Monsieur Depoorter, quelle serait votre définition (et/ou celle de la Banque) de la philanthropie?
«Plus que le mot, c’est l’idée de la philanthropie qui importe. Retenons qu’il s’agit de toute initiative ou action mise en place dans l’intérêt général ou pour le bien commun. Contrairement aux idées reçues, la philanthropie n’est pas qu’affaire d’argent. Du temps et des compétences permettent également de mener à bien pareil projet. De même, la mise en place d’une fondation n’est pas indispensable non plus. La philanthropie naît et se déploie aujourd’hui sur les réseaux sociaux aussi, de façon très spontanée, à l’initiative d’une ou plusieurs personnes, pour atteindre un objectif de long terme, ou sur une période de temps limitée. Enfin, le champ de l’intérêt général est pluriel également: il va du social au culturel, du terrain des idées à celui de l’action. De quoi permettre à chacun d’apporter sa petite pierre à l’édifice du bien commun.
Pourquoi la Banque de Luxembourg a-t-elle décidé d’organiser la journée «La philanthropie, ça marche»?
«Nous avons décidé d’organiser la journée 'La philanthropie, ça marche' pour la seconde fois, afin de continuer à promouvoir l’esprit de l’engagement au Luxembourg où le potentiel de développement semble encore grand. Tout comme le pouvoir de la philanthropie reste limité – il consiste avant tout à montrer la voie, et à apporter de nouveaux modèles de réponses à des problématiques sociales ou culturelles irrésolues –, l’ambition de cette manifestation l’est également. Il s’agira en effet de mettre en lumière d’une part cinq initiatives ou projets existant depuis plus de trois ans qui, par leur impact ou leur façon de faire, peuvent servir d’exemple à d’autres, et d’autre part cinq initiatives récentes, lancées il y a moins de trois ans, qui mettent en œuvre des solutions innovantes ou originales pour apporter une réponse à des problématiques sociétales.
Nous voulons montrer qu’à Luxembourg, les choses bougent et que les acteurs comme les bonnes pratiques existent déjà et ne demandent qu’à être suivis.
La Place dispose-t-elle des outils suffisants pour faire émerger une culture durable de la philanthropie?
«La propension que nous avons à Luxembourg de vouloir à tout prix et sans cesse lier la philanthropie à la Place (financière…) est sans doute ce qui la dessert le plus. Encore une fois, la philanthropie n’est pas qu’affaire d’argent, et les philanthropes existent ailleurs que dans les banques! Rendons la philanthropie à celles et ceux de qui elle naît et pour qui elle est faite, à savoir, tous nos concitoyens. La philanthropie est avant tout un état d’esprit, puis sa mise en œuvre. Le rôle de l’État lui-même est à interroger dans ce contexte. Plus que d’offrir un cadre – qui n’est bien souvent autre que d’autoriser une déductibilité fiscale somme toute accessoire –, il lui appartient avant tout d’institutionnaliser et de déployer à grande échelle les idées innovantes et efficientes mises en place par les philanthropes. Mais aussi et sans doute de multiplier et promouvoir toutes les initiatives de sensibilisation à la philanthropie.»