Mardi 25 mai, 17h. Le rendez-vous est inscrit à l’agenda des à la Chambre. Il vise à poursuivre les discussions au sujet du registre des lobbys. Renommé, depuis, registre de transparence, plus général et moins péjoratif.
«Nous sommes en train de finaliser le texte. Nous arrivons avec une proposition très sérieuse sur la table», annonce fièrement (ADR), président de la commission. Il a été soumis aux différentes fractions, qui doivent discuter en interne, en amont de la prochaine réunion. Avec, pour objectif final, «un vote avant les vacances d’été».
Risque d’exclusion
Si certains points restent à discuter, on peut déjà dire que «toute personne qui souhaite approcher un député devra s’inscrire préalablement sur un registre», définit-il. Organisations, entreprises… Avec quelques exceptions, comme pour les chambres professionnelles, dont l’avis est déjà automatiquement sollicité dans la procédure législative. Le registre fera l’objet d’une double déclaration puisque les députés devront ensuite eux-mêmes fournir la liste des personnes rencontrées, «sous peine disciplinaire». Cela peut aller, la première fois, d’une simple réprimande, jusqu’à l’exclusion, affirme Roy Reding.
Mais comment contrôler? «Je pense que les députés respecteront. Le registre sera public. Si quelqu’un est pris en flagrant délit, cela l’expose à une mauvaise publicité.» Pour les lobbyistes, il compte sur le bon sens des députés qui ne devraient pas les rencontrer s’ils ne s’inscrivent pas au registre.
Cela sera obligatoire, peu importe le lieu de la rencontre: au bureau, lors d’un déjeuner en terrasse… Et si un député croise quelqu’un dans la rue, qui tente d’influencer sa décision sur tel ou tel projet de loi? «Nous faisons la distinction entre dialogue normal et approche d’un groupe qui veut avoir une influence.» Pour lui, quelqu’un qui donne simplement son avis en tant que citoyen n’est pas considéré comme lobbyiste.
Une procédure à clarifier
Ce texte arrive un an et demi après une première proposition du député (Piratepartei). «Ce n’était qu’une version minimaliste pour lancer le débat», rappelle-t-il. «Je suis très content que cela aille beaucoup plus loin. Chaque étape vers plus de transparence est une bonne étape». Il aura fallu une certaine «pression externe» de la part du Groupe d’États contre la corruption (Greco) pour que les choses s’accélèrent, selon lui.
Il salue un système inspiré de celui de , auquel doivent s’inscrire ceux qui souhaitent influencer les politiques européennes depuis 2011 pour le Parlement et la Commission. 12.489 organisations ont déjà été enregistrées .
Dans la version luxembourgeoise, les députés ne devraient pas déclarer les demandes de conseils juridiques, techniques, professionnels ou scientifiques. «Pour éviter que le député doive déclarer à chaque fois qu’il appelle son avocat», justifie Sven Clement. Il imagine une publication mensuelle pour les députés sur le site de la Chambre. «Les procédures restent à clarifier. Si on se pose ces questions à ce stade, on risque de ne pas aboutir.»
Qui sont les lobbyistes?
Les députés ne planchent pas sur une loi, mais sur une modification du règlement de la Chambre, qui «a force de loi». Un texte évolutif d’après le député. «Si on constate que ce n’est pas praticable sur certaines dispositions, on peut le revoir. Si on couvre 95%, c’est déjà mieux que les 0% d’aujourd’hui» en termes de transparence.
L’étape suivante: un système similaire pour les ministres. Il faudrait que le gouvernement soumette un projet de loi. S’il ne le fait pas, «nous ferons une proposition de loi», prévoit Sven Clement.
Car il note quatre types de lobbyistes au Grand-Duché, difficiles à comptabiliser. «Les plus répandus, ce sont les représentants d’organisations sectorielles qui envoient des notes, des prises de position.» Ce ne sont «pas les plus dangereux», car ils contactent tous les députés, qui se font ensuite leur propre opinion. Viennent ensuite les «lobbyistes sélectifs», qui ne contactent que des députés qu’ils «pensent proches de leurs idées». Ici, il devient «plus difficile de savoir sur base de quelle entrevue un député prend la parole en plénière». Troisième type, ceux qui s’adressent aux ministres. Duquel naît la quatrième catégorie, les «plus dangereux»: «des cabinets de conseil ou d’avocats qui écrivent des propositions de loi pour les ministres». Ces derniers n’ont «pas de mandat politique», rappelle-t-il, et peuvent tenter d’influencer les textes en fonction de leurs autres clients.
Plutôt contre l’inscription des rencontres imprévues
, député CSV, également membre de la commission du règlement, soulève deux points faisant débat. «Savoir si on inclut les personnes physiques ou non». C’est-à-dire ceux qui ne représentent pas une association ou une organisation. Et «savoir si, lorsque je rencontre quelqu’un par hasard dans la rue et qu’il me demande quelque chose, je dois l’inscrire sur le registre ou non.» Son parti n’a pas d’avis tranché sur ces questions et doit en discuter. «Je pense qu’il faut mettre en place un système qui assure la transparence, mais qui reste contrôlable.»
Du côté du LSAP, le député membre de la commission s’interroge sur le même sujet: «Il faut être transparent en tant que député, c’est clair. Il faut aussi que la démarche soit réalisable, qu’il soit encore possible pour le député d’avoir une vie normale». Pour lui, difficile de dire qu’une personne avec laquelle on discute dans la rue tente d’influencer une décision.
«Si je dois inscrire toute personne qui m’interpelle dans la rue, je n’en finis plus», appuie , député DP au sein de la commission. Il attend la réaction des autres membres de son parti pour présenter une opinion définitive, mais évoque un texte qui va «dans la bonne direction».
Pas de honte
Un avis partagé par , députée déi Gréng de la commission. Ce n’est pas parce que le boulanger commente la politique qu’on peut parler de lobbyisme, estime-t-elle. Et si la conversation en apparence anodine devenait plus intense, «je lui dirais: ‘on va fixer un rendez-vous plus tard’», avec un but clair, inscrit au registre donc.
Autre point à discuter: «Pour moi, dès que c’est un échange politique, que ce soit très concret ou très large, il faut l’inscrire. Si on ne prend en compte que les discussions, autour d’une loi précise, on risque de les cacher derrière des conversations générales.»
En tout cas, la transparence ne semble pas inquiéter la députée. «Ce n’est pas quelque chose que je veux cacher, c’est ma mission d’écouter tous les côtés, pour mieux connaître mes dossiers.» Des détails qui devraient donc être publics avant la rentrée.
Aucun membre de déi Lénk ne fait partie de la commission du règlement.