Les 800 salariés du site de Hambach attendent maintenant le plan alternatif de la direction pour les années à venir. (Photo: Licence C.C.)

Les 800 salariés du site de Hambach attendent maintenant le plan alternatif de la direction pour les années à venir. (Photo: Licence C.C.)

Au terme de plusieurs mois de tractations et un référendum, le «pacte 2020» qui devait pérenniser le site lorrain en contrepartie de l'augmentation du temps de travail semble bel et bien mort. 

Après les 56% de «oui» des près de 800 salariés le 11 septembre, il ne restait qu'à obtenir la signature des syndicats le 28 octobre. Deux ont paraphé l'accord de compétitivité - la CFE-CGC (cadres) et la CFTC -, deux ont refusé d'apposer leur signature - la CGT et la CFDT. Or, ces derniers pèsent à eux deux 53% des salariés, suffisamment pour faire valoir leur droit d'opposition. Ils le feront officiellement dans les prochains jours, lorsque l'accord d'entreprise sera officiellement notifié.

Il faut dire que le vote majoritaire des salariés cache des disparités criantes: si 74% des cadres et des techniciens sont favorables à l'accord, 61% des ouvriers s'y opposent. Car tous ne sont pas logés à la même enseigne. Les premiers devaient, en vertu du «plan 2020», renoncer à 10 de leurs 20 RTT - journées de congés supplémentaires octroyées en échange de semaines de 39 heures. Alors que les seconds se voyaient proposer un passage progressif à 37 heures puis 39 heures de travail hebdomadaire au lieu de 35 heures (la durée légale depuis 2000). En contrepartie, la direction prévoyait une augmentation mensuelle de 120€ brut, ainsi qu’une prime exceptionnelle de 1.000€ versée en deux fois sur deux ans. Surtout, la direction mettait sur la table des engagements en faveur de l'emploi: aucun plan social n'interviendrait sur la période 2015-2020 et 50 intérimaires seraient embauchés définitivement.

«Proposer 120€ brut/mois, cela fait du 80€ net, ce qui signifie 5€ de l’heure pour effectuer 18 heures de travail de plus par mois», s'étrangle Denis Boss, délégué CGT cité par Le Républicain Lorrain. «Dans le même temps, le groupe Daimler annonce une hausse de ses bénéfices de 18%, ce qui représente 21 milliards d’euros au deuxième trimestre 2015.»

Pour autant, la CFE-CGC continue de soutenir l'accord. «On n'a jamais dit que l'accord était bon», commente Mario Mutzette, délégué syndical central cité par Le Point. «On dit simplement qu'il permet de maintenir l'emploi pendant cinq ans. Maintenant, si les ventes ne décollent pas, il y a un risque de plan social.»

Un déficit de compétitivité

La CFTC, qui avait de prime abord rejeté le plan, s'était ralliée au camp du «oui» après avoir obtenu de la direction l'engagement que le rallongement de la durée du temps de travail expirerait en 2021.

L'usine lorraine installée en 1994 produit 100.000 véhicules biplaces chaque année. La direction voulait réduire le coût horaire du travail de 6% pour rattraper en compétitivité le site slovène de Novo Mesto, qui fabrique la ForFour - et espérer obtenir la production de la Smart de 4e génération. Elle assurait aussi que ce plan permettrait de «se préparer à des périodes moins fastes». Pour la CFDT, citée par Le Républicain Lorrain, le plan ne présentait «aucune justification économique réelle et sérieuse pour passer au-delà de la durée légale du travail de 35 heures hebdomadaires». En attendant, le sort du site de Hambach reste en suspens. «Il n'y a aujourd'hui pas d'alternative au Pacte 2020», indique Jean-Yves Schmitt, responsable des communications de Smart France, joint par Paperjam.lu mardi.

Cet épisode a largement été commenté en France, où le passage aux 35 heures fait débat depuis son introduction en 2000. Cet été, le ministre de l'Économie, Emmanuel Macron, avait mis les pieds dans le plat en estimant devant le patronat que penser que «la France pourrait aller mieux en travaillant moins» était une «fausse idée». Il avait été rapidement recadré par le Premier ministre, Manuel Valls, pour lequel il n'est «pas question de revenir sur la durée légale du temps de travail».

Pour autant, plusieurs autres sites de l'industrie automobile ont expérimenté ces dernières années des accords sur la compétitivité incluant une augmentation du temps de travail, comme Michelin, Continental ou encore PSA.