La réforme déposée le 20 septembre 2020 par le ministre du Logement, Henri Kox (déi Greng), et reprise à son compte par le gouvernement Frieden-Bettel a été adoptée ce 10 juillet par les députés.
Un texte repris à l’identique à l’exception de la réforme du plafond des loyers, réforme qui ne touchait pas au plafond de 5% du capital investi – une règle en vigueur depuis 1955 – mais qui se penchait sur les règles déterminant le capital investi et qui prévoyait une minoration pouvant aller de 3,5 à 3% selon la catégorie énergétique du bien.
Une disposition «fortement critiquée par de nombreux acteurs concernés», peut-on lire dans le résumé du dossier parlementaire. Si cette partie du projet «a été écartée pour être retravaillée» a précisé le rapporteur, (DP), le plafond de 5% du capital investi reste bien de mise jusqu’à nouvel ordre. Le texte de loi apporte ici quelques précisions: lors de chaque adaptation du loyer, l’augmentation ne pourra pas être supérieure à 10%. Et un supplément de loyer pour le mobilier peut être demandé par le bailleur dans le cas d’un logement meublé. En outre, la notion de logement de luxe, permettant d’éviter l’application du plafond du loyer, est abolie. En cause, de «nombreux abus» précise le gouvernement.
Les points clés de la réforme
Dans sa forme définitive, le texte entend en même temps «protéger les locataires contre les loyers abusifs» et favoriser «le retour des investisseurs sur le marché de l’immobilier, indispensable pour répondre à la demande croissante en matière de logements», comme l’a rappelé le rapporteur. Le projet de loi réforme la loi du 21 septembre 2006 sur le bail à usage d’habitation, ainsi que certaines dispositions du Code civil sur les cinq points suivants:
– les frais de commission d’agence immobilière seront désormais payés à parts égales entre le bailleur et le locataire si le bailleur est à l’origine de l’engagement d’un agent immobilier pour trouver un locataire pour un logement donné;
– le montant maximal légal de la garantie locative est réduit de trois à deux mois de loyer;
– les modalités pour la restitution de la garantie locative à la fin du bail sont précisées. Désormais, en fin de bail, si tous les loyers et charges dus ont été payés par le locataire et si aucune dégradation n’est constatée par le bailleur au moment de la remise des clés, le bailleur rend 50% de la garantie locative endéans un mois. Les autres 50% sont à restituer endéans le mois qui suit la réception des décomptes relatifs aux charges;
– la reconnaissance de colocation. La colocation, qui désigne la location d’un même logement par plusieurs locataires appelés colocataires, est désormais permise sous condition de l’accord express du bailleur. Au moment de la signature du contrat de bail de colocation, un pacte de colocation devra également être signé par les colocataires. Ce pacte doit régler les règles spécifiques de la colocation et clarifier les responsabilités et la solidarité entre colocataires. Le bailleur devra être informé de l’identité des colocataires et tout changement nécessite son accord.
Lorsqu’un colocataire souhaite se libérer de ses obligations avant le terme du bail, il le notifie simultanément au bailleur et à ses colocataires moyennant un préavis de trois mois. La notification au bailleur est faite par lettre recommandée avec accusé de réception. Ce colocataire est tenu, avant l’expiration de son préavis, de chercher un colocataire remplaçant. Les autres colocataires ou le bailleur peuvent également proposer un candidat remplaçant. À défaut d’avoir présenté un candidat remplaçant, le colocataire sortant doit pouvoir démontrer avoir effectué une recherche active et suffisante en vue de trouver un nouveau colocataire.
– tout contrat de bail devra désormais être écrit. Un contrat oral n’aura plus de valeur légale s’il est conclu après l’entrée en vigueur de la loi en projet.
Le plafonnement des loyers, ce grand absent
Sans surprise, le texte a été voté par la majorité CSV-DP. Le CSV a voté pour «un texte qui va dans le bon sens pour relancer le marché de l’immobilier», selon les mots de (CSV) qui regrettait, exception faite du plafonnement des loyers, «qu’il ait fallu attendre plusieurs années pour que ce texte soit adopté».
pour le LSAP s’est montée plus circonspecte. Tout en évoquant «une réforme nécessaire», elle a regretté que le gouvernement n’ait pas progressé sur la question du plafonnement des loyers.
(déi Gréng) – dont c’était la dernière séance en tant que député – a également insisté sur la nécessité que la loi soit complétée rapidement par un cadre relatif au plafonnement des loyers. «Le cadre actuel est inapplicable», a-t-il insisté en renvoyant aux dernières décisions judiciaires relatives à ce point. «Le plafonnement des loyers est nécessaire pour protéger les locataires contre l’arbitraire des propriétaires.»
(Piraten) a également regretté que le projet de loi ne parle pas de fixation du loyer. Une fixation dont les Pirates souhaitent qu’elle se fasse en fonction d’un indice des prix des loyers plutôt qu’en référence au capital investi. Le propriétaire qui fixerait un loyer supérieur à cet indice serait fiscalement pénalisé. Il a également déploré que les frais de commissions d’agence ne soient ni encadrés ni plafonnés.
(déi Lénk) a réclamé un mécanisme de plafonnement des loyers sans se faire d’illusion. «Ce gouvernement a clairement choisi son camp. Ce n’est pas celui des locataires travailleurs, mais celui des grands propriétaires profiteurs». Il a réclamé à minima l’obligation pour le bailleur d’inscrire dans le contrat de location le capital investi «pour avoir au moins un minimum de transparence». Sa proposition de geler les loyers en attendant une nouvelle loi sur le plafonnement – proposition soutenue par les Verts – a été rejetée.
Du côté de l’ADR, «un parti qui cherche également à mettre des logements sur le marché sans contraintes», a rappelé , on regrette que les frais de commissions d’agence n’incombent pas uniquement au propriétaire et que la garantie locative soit réduite, craignant que cela ne dissuade les propriétaires de louer leurs biens. Alexandra Schoos (ADR) a accueilli favorablement la reconnaissance de la colocation, tout en jugeant le cadre trop strict.
La loi devrait entrer en vigueur le 1er août. Mais en l’absence d’un mécanisme de plafonnement de loyer, le débat est loin d’être clos.