme de surproductivité et d’ultraperformance, a laissé doucement, mais sûrement, sa place à la «break culture», dont l’un des mouvements principaux est le «quiet quitting», qui consiste à ne pas trop en faire au travail. Mais réenchanter le travail, concrètement, ça veut dire quoi?
D’abord, créer un cadre de travail qui donne envie d’être présent au bureau et qui apporte quelque chose en plus que lorsqu’on est en télétravail. Cultiver le collectif en créant – comme c’est le cas chez BGL BNP Paribas – des cercles amicaux ou sportifs dans lesquels les collaborateurs peuvent échanger autour de leurs passions. Et puis, évidemment, redonner du sens au travail en jouant sur l’utilité, les valeurs et le sentiment d’accomplissement du poste envers l’employé lui-même, mais aussi envers la société.
Tous les experts HR présents s’accordent pour dire que connaître les valeurs des employés, donner du sens à leur métier et mettre en place une culture sont des éléments majeurs dans la rétention des talents.
La responsable des ressources humaines de la Fondation Hôpitaux Robert Schuman, Karine Rollot, explique que les applaudissements durant le Covid ont vite laissé place à un désintérêt certain. Les personnels sont désormais confrontés à des incivilités et à un niveau d’agressivité grandissants. Le manque de reconnaissance de la part du grand public, combiné à une perte de vocation, de sens au travail et une fatigue générale font que le métier n’est plus aussi attractif qu’avant. Là encore, la formation est mise en avant à tous les niveaux. Des formations pour gérer les conflits, comme la désescalade, et pour découvrir des métiers émergents tout en travaillant.
Faire ami-ami avec l’IA?
C’est quasi inévitable. Comment aborder cette transition numérique? «L’intelligence artificielle excelle dans les compétences cognitives (analyse de données), alors que l’humain sera toujours meilleur sur des sujets ayant besoin de l’intelligence émotionnelle», explique le deputy head of business unit – HR & People management de la Spuerkeess, Didier Lemeire.
C’est une puissance collective qu’il faut acquérir, et ne pas disqualifier de prime abord ce qui n’appartient pas à l’humain. Humain et IA doivent avancer main dans la main, non en se remplaçant, mais en se complétant dans des tâches différentes.
Le mot de la fin?
Comme le rappelle, la head of people & culture de KPMG Luxembourg, , les HR sont presque des superhéros. Trois quarts se sentent toujours passionnés par leur métier. Un métier polyvalent, très large, qui doit miser sur de nouvelles façons de travailler pour recruter toujours plus de talents et les garder. Pour cela, connaître ses employés, donner du sens à leur travail et garder un équilibre vie privée/vie professionnelle est primordial. Rendez-vous en juillet pour notre afin d’en savoir plus sur le sujet.