Madame Koltz, vous avez réalisé le documentaire Soundhunters qui sera présenté en avant-première aux Rotondes ce vendredi, avant son passage sur Arte le 19 septembre. Quelle est la genèse du projet?
«C’est Nicolas Blies et l’équipe de a_Bahn qui ont eu l’idée de ce projet. Au départ, il s’agissait de revenir sur la genèse de l’album Zoolook de Jean-Michel Jarre, le premier en France à utiliser des samples, quelques années après Brian Eno et David Byrne. Il a utilisé surtout des voix et des morceaux de langages du monde entier.
Mais je me suis heurtée au manque d’archives et de sources. Alors nous avons décidé d’élargir le documentaire à d’autres musiciens qui utilisent des sons du quotidien pour créer de la musique. On les appelle les Soundhunters, les 'chasseurs de sons'. Je suis partie à leur rencontre, un peu partout dans le monde en compagnie du duo français Kiz qui a, au fil de nos pérégrinations, également enregistré des sons pour créer sa musique.
C’est donc un road movie à travers l’univers des sons, une expédition musicale qui retrace l’histoire de cette musique qu’on a longtemps appelée 'concrète' et des rencontres avec huit musiciens que l’on voit à l’œuvre à la chasse aux sons ou à leur table de mixage. Il y a Matthew Herbert qui travaille beaucoup autour des sons de la cuisine, le groupe Matmos qui n’utilise que des sons enregistrés pendant des opérations de chirurgie esthétique, Chassol qui dresse des portraits sonores d’une région, Jean-Michel Jarre ou encore Blixa Bargeld, membre fondateur des Einstürzenden Neubauten, groupe bâtisseur de la musique industrielle.
On parle de projet transmédia. C’est-à-dire?
«C’est un projet qui se décline sur plusieurs supports, à travers des produits différents qui se complètent et se nourrissent mutuellement. Ainsi, à partir de la plateforme Soundhunters, on peut enregistrer ses propres sons et en télécharger d’autres afin d’utiliser le tout pour créer des morceaux. C’est comme une grande base de samples venus de partout. Les meilleurs morceaux seront d’ailleurs ajoutés à l’album Zoolook Revisited que prépare Jean-Michel Jarre.
On peut également visionner quatre films qui sont autant de créations musicales et visuelles où des artistes traquent les sons d’une ville pour réaliser de la musique. Une sorte de portrait musical de Lagos, Berlin, Sao Paulo et New York. Enfin, bien sûr, il y a mon documentaire qui sera diffusé sur Arte. Au final, c’est un mélange détonnant entre approche documentaire et réseau social de création collaborative.
Vous avez vous-même fait de la musique et vous êtes proche de cet univers. Qu’avez-vous retenu de ces rencontres?
«Les huit musiciens que j’ai rencontrés, ainsi que le duo Kiz, sont des passionnés, un peu dingues. Ils font tout ce qui est possible pour réaliser cette passion. Leur musique n’est pas vraiment commerciale et ils n’en vivent pas forcément bien, mais ce sont des mordus, des Don Quichotte. Les résultats musicaux sont aussi très variés, tendant vers le jazz, le pop, l’électro, la musique contemporaine… Mais tous ont en commun cette volonté d’écouter le monde, ce qui est assez fort politiquement.»
Soundhunters, le 11 septembre à 20h aux Rotondes et sur Arte le 19 septembre à 23h15.