La crise du coronavirus va sans doute entraîner une augmentation des pertes sur prêts pour les banques (Photo: Shutterstock)

La crise du coronavirus va sans doute entraîner une augmentation des pertes sur prêts pour les banques (Photo: Shutterstock)

L’Europe est devenue l’épicentre de la crise du coronavirus. Justin Bisseker, European Banks Analyst chez Schroders, analyse l’impact de cette crise sur le secteur bancaire régional. Il juge peu probable que les cours continuent à baisser.

La propagation du coronavirus et le lockdown décidé dans un nombre croissant de pays ont un impact énorme sur l’économie et le secteur bancaire. Les décideurs politiques tentent de limiter les dégâts. Pour les banques, tout dépendra de la durée de la perturbation et de l’ampleur de l’intervention des gouvernements. 

On ne peut rien dire sur le premier point. En revanche, les gouvernements ont déjà pris de nombreuses mesures pour atténuer l’impact financier de la crise. Les banques centrales baissent les taux d’intérêt, ce qui réduit le coût des prêts à court terme. Pour Schroders, il est clair que toutes les banques ne ressentiront pas l’impact du virus de la même manière. Certaines banques sont en meilleure santé que d’autres. C’est pourquoi la sélection des actions dans ce secteur revêt la plus haute importance.

Un resserrement du crédit est peu probable

La crise du coronavirus va sans doute entraîner une augmentation des pertes sur prêts pour les banques. Comme bon nombre de gouvernements ont émis des garanties, Schroders ne s’attend pas à un resserrement du crédit ni à une pénurie de crédit. Les mesures de soutien permettent d’atténuer l’impact des pertes sur crédit. En règle générale, ces pertes sont réparties entre les banques (20%) et le gouvernement (80%).

Plus le ralentissement économique est long et profond, plus grand est le risque pour les bénéfices et les positions de capital des banques. Pour l’instant, certains secteurs sont gravement touchés, par exemple le pétrole et le gaz, les voyages, les loisirs et certains secteurs du commerce de détail. Selon les règles comptables actuelles, une détérioration de la qualité des actifs entraîne des pertes déjà encourues, mais qui ne seront peut-être pas réalisées. Schroders tient compte du fait que la réglementation sera assouplie si la crise s’étend sur plusieurs mois.

Baisse des recettes

Il est clair que les revenus des banques diminuent. À court terme, les revenus provenant des frais bancaires et des activités de trading diminuent. Ils sont en effet plus sous pression que le revenu net d’intérêts. Dès l’amorce d’une reprise, les revenus de la première catégorie rebondiront rapidement. Les taux d’intérêt très bas affectent quant à eux les marges à plus long terme. La situation varie d’une banque à l’autre et d’une région à l’autre. Schroders considère que les banques scandinaves sont plus résistantes à cette crise que les banques de la zone euro et du Royaume-Uni.

Le dividende sous pression si la crise perdure

Si la crise se prolonge, elle risque de contraindre les banques les plus faibles à cesser de verser des dividendes et, au bout du compte, à lever des capitaux. L’assouplissement des réserves de capitaux qui a été annoncé par les banques centrales est un élément important pour gagner du temps. Il faut cependant s’attendre à ce que les réserves de capital doivent être reconstituées à un moment donné. C’est donc un argument de plus pour se montrer sélectif en ce qui concerne les actions des banques.

Le secteur bancaire européen pourrait-il rebondir?

Jusqu’à présent, les interventions des gouvernements et des banques centrales n’ont pas réussi à apaiser les craintes des investisseurs. Un vaccin pourrait sauver les marchés, mais il ne sera pas disponible avant plusieurs mois. L’indice MSCI Europe affiche un rendement négatif de 33,7% cette année, alors que le sous-indice des banques affiche un rendement négatif de 43,5% (au 19 mars).

Aucun gouvernement n’a encore de stratégie de sortie à ce stade, mais Schroders ne croit pas que le lockdown pourra être maintenu à moyen terme. Cela représenterait un fardeau social et économique trop lourd pour l’avenir. Si les perturbations ne durent que quelques semaines, le secteur pourrait bien connaître un fort rebond. Grâce à des mesures de soutien efficaces, l’impact sur les bénéfices de 2021 et 2022 pourra être nettement inférieur à celui intégré dans les cours actuels. 

Actuellement, les actions des banques sont cotées en moyenne à un ratio cours/bénéfice prévu (2021) de seulement 6x, contre une moyenne de 9,4x. En outre, les actions offrent actuellement un rendement de dividende de près de 10%. Le principal risque est un ralentissement économique dans la durée si les mesures actuelles sont prolongées à moyen terme. De nombreuses banques risquent alors de se retrouver dans le rouge. Le marché intègre déjà ce risque dans les cours. 

Les banques en meilleure santé qu’en 2008

Justin Bisseker souligne que les banques sont en meilleure santé aujourd’hui qu’elles ne l’étaient en 2008. Elles sont mieux capitalisées, disposent de solides réserves de liquidités, connaissent aujourd’hui un assouplissement plutôt qu’un durcissement des règles en vigueur et sont le canal du soutien gouvernemental aux entreprises et aux particuliers concernés. Pour Justin Bisseker, le risque est faible de voir les cours boursiers continuer à sombrer, avec à la clé une recapitalisation forcée.

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