Alain Verbeken, directeur chez Deloitte Luxembourg (Photo: Deloitte)

Alain Verbeken, directeur chez Deloitte Luxembourg (Photo: Deloitte)

Monsieur Verbeken, quelles sont les différences et similitudes entre les obligations de Fatca et celles de CRS pour les banques, les compagnies d’assurance, des fonds et certains véhicules non supervisés?

«Le Common Reporting Standard (CRS) ainsi que la directive européenne 2014/107/EU qui inclut le CRS se sont largement inspirés des IGA Fatca du type ‘Modèle 1’ (comme également conclus entre le Luxembourg et les États-Unis). Les projets d’implémentation du CRS pourront donc largement capitaliser sur le travail effectué pour Fatca en matière de classification des clients, classification des produits, et du reporting. Cependant, il y a également des différences, dont les plus importantes sont:

  • les seuils ‘de minimis’ (qui permettent d’exclure certains clients de revue classification) plus restrictifs pour les entités et absentes pour les personnes physiques sous le CRS,
  • le fait que le nombre de statuts possibles pour les fonds sous le CRS est beaucoup plus limité,
  • les définitions légèrement différentes au niveau des produits visés respectivement exonérés,
  • l’absence d’obligations de retenue sous le CRS et le fait que pour un nombre de cas, les personnes qui contrôlent certaines entités ou trusts situés dans des États non partenaires du CRS (comme, par exemple, le Panama) seront rapportables, alors qu’une même entité pourrait avoir un statut non rapportable pour Fatca.

Vu les différences, il y aura également lieu de revoir les décisions stratégiques prises pour Fatca en fonction du CRS.

Comment les entités, notamment luxembourgeoises, doivent-elles se préparer pour ce nouveau modèle de reporting, notamment d’un point de vue informatique?

«Une différence pratique importante entre Fatca et le CRS sera le volume de reporting. Vu le nombre relativement limité de ‘Specified US Persons’ rapportables au Luxembourg, un nombre d’acteurs pourrait se contenter de traiter le reporting Fatca d’une manière manuelle ou semi-manuelle. Cela sera beaucoup moins évident pour le CRS, vu que, dans une première étape, tous les clients avec résidence fiscale dans un des autres États membres seront rapportables (voire rapportables envers plusieurs états si leurs dossiers contiennent des indices de résidence dans plusieurs États partenaires qui ne seraient pas remédiés; voire même rapportables en même temps comme Specified US Person). Une solution informatisée sera conséquemment nécessaire pour un nombre plus important d’acteurs financiers. En plus, le nombre d’États partenaires non UE sera croissant dans les années à venir, avec comme effet que le volume de reporting continuera à augmenter. Raison pour laquelle un nombre d’acteurs financiers met également les solutions d’outsourcing du reporting CRS (et Fatca) sur l’agenda. 

Quel est l’état des lieux de préparation ou d’anticipation des sociétés luxembourgeoises vis-à-vis de CRS?

«Parmi les acteurs financiers, une grande partie des banques larges ont généralement commencé ou vont très prochainement commencer le processus d’analyse des différences (‘Gap’) entre le CRS et Fatca. Parmi les banques de taille moyenne ou petite, dans l’industrie assurance vie et dans l’industrie fonds, les acteurs commencent à bouger, mais le nombre d’acteurs qui ont réellement commencé les projets est moins important. Dans l’industrie private equity et les autres structures d’investissement non réglementées, Fatca n’est souvent qu’à peine digéré, ou est encore un chantier en cours. Cette industrie suivra sans doute avec un peu de retard. 
En tout état de cause, et pour tous les acteurs de la Place, la date fatidique du 1er janvier 2016, date à laquelle il faudra avoir effectué les classifications clients et produits, et être prêt à capter les données nécessaires pour le CRS, se rapproche très vite.»