Pouvez-vous nous expliquer qui est Pleix?
«Pleix est un collectif de sept membres. Nous nous connaissions avant de créer le collectif, car nous étions amis et avions établi des relations de confiance et de solidarité. En fait, six des sept membres se sont rencontrés parce qu’ils ont travaillé auparavant pour le duo Kuntzel + Deygas.
En 2001, nous avons décidé de nous regrouper en collectif pour réaliser nos propres films. Chacun est venu avec sa spécialité professionnelle, pour l’un le montage, pour l’autre la 3D, ou encore la musique, le graphisme… Nous nous sommes mis ensemble pour le plaisir, sans plan de carrière ou de stratégie particulière. Nous avons donc commencé à travailler ensemble et à réaliser des films chez nous, sur nos ordinateurs. Une fois finis, nous les diffusions directement en accès libre sur internet.
À cette époque, notre démarche était encore très novatrice et nous avons bénéficié d’une grande visibilité. Le hasard a fait que nous avons eu de bons retours sur nos travaux et que nous avons rapidement été sélectionnés pour participer à des festivals ou des expositions. Le monde de la publicité nous a également repérés, ce qui nous a permis de réaliser des films publicitaires de qualité, qui, ne nous le cachons pas, finançaient nos travaux plus artistiques.
Nous intervenons donc sur les deux scènes, celle de l’art et celle de la publicité. Ce qui est très spécifique dans notre collectif est que nous n’avons pas de statut. Nous ne sommes pas une compagnie ni une association. Nous sommes sept artistes indépendants, des artisans de l’image, regroupés sous un même nom. Nous n’avons pas de hiérarchie et nous restons toujours anonymes. Personne ne signe les œuvres de son nom, nous mettons notre ego de côté.
Quels sont les sujets que vous abordez dans vos films?
«Nos films traitent souvent de la question de la surconsommation, de la surpopulation ou de problèmes écologiques. Ces questions se retrouvent donc dans les œuvres que nous présentons dans l’exposition au Ratskeller. Il y a par exemple un triptyque, Astral Body Church, dans lequel on voit des personnes âgées qui sont bodybuildées. Ce film, conçu initialement pour une installation dans l’église Saint-Eustache à l’occasion de la Nuit blanche à Paris, est comme un vitrail vivant. Ces images, qui interrogent le culte du corps et questionnent le vieillissement et la jeunesse éternelle, mettent mal à l’aise et nous interpellent.
On présente également trois vidéos qui, d’une manière esthétisante, se moquent des déplacements en nombre à l’occasion des vacances d’été. L’aspect ludique et un peu enfantin est aussi une part importante de notre approche. Nous n’hésitons pas à utiliser un ton volontairement léger pour aborder des questions de société plus lourdes de sens. C’est le cas avec l’installation interactive Hybrid qui mélange des images d’animaux et d’êtres humains en les transformant en monstres pour interroger la question de la maltraitance faite aux animaux et notre surconsommation de viande.
Avez-vous produit une œuvre spécialement pour cette exposition?
«Oui, il s’agit de l’œuvre Codec qui, contrairement à nos autres œuvres, utilise la low-tech. Cela faisait quelque temps que nous souhaitions réinterroger notre pratique et notre manière de faire des films. Aussi, nous souhaitions nous pencher sur la question de la programmation. C’est ce que nous avons fait avec cette œuvre. Nous avons utilisé de petits écrans LED combinés à des cartes Raspberry Pi qui sont de petites cartes programmables aussi puissantes qu’un ordinateur. Nous avons sélectionné quatre extraits de films connus ou qui nous ont inspirés et dont nous avons compressé le son et l’image, tout en conservant une certaine esthétique. C’est un jeu sur les codes cinématographiques, la question de la mémoire et de la connaissance.»
Quelques œuvres de Pleix (cliquez pour agrandir)
Exposition présentée jusqu’au 6 mars, visites gratuites tous les samedis à 11h.