Pénurie de profils oblige, les développeurs sont des oiseaux rares qu’il faut parfois aller chercher loin. Les attirer par le salaire ne suffit pas: vision de l’entreprise, ambiance et vie privée ont aussi des arguments à faire valoir. (Photo: Shutterstock)

Pénurie de profils oblige, les développeurs sont des oiseaux rares qu’il faut parfois aller chercher loin. Les attirer par le salaire ne suffit pas: vision de l’entreprise, ambiance et vie privée ont aussi des arguments à faire valoir. (Photo: Shutterstock)

Le salaire est un élément déterminant pour attirer de nouveaux talents des technologies au Luxembourg. Mais il n’est pas le seul. Plongée dans les statistiques qui existent.

À San Francisco, les salaires des 300.000 développeurs (à 70% étrangers) sont deux fois plus élevés qu’à Londres. Les États-Unis restent année après année leur eldorado. Le salaire moyen y atteint 108.000 dollars, , qui collectionne depuis trois ans les différents chiffres internationaux sur ce sujet très à la mode chez les geeks.

Logique, sur le marché américain, entre 2010 et 2018, le nombre de développeurs a augmenté de 76%, soit 386.000 personnes de plus. Un tiers de ces emplois tirent le marché de l’emploi américain vers le haut, selon le Bureau américain des statistiques sur l’emploi.

En février, les Américains devancent la Suisse (82.878 dollars) et la Norvège (71.993 dollars), selon cette étude. Pour avoir une comparaison avec le Luxembourg, le mieux est de reprendre , qui avait estimé à 53.000 euros (59.757 dollars) le salaire moyen, ce qui place le pays en sixième position mondiale, entre Israël et la Suède.

Pénurie oblige, disait Hays dans son rapport annuel sur les rémunérations au Luxembourg 2018, «les entreprises recrutent des profils venus d’autres pays, ce qui justifie les salaires plus importants (...). Les efforts du gouvernement pour assurer une formation de haut niveau aux étudiants de l’Université du Luxembourg laissent présager une résorption de la pénurie de candidats d’ici trois à cinq ans.»

, Hays indique une fourchette de 32.000 à 42.000 euros annuels pour les juniors, et de 55.000 à 80.000 euros pour les développeurs qui ont plus de huit ans d’expérience.

Les débutants mieux payés en Suisse

Seulement, c’est loin d’être si simple. La moyenne cache des différences entre les débutants et les développeurs confirmés. La Suisse est le pays qui paie le mieux les débutants (77.845 dollars). L’écart peut atteindre 25.000 à 30.000 dollars aux États-Unis, en Australie, en Israël ou en Nouvelle-Zélande. À l’inverse, la France est le pays où les «seniors» profitent le moins de leur expérience par rapport aux novices (8.000 dollars de plus par an).

Le langage dans lequel ils codent peut aussi faire une grosse différence. Aux États-Unis, mieux vaut travailler avec Android (126.503 dollars), alors que la Suisse paie mieux les spécialistes d’iOS (93.017 dollars), et Israël plutôt ceux de C++ (67.369 dollars).

Scala et Goland offrent même un avantage de plus de 21%, note Payscale dans son outil interactif, même si le nombre de développeurs est largement anecdotique par rapport aux spécialistes de SQL (25,4%), de Javascript (15,9%) ou de Java (13,8%).

Selon Nexten.io, les experts en Java, .NET et Javascript sont, et de loin, les plus recherchés au Luxembourg, qui emploie plus de 10.414 développeurs, soit 2,5% des forces de travail. De quoi occuper la 10e place européenne. 

Le salaire, un indicateur biaisé

Pour les Luxembourgeois de Nexten.io, il faut aller bien plus loin encore pour ajouter le coût du logement ou des besoins de base. Ce que la start-up d’Éric Busch avait fait dans sa dernière étude, juste après l’ICT Spring.

Mais c’est loin d’être tout, ajoute le Center for Technology and Workforce Solutions (CTWS), . Le CTWS préconise de suivre cinq conseils qu’il a retrouvés dans tous les environnements:

1. Aidez les professionnels à intégrer leur travail dans leur vie. L’atténuation des contraintes et du stress liés au travail peut donner un effectif plus attentif, en meilleure santé et plus productif.

2. Un engagement à comprendre les besoins, les intérêts, les motivateurs et les aspirations uniques de chaque employé peut avoir un impact positif sur la culture et les performances.

3. Les individus devraient être encouragés (et peut-être même incités) à mettre de côté leur «fierté d’être propriétaires» et à se concentrer davantage sur la contribution du groupe. Les célébrations de progrès et de succès devraient être fondées sur les réalisations collectives.

4. Trouvez des occasions d’investir dans des outils, des programmes, des politiques et des ressources efficaces qui donneront aux professionnels de la technologie les compétences professionnelles et personnelles qu’ils n’avaient pas avant leur arrivée dans l’organisation.

5. Assurez-vous que tous les membres de l'organisation comprennent la stratégie principale de l'entreprise, afin qu'ils comprennent leur rôle dans la mise en œuvre de cette stratégie.

Nouveaux talents contre robotisation

58% des entreprises de technologie veulent recruter pour croître, selon Comptia, 52% pour gagner en connaissances dans des secteurs émergents et 43% pour remplacer ceux qui partent vers d’autres sociétés ou en retraite.

Et parmi leurs challenges, trouver les compétences dans les secteurs émergents devance trouver des salariés dotés des soft skills utiles, la compétition intense pour trouver des talents, l’augmentation des salaires et le nombre limité de salariés potentiels dans la région de l’entreprise.

Pour le Forum économique mondial, d’ici 2022, les entreprises comptent principalement recruter de nouveaux talents avec les bonnes compétences pour faire face à l’évolution technologique. Voire automatiser certaines tâches en cas de besoin. Puis, seulement, former les salariés qu’elles ont déjà dans leurs effectifs.

Le milliardaire japonais Hiroshi Mikitani, le patron de Rakuten, dont la filiale bancaire est basée au Luxembourg, a pris récemment une décision drastique: envoyer ses 17.000 salariés se former au code. Ou plutôt aux principes de base du fonctionnement d’un ordinateur.

«Quand vous travaillez dans le secteur automobile, vous connaissez les fonctions de base d’une voiture. Les gens qui travaillent dans la tech devraient en connaître autant sur l’ordinateur», a dit le géant japonais de l’e-commerce.