Dans une ambiance «dansante et décontractée», environ 310 invités ont célébré le 100e anniversaire de la Conférence du Jeune Barreau de Luxembourg (CJBL), vendredi 16 juin, au Melusina. Le point à cette occasion avec sa présidente, Me Géraldine Mersch.
Comment les missions de la CJBL ont-elles évolué en 100 ans?
Me Géraldine Mersch. – «Le but initial était d’organiser des conférences et joutes oratoires, et d’entretenir le lien avec les Jeunes Barreaux belge et français. Aujourd’hui, les missions sont plus larges. L’asbl défend tous les avocats qui ont moins de 11 ans d’ancienneté à l’un des deux ordres luxembourgeois. Les membres le deviennent d’office à leur inscription. Nous écrivons des avis par rapport à des projets de loi, organisons des événements. Le Barreau nous a délégué la formation continue des avocats.
Que représentent les jeunes avocats?
«Nous sommes 2.111. Sur 3.435 avocats en tout.
Comment ce nombre a-t-il évolué?
«J’ai l’impression que les assermentations sont de plus en plus nombreuses. La semaine dernière a eu lieu la plus importante qu’on n’ait jamais eue, avec 170 personnes. (Ni la présidente, ni le service statistiques du Barreau n’ont pu fournir de données précises sur le nombre de jeunes avocats dans le passé, ndlr.)
L’objectif devrait être que les jeunes avocats restent avocats.
Quels problèmes les jeunes avocats rencontrent-ils aujourd’hui?
«Nous nous battons pour leurs conditions de travail. Un grand volet étant la rémunération. L’objectif devrait être que les jeunes avocats restent avocats.
Quel est le taux de démission des jeunes avocats?
«J’ai l’impression qu’il y a beaucoup de démissions. (Le Barreau compte 946 démissions d’avocats, peu importe l’ancienneté, depuis 2013, ndlr)
Comment l’expliquer?
«Nous avons de plus en plus d’obligations professionnelles, qui font que l’exercice seul, ou dans des plus petites structures, se complique. Je pense à la lutte contre le blanchiment, à la protection des données.
Et les revenus de certains jeunes avocats ne leur permettent pas de couvrir le coût de la vie au Luxembourg.
Il y a aussi une question de génération, où les jeunes cherchent un meilleur équilibre entre vie privée et professionnelle. C’est un métier qui, par définition, comporte une énorme charge mentale.
À combien s’élève le salaire moyen d’un jeune avocat?
«Nous avons réalisé une enquête sur les revenus en janvier 2021. Sur 110 avocats indépendants ayant répondu, 42% étaient en dessous de 2.500 euros mensuels bruts. Cela ne concerne pas les salariés, pour qui le salaire minimum doit être respecté. Il faut noter que le revenu brut d’un indépendant, en net, revient à moins que celui d’un salarié, parce qu’il y a plus de charges sociales.
Depuis, le Barreau a sorti une circulaire qui indique qu’une rémunération équitable serait équivalente au revenu minimum qualifié luxembourgeois.
Des confrères viennent m’exposer leur situation particulière. Je ne peux qu’inviter les jeunes avocats à dénoncer ce genre de situations.
(Pour les avocats salariés, le cabinet de recrutement calcule un salaire annuel compris entre 59.000 et 88.000 euros pour un junior. Une étude menée, cependant, seulement sur une centaine d’avocats en Belgique et au Grand-Duché, ndlr).
Qui fixe le salaire des avocats indépendants?
«C’est une négociation qui se fait avec les associés de l’étude.
Que représentent les indépendants?
«Il y a plus d’indépendants, mais une tendance claire qui va vers le salariat. (Le service statistiques du Barreau ne dispose pas non plus de ces données, ni pour les jeunes ni pour l’ensemble des avocats, nldr).
Il y a un besoin de formation sur la gestion des données informatiques.
Quelles seront les problématiques des jeunes avocats dans 100 ans?
«L’intégration de l’intelligence artificielle (IA) dans la profession. Et des obligations professionnelles qui vont s’ajouter. La directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité, par exemple. Il faudra voir s’il y aura un impact sur les études.
Comment intégrez-vous déjà l’IA dans votre métier?
«Je pense que dans les grandes études, des outils se développent. J’ai l’impression que les plus petites sont encore réticentes.
Utilisez-vous Chat GPT?
«Moi non. J’ai des amis qui le font. Il faut faire attention à respecter le secret professionnel dans l’utilisation de ces outils. Il y a un besoin de formation sur la gestion des données informatiques.
Je me demande aussi si certains aspects du métier vont être remplacés par ce genre d’outils. Ce n’est pas pour faire peur, cela peut être un atout.
Votre successeur à la présidence, à partir de septembre 2023, sera officiellement nommé lors de l’Assemblée générale de juillet. Il s’agira de l’actuel vice-président, Me Tim Doll. Quel bilan tirez-vous de votre mandat?
«Nous avons organisé 18 conférences et formations pour les avocats. Beaucoup d’événements festifs, comme la . Il y a aussi des projets que je n’ai pas pu réaliser, comme la publication d’un livre sur le centenaire.
Et au niveau de la défense des jeunes avocats?
«Nous suivons de près le projet de réforme du stage judiciaire, Et la réforme de l’assistance judiciaire.
Quelles sont vos demandes à ce sujet?
«L’assistance judiciaire avait déjà été revalorisée il y a quelques années. Un nouveau système va être mis en place. Je pense qu’une bonne rémunération de l’assistance judiciaire conduit à un meilleur service pour le justiciable. Nous avons pensé à une indexation des taux d’assistance judiciaire. Cela reste à analyser.»