Depuis leurs falaises, les Britanniques regardent l'Union européenne d'un œil de plus en plus distant. (Photo: Wikimedia / licence cc)

Depuis leurs falaises, les Britanniques regardent l'Union européenne d'un œil de plus en plus distant. (Photo: Wikimedia / licence cc)

À la suite du sommet européen de la fin de semaine dernière, le Britannique David Cameron a pu rentrer dans son île et annoncer la tenue d’un référendum sur le maintien ou non du Royaume-Uni dans l’Union européenne pour le 23 juin prochain. Une consultation qui doit rendre bon nombre d’Européens envieux. Parce qu’après la joute diplomatique de l’avant-week-end, dramatisée comme un suspense hollywoodien dans le grand théâtre bruxellois, il y a plus d’un citoyen européen qui aimeraient aussi pouvoir se prononcer sur la place d’Albion parmi les «28». Mais… non, refusé! Ce n’est pas dans les traités.

Vous allez me dire, les traités sont faits pour être modifiés. Au gré des échéances électorales et des humeurs des opinions publiques nationales. C’est en tout cas le sentiment qui ressort des événements récents. Acculé par un clan eurosceptique, le Premier ministre britannique avait alors promis, en janvier 2013, un référendum en cas de réélection lors des législatives de 2015. Ça ne mange pas de pain… Sauf que, trois ans plus tard, il a fallu un sommet de deux jours et des mois d’efforts, qui auraient pu être mieux employés vu les turbulences que l’Europe traverse, pour tenter de colmater une brèche volontairement ouverte.

«My money back»

Et, au final, Londres obtient un statut spécial qui donne un peu plus à la construction européenne l’image d’une union dont une des parties ne veut tirer que le meilleur. Ce n’est pas nouveau. Depuis le fameux «I want my money back» lancé par Margaret Thatcher lors de son premier sommet, en 1979, plus guère de monde ne se fait d’illusions sur les réelles ambitions européennes des Britanniques.

À l’époque, six ans à peine après l’entrée du Royaume-Uni dans une Europe à neuf membres, la «Dame de fer» avait fait ses calculs et constaté que son pays payait plus qu’il ne recevait de l’Union. Intolérable! Comme l’est visiblement pour une majorité de citoyens du royaume l’idée d’une mutualisation des risques et profits dans un mariage dont elle espérait surtout tirer des avantages économiques.

Les 27 chefs d’État réunis autour de David Cameron devaient-ils à nouveau renoncer pour donner une chance à l’Anglais de tenter de réparer ce qu’il avait lui-même brisé? Si l’on revient aux justifications historiques qui ont poussé quelques grands hommes d’État à mettre en place une communauté supranationale, à savoir la préservation de la paix à long terme dans une Europe meurtrie par deux guerres mondiales, alors la réponse doit être positive.

Cette ambition européenne, qui perdure depuis près de 60 ans – le Traité de Rome, dont le Luxembourg fut un des six premiers signataires, date de mars 1957 –, mérite quelques concessions vis-à-vis des moins partageurs.

Trop loin

En réclamant un droit de veto sur les décisions de la zone euro qu’elle refuse d’intégrer – un principe que la France, la Belgique et le Luxembourg sont parvenus à éviter –, en refusant une «Union toujours plus étroite», Londres a pourtant fait des pas de trop. Et en exigeant que l’aide sociale puisse ne pas être accordée sur son sol aux ressortissant de l’UE non britanniques – la période sera limitée à quatre ans –, elle fait carrément vaciller le socle de valeurs communes, basées sur les grands principes des Droits humains, qui font encore la grandeur de l’Union.

Celle-ci s’en remettra, probablement, avec quelques pansements supplémentaires. Mais vis-à-vis de ses partenaires internationaux, l’Europe vient une fois de plus de donner de grands signes de faiblesse qui ne tromperont personne. Et surtout pas les Américains, qui négocient actuellement avec elle le Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement, le fameux TTIP, dont le douzième cycle de négociations démarre ce lundi à Bruxelles. Et là, pour une fois, il s’agira de se montrer fort. Et si possible… unis!