«Je considère la culture comme un élément décisif de l’enrichissement d’une société et du progrès social.» (Photo: DR)

«Je considère la culture comme un élément décisif de l’enrichissement d’une société et du progrès social.» (Photo: DR)

Monsieur Rotunno, quels sont les défis majeurs que doit relever le secteur des industries créatives au Luxembourg? 

«Les industries créatives, comme toute activité économique, ont besoin de mesures incitatives afin de pouvoir naître, se développer et se réinventer tout au long de leur croissance. Il faut donc penser et organiser un accompagnement à long terme. Il ne suffit pas d’inciter à la création de sociétés, s’il n’y a pas de réflexion sur le futur à offrir à leurs créateurs. Le véritable travail consiste à développer une culture d’entreprise auprès des décideurs politiques nationaux et locaux pour qu’ils prennent en compte les besoins spécifiques des divers secteurs créatifs.

Le Luxembourg n’offre qu’un marché restreint et la valorisation des secteurs créatifs ne devrait pas uniquement se faire par les résultats financiers. D’autres éléments d’analyse doivent être pris en considération, comme le travail pédagogique, d’éducation, de mémoire, l’innovation technologique ou encore la visibilité à l’international de sociétés et artistes locaux et de l’impact sur l’image de notre pays. ‘Nation branding’ oblige. Tout cela contribue au développement des multiples facettes de la culture de notre pays. Le premier défi reste donc celui de la perception des secteurs créatifs auprès de nos décideurs et du public.

Comment l’industrie créative luxembourgeoise est-elle perçue à l’étranger? Y a-t-il un savoir-faire reconnu?

«Pour parler du secteur que je connais le mieux, le savoir-faire des ‘acteurs’ du secteur cinématographique (producteurs, techniciens, réalisateurs, comédiens...) est certainement reconnu et respecté à l’étranger. Le nombre de coproductions et de films de réalisateurs nationaux sélectionnés dans les grands festivals en témoigne. Certains talents luxembourgeois construisent leur carrière à partir de l’international pour un rayonnement mondial de leur travail.

Mais il est aussi vrai que l’attrait du Luxembourg pour les coproductions de films passe essentiellement par la proposition financière que nous sommes en mesure de faire en cas de soutien de la part du Film Fund. Si ce soutien n’est plus à la hauteur des marchés concurrents, alors c’est toute notre industrie qui sera en péril. ‘Savoir-faire’ et ‘financement’ vont de pair.

Que manque-t-il au secteur pour être encore plus performant au Luxembourg?

«Je considère la culture comme un élément décisif de l’enrichissement d’une société et du progrès social. Nous avons besoin de savoir quelle place nous voulons donner aux esprits créatifs dans notre pays qui, par leurs actions et innovations, peuvent transformer notre société. Et ceci doit être soutenu par des actes politiques clairs et parfois tout à fait à portée de main. Il pourrait notamment renforcer la collaboration entre le ministère de la Culture et le ministère de l’Éducation. Nous avons besoin de relais d’information auprès des écoles et nous devrions accentuer la fréquentation des espaces culturels et de création dès le jeune âge.

Certaines initiatives dans nos pays voisins ont fait leurs preuves. Pourquoi ne pas s’en inspirer? De nouvelles formes d’incitations à la ‘consommation culturelle’ sont à inventer. Il reste un travail important à faire sur la reconnaissance des divers secteurs créatifs auprès du public national et transfrontalier. Nous avons une population disparate et le public cible est multiple (catégorie d’âge, préférence linguistique, classe sociale...).

Cultiver ce sentiment d’appartenance et nourrir la curiosité pour ‘l’innovation’ et ‘la création’.

Donato Rotunno, Tarantula

Les médias jouent un rôle majeur dans la création d’un sentiment d’appartenance à un territoire transfrontalier. Il faut donc penser une communication adaptée à notre territoire et investir dans une campagne de soutien à long terme. Un engagement commun des institutions publiques et des partenaires privés. C’est le premier pas pour créer un marché national et transfrontalier de consommation de biens culturels. Et le tout doit être suivi par des propositions concrètes pour cultiver ce sentiment d’appartenance et nourrir la curiosité pour ‘l’innovation’ et ‘la création’.»

Les inscriptions au 10x6 Creative Industries sont ouvertes sur le site du Paperjam Club.